Diabète : les résultats cardiovasculaires d’HARMONY plaident pour un retour de l’albiglutide

Dr Isabelle Catala

8 octobre 2018

Berlin, Allemagne -- Un traitement de 1,6 années de diabétiques de type 2 à haut risque cardiovasculaire par de l’albiglutide (analogue du glucagon like peptide 1, Eperzan®, GlaxoSmithKline) permet de réduire de 22 % l’incidence des évènements cardiaques graves (7 % de décès, AVC ou infarctus du myocarde contre 9 % sous placebo). Cette différence est principalement liée à une baisse de 75 % des infarctus du myocarde, alors que l’incidence des décès n’était, elle, pas modifiée.

Les résultats de l’essai international multicentrique HARMONY Outcomes study, ont été présentés à l’occasion d’une session du congrès de l’Association européenne pour l'étude du diabète (EASD) 2018. Ils sont publiés simultanément dans le Lancet [1].

Peu d’effet métabolique

L’essai HARMONY a inclus 9 463 diabétiques de type 2 enrôlés entre juillet 2015 et novembre 2016. Les patients ont été randomisés pour recevoir, en double aveugle, soit une injection hebdomadaire d’albiglutide (30 ou 50 mg) soit un placebo en plus d’un traitement optimal de leur diabète et de leurs comorbidités. Ces patients étaient considérés comme à très haut risque puisqu’ils souffraient dans 70 % des cas de coronaropathie, qu’ils avaient déjà présenté un infarctus pour la moitié d’entre eux et qu’ils étaient 44 % à être pontés. En outre 86 % des personnes incluses étaient hypertendues, 20 % souffraient d’insuffisance cardiaque, et 17 % avait déjà été victime d’AVC.

Le Dr John McMurray (Glasgow, Grande-Bretagne) a souligné que l’effet métabolique de cette molécule est limité : 26 % de patients à l’objectif d’une HbA1c à 7,5 % contre 15,1 % chez les témoins. Mais, en revanche, l’impact sur le risque cardiovasculaire est net et il est nécessaire de traiter 50 patients pendant 1,6 années pour prévenir un événement.

Comment expliquer l’absence d’impact sur la mortalité ? Peut-être par la durée relativement courte de suivi. Les investigateurs indique ainsi dans leur article du Lancet qu’un autre analogue de GPL-1, le liraglutide, a pour sa part abaissé l’incidence des décès, mais avec une durée de traitement de 3,8 ans (étude LEADER). 

Une bonne tolérance à court terme

Aucune différence significative n’a été observée en termes d’effets secondaires majeurs entre les patients recevant l’albiglutide et les autres (19,8 % vs 21,7%).

Les réactions au site d’injection étaient les seuls effets secondaires significativement plus fréquents avec l’analogue de GLP1. Les taux d’incidence des pancréatites aigues, des cancers du pancréas et des cancers médullaires de la thyroïde, sur ce court suivi, étaient similaires entre les deux bras.

Un autre laboratoire prendra le relai

Ce qui a fait toute la particularité de la présentation de cette étude – sous les applaudissements des participants – vient du fait que l’albiglutide n’est plus commercialisé depuis 2017 par GSK. Pourtant, le laboratoire a tenu à aller jusqu’au bout de suivi des patients de l’étude HARMONY. Dans un communiqué de presse distribué au congrès, GSK explique qu’il fera de son mieux pour que cette molécule soit reprise par un autre laboratoire puisque les résultats du suivi montrent qu’une population de patients à très haut risque cardio-vasculaire peut bénéficier significativement de ce traitement.

Qui seraient les diabétiques éligibles ? Des patients vasculaires chez qui une perte de poids ne serait pas souhaitable puisque l’utilisation de l’albiglutide, contrairement à celle d’autres analogues du GPL-1, n’a pas eu d’impact sur le poids.

La preuve que les cliniciens peuvent aussi faire bouger les choses

Interrogé par Medscape France, le Dr Karim Bouzakri (Centre Européen de l’Etude du Diabète, Strasbourg) explique que « la diabétologie reste une spécialité dans laquelle le patient est au cœur des recherches. L’étude HARMONY – et ses conséquences sur la commercialisation de l’albiglutide – prouve une nouvelle fois que les laboratoires n’ont pas la main mise sur la spécialité : les cliniciens peuvent aussi faire bouger les choses. Dans les laboratoires de recherche, les pistes fondamentales et cliniques sont vastes, je travaille par exemple sur le rôle du muscle dans le diabète. Il est toujours possible de trouver des financements indépendants nationaux et internationaux qui permettent de développer des projets innovants ».

L’étude HARMONY – et ses conséquences sur la commercialisation de l’albiglutide – prouve une nouvelle fois que les laboratoires n’ont pas la main mise sur la spécialité  Dr Karim Bouzakri

 

Bénéfices CV des agonistes de GLP-1 : un de plus sur la liste

Avec les bons résultats d’HARMONY, l’albiglutide vient compléter la liste des agonistes du GLP-1 intéressants sur le plan CV. Après le liraglutide (Victoza®, Novo Nordisk) qui a fait ses preuves dans l’essai LEADER et le semaglutide (Ozempic®, Novo Nordisk) dans SUSTAIN-6, l’albiglutide est le troisième de cette classe thérapeutique à montrer une réduction significative des événements CV majeurs, bien qu’il ne soit pas associé à une baisse de la mortalité CV, comme le liraglutide.

En revanche, le lixisenatide (Lyxumia®, Sanofi) et l’exenatide (Bydureon®, AstraZeneca) n’ont pas montré protection CV dans les essais ELIXA et EXSCEL.

 

 

 

 

 

 

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