Auckland, Nouvelle Zélande – Une nouvelle méta-analyse, la plus importante publiée sur le sujet à ce jour, reposant sur des données de 81 essais cliniques randomisés, vient éclairer le débat sur l'opportunité d'une supplémentation en vitamine D chez l'adulte. Sa conclusion : aucun bénéfice à attendre concernant la prévention des fractures et des chutes, ni même du côté de l'amélioration de la densité osseuse. Les détails de l'étude viennent d'être publiés dans The Lancet Diabetes & Endocrinology[1].
La supplémentation en vitamine D est recommandée pour les personnes âgées afin de traiter ou prévenir l'ostéoporose. Mais, des revues de la littérature ont conclu à une absence de bénéfice d'une telle supplémentation sur la densité osseuse, les chutes et les fractures. Les auteurs de la présente étude ont décidé d'actualiser les connaissances à ce sujet.
« Depuis la dernière grande revue de la littérature de 2014, plus de trente essais randomisés sur la vitamine D et la santé osseuse ont été publiés, doublant presque la base de données sur le sujet. Notre méta-analyse met en évidence que la vitamine D ne prévient pas les fractures, les chutes et n'améliore pas la densité osseuse, et ce, que la dose soit faible ou élevée », indique le Dr Mark J Bolland de l'université d'Auckland, auteur principal de l'étude, qui poursuit « les recommandations cliniques devraient évoluer en prenant en compte nos résultats. Sur la base des preuves existantes, nous pensons qu'il n'est pas justifié d'entreprendre d'autres essais sur la vitamine D et ses potentiels effets musculosquelettiques ».
Ceci dit, les auteurs indiquent qu'étant donné le faible nombre d'essais réalisé avec des populations carencées (n=831), c'est-à-dire présentant taux sanguin de 25-hydroxyvitamine D inférieur à 25 nmol/l, des recherches supplémentaires devraient être conduites dans ce sous-groupe de personnes.
La plus grande méta-analyse jamais publiée
Le Dr Mark J Bolland et ses collègues ont analysé 81 essais randomisés publiés. Sur 53 537 volontaires, la majorité était est femmes de plus de 65 ans (77% des essais) vivant à domicile et recevant une dose journalière supérieure à 800 UI (68% des essais). Dans la majorité des études, la vitamine D était administrée en monothérapie, sans prescription d'une supplémentation calcique, pendant une année ou moins.
Plus de la moitié des essais a été menée avec des volontaires présentant un taux sanguin de 25-hydroxyvitamine D (25OHD) inférieur à 50 nmol/l, une limite considérée comme un bas taux. Seulement 6% des études ont été réalisés avec des populations carencées (taux de 25OHD <25 nmol/l). Dans 91 % des essais, les volontaires sont parvenus à un taux de 25OHD supérieur ou égal à 50 nmol/l et la moitié à un taux supérieur ou égal à 75 nmol/l.
L'analyse des données a révélé qu'une supplémentation en vitamine D n'avait pas d'effet sur les fractures en général (36 essais, n= 44 790, risque relatif 1,00, IC 95% : [0,93–1,07] ), sur les fractures de la hanche (20 essais, n=36 665, RR 1,11, IC 95% : [0,97–1,26], et sur les chutes (37 essais, n=34 144, RR 0,97, IC 95% : [0,93–1,02 ]). Les résultats étaient similaires dans les essais en comparant faibles doses de vitamine D versus hautes doses de vitamine D.
Concernant la densité osseuse, aucune différence cliniquement pertinente n'a été observée entre le groupe avec supplémentation et celui sans (-0,16% à 0,76 % sur une durée d'un à cinq ans).
Est-ce vraiment le dernier mot ?
Dans un commentaire accompagnant l'article [2], le Pr J. Chris Gallagher (Creighton University Medical Centre, Omaha, Etats-Unis) explique :
« Le contexte de cette analyse repose sur le fait que beaucoup de patients (et de médecins) sont convaincus par différentes études et les médias sociaux que la vitamine D est un remède à tout. Ce type de croyance est une réminiscence de la ferveur qui a accompagné il y a des années le recours massif à la supplémentation en vitamines A, C et E ». Mais, les essais conduits sur ces vitamines ont finalement conclu à une absence d'effet positif, fait-il remarquer.
« Restent des questions sans réponse. 70 % des groupes traités quotidiennement l'étaient à des doses inférieures ou égales à 1000 UI par jour. Il se peut que les taux sériques 25OHD n'aient alors pas atteint la zone d'intérêt... », nuance-t-il.
Le Pr Gallagher considère que les auteurs méritent des compliments pour leur importante actualisation. « Mais j'entends déjà les fervents supporteurs : que dire des autres bénéfices de la vitamine D ? D'ici trois ans, nous devrions avoir la réponse dans la mesure où environ 100 000 participants sont actuellement inclus dans des essais randomisés et contrôlés qui évaluent la supplémentation en vitamine D contre placebo. Je suis impatient que ces études nous fournissent le dernier mot sur la vitamine D » conclut-il.
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Citer cet article: Vitamine D : pas d'effet sur les fractures, les chutes et la minéralisation osseuse - Medscape - 8 oct 2018.
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