Sheffield, Royaume-Uni — Selon une petite étude anglaise, qui a pris en compte plusieurs facteurs influençant le niveau plasmatique en vitamine D, les patients diabétiques de type 2 souffrant de neuropathie périphérique présentent une carence en vitamine D [1]. Reste à savoir si une supplémentation peut prévenir ou ralentir l’apparition de cette complication invalidante, qui touche un diabétique sur quatre.
Avec les nombreuses études lancées ces dernières années pour mieux cerner le rôle de la vitamine D dans le fonctionnement de l’organisme, la liste des répercussions néfastes en cas de carence ne cesse de s’allonger. Si les bienfaits d’une supplémentation sont toujours discutés, plusieurs corrélations ont été mises en évidence entre un déficit en vitamine D et l’émergence de certaines pathologies.
Dans le cas du diabète, les études sur le sujet ne manquent pas. Des travaux australiens ont ainsi montré que les enfants ayant un diabète de type 1 présentent plus souvent des faibles niveaux en vitamine D [2]. Une autre étude menée chez des militaires américains a révélé un surrisque de diabète de type 2 chez les sujets présentant une carence [3].
L’exposition au soleil prise en compte
Plus récemment, une méta-analyse portant sur 24 études contrôles et plus de 1 500 diabétiques de type 2, a rapporté une amélioration de plusieurs paramètres après supplémentation [4]. Une hausse du niveau de vitamine D, avec un apport minimum de 4000 UI/jour, s’est ainsi accompagnée d’une baisse de la glycémie à jeun (-4,9 mg/dL), de l’hémoglobine glyquée (-0,3%) et de la résistance à l’insuline.
ette nouvelle étude, le Pr Solomon Tesfaye (Royal Hallamshire Hospital, Sheffield, Royaume-Uni) et ses collègues se sont intéressés aux neuropathies diabétiques et au possible impact d’une carence en vitamine D. Cette complication a été associée dans de précédents travaux au niveau de 25-hydroxyvitamine D sérique (25-OH-D), mais il restait à confirmer ce lien en tenant compte notamment de facteurs confondant, telle que l’exposition au soleil, expliquent les auteurs.
Par ailleurs, selon eux, beaucoup d’études rapportant un lien entre le niveau de vitamine D et le développement d‘une neuropathie n’avaient pas fait de distinction entre les patients ayant ou non des symptômes douloureux. Dans l’ensemble, la complication n’était pas caractérisée.
Sensibilité au froid altérée
Au total, les chercheurs ont inclus 45 patients atteints de diabète de type 2 et 14 volontaires sains. Les patients diabétiques ont été divisés en trois groupes, en séparant ceux ayant des douleurs liées à une neuropathie diabétique périphérique (n=17), ceux présentant une neuropathie mais sans symptômes douloureux (n=14) et ceux n’ayant pas de neuropathie (n=14).
L’exposition saisonnière à la lumière du soleil a été évaluée, tout comme le niveau d’activité quotidienne, qui peut également avoir un impact sur le taux sérique de vitamine D. Une biopsie cutanée a également été réalisée sur les membres inférieurs pour déterminer la densité en fibres nerveuses. Les chercheurs ont aussi effectué des tests de sensibilité et de conduction nerveuse.
Après ajustement sur plusieurs facteurs (âge, indice de masse corporelle, exposition au soleil, score d’activité…), l’étude montre que les diabétiques souffrant de neuropathie ont des niveaux beaucoup plus faibles en 25-OH-D (en moyenne 34,9 nmol/L) comparativement aux individus sains (62,1 nmol/L), mais aussi aux patients avec neuropathie non douloureuse (53,1 nmol/L) ou sans neuropathie (49,6 nmol/L).
Les chercheurs ont également établi une corrélation entre un niveau plus bas en vitamine D et une faible densité en petites fibres nerveuses dans les biospies cutanées, ce qui caractérise une neuropathie périphérique sensitive. Dans ce cas, la destruction de ces fibres est à l’origine d’une perte de sensibilité, de sensations de brulures ou de picotements.
Un effet neuroprotecteur?
La perception du froid est ainsi corrélée au taux de vitamine D plasmatique, le seuil de détection du froid étant inférieur à la normale chez les patients diabétiques avec les niveaux de vitamine D les plus bas. « Les patients atteints de neuropathie douloureuse présentent une faible densité nerveuse et ne perçoivent le froid qu’à partir de 11°C », a précisé le Pr Tesfaye, auprès de Medscape édition internationale.
« L’étude suggère qu’une carence en vitamine D pourrait contribuer au développement d’une neuropathie douloureuse en jouant un rôle dans la pathogénèse de la neuropathie des petites fibres, qui touche particulièrement les récepteurs nociceptifs ». La vitamine D aurait donc un effet neuroprotecteur, mais le lien de cause à effet reste à prouver, selon les auteurs.
« La vitamine D a un rôle important en favorisant la sécrétion du facteur de croissance des nerfs (NGF). Le phénotype et la sensibilité des fibres nociceptives étant régulés par le NGF, une carence pourrait conduire au développement d’une neuropathie diabétique de petites fibres » avancent les chercheurs.
Un essai clinique prospectif randomisé est désormais envisagé. « Si le lien de causalité est confirmé, il y aurait un impact significatif dans la pratique clinique », estime le Pr Tesfaye. « Le dosage de la vitamine D et l’éventuelle supplémentation seraient alors être justifiés chez ces patients diabétiques souffrant de neuropathie. »
La découverte d’une carence pourrait également améliorer le diagnostic et la prise en charge de cette complication. Selon le diabétologue, « 25% de diabétiques souffrent de douleurs neuropathiques, mais dans de nombreux cas, les patients souffrent en silence car ils pensent que les douleurs ressenties font partie du processus du vieillissement ».
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Citer cet article: Diabète de type 2 : la douleur neuropathique corrélée au niveau de vitamine D - Medscape - 19 sept 2018.
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