POINT DE VUE

Cancer : des conditions de vie encore très dégradées 5 ans après le diagnostic

Dr Manuel Rodrigues

Auteurs et déclarations

13 septembre 2018

Le blog du Dr Manuel Rodrigues – Oncologue

L’enquête nationale VICAN5 sur les conditions de vie cinq ans après le diagnostic de cancer montre que les deux tiers des patients souffrent encore de séquelles du cancer ou du traitement. Or, trois fois sur quatre, ces séquelles ne bénéficient pas d’un suivi médical spécifique.

Manuel Rodrigues — Bonjour et bienvenus sur le site Medscape. Je suis le docteur Manuel Rodrigues — je suis oncologue médical à l’Institut Curie, à Paris.

Je vais vous parler aujourd’hui de l’étude  VICAN5 , une étude coordonnée par l’Institut national du cancer (InCA), dont les résultats ont été présentés cet été et qui s’intéresse à l’après-cancer et plus particulièrement à la vie après le cancer cinq ans après le diagnostic. C’est une étude qui est très fouillée, très documentée, avec de nombreux chiffres. Elle aborde à peu près tous les domaines qui peuvent être impactés par le cancer et par son traitement. Il y a, par exemple, des chiffres intéressants sur la prévalence de l’arrêt tabagique après le traitement d’un cancer où on découvre que trois quarts des patients qui ont un cancer du poumon ont arrêté de fumer à cinq ans de leur diagnostic, tout comme les deux tiers des patientes qui ont eu un cancer du col de l’utérus et plus de la moitié des patients qui ont eu un cancer des voies aérodigestives supérieures ou des cancers du rein, par exemple, c’est encourageant.

Deux tiers des patients souffrent de séquelles du cancer ou du traitement à 5 ans

Il y a également des chiffres qui sont beaucoup plus frustrants pour nous, des chiffres sur lesquels on a du mal à agir, sur les séquelles du cancer, les séquelles du traitement de cancer, puisque deux tiers des patients, à cinq ans de leur diagnostic, se plaignent de souffrir des séquelles du traitement et des séquelles du cancer, avec un aspect polymorphique assez important, puisqu’il peut s’agir de dysfonctions liées à des modifications de l’image du corps, des douleurs, de la fatigue, mais également des troubles psychologiques. Or, trois fois sur quatre, ces séquelles ne bénéficient pas d’un suivi médical spécifique, surtout, en raison d’une certaine frustration de ne pas savoir comment les prendre en charge.

Il y a des séquelles évidentes, qui vont avoir des répercussions également sur le risque de cancer. Notamment la variation du poids. On imagine souvent qu’un patient qui a eu un cancer, va perdre du poids à cause de son cancer et de son traitement — eh bien, à en croire cette étude, ce n’est pas le cas. La majorité des patients ont tendance à gagner du poids. C’est important puisque, par exemple, dans le cancer de l’endomètre on sait que ce cancer est lié en partie au syndrome métabolique lié au surpoids. On encourage donc les patientes à perdre du poids et à avoir une activité physique. Or, dans cette étude, on découvre que 20 % des patientes qui ont eu un cancer de l’endomètre ont pris du poids et, même, plus de 10 % du poids initial — c’est, donc, très significatif.

Autres chiffres importants : on sait que 50 % des patients dans cette étude souffrent d’une fatigue significative par rapport au diagnostic de leur cancer. On ne sait pas comment aborder cette question – par l’activité physique, mais il est difficile de suffisamment encourager les patients. Nous n’avons pas beaucoup d’outils, la prescription du sport sur ordonnance fait défaut, en particulier la question du remboursement fait défaut.

Aussi, un tiers des patients souffrent d’une dégradation de leur qualité de vie mentale, l’aspect psychologique, avec des questions d’angoisse et de dépression.

Enfin de façon plus prosaïque, il faut bien noter — c’est une thématique qui est soulevée depuis quelques années — qu’un quart des patients ont vu leurs revenus baisser suite au traitement d’un cancer, que ce soit par des questions de temps partiel, de difficultés à reprendre le travail, de séparation, aussi, avec son compagnon. Donc ce sont des questions absolument majeures. Cette étude décrit la situation actuelle. Il n’y a plus qu’à trouver les moyens d’y remédier et d’avoir des ressources pour s’y atteler. Voilà, à bientôt sur le site Medscape.

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