Brimingham, Royaume-Uni ‑- On connait les bons résultats de l’anticoagulant oral direct rivaroxaban (Xarelto®, Bayer) dans les essais cliniques. Le vaste programme international XANTUS de Bayer confirme que le rivaroxaban offre aussi un bon profil de sécurité dans la vraie vie, quel que soit le pays où il est prescrit.
Paulus Kirchhof (Institute of Cardiovascular Sciences, Université de Birmingham, Royaume-Uni) a rapporté les résultats du programme XANTUS dans le JACC du 2 juillet [1] .
En tout, 47 pays répartis dans le monde ont participé à cette étude observationnelle non interventionnelle prospective concernant la sécurité du traitement (juin 2012 et décembre 2014). Le bras XANTUS réunit le Canada, les pays de l’Europe de l’ouest et Israël, XANAP l’Europe de l’Est, l’Asie et XANTUS EL l’Amérique latine, l’Afrique
Les doses de rivaroxaban conseillées (mais non imposées) tenaient compte de la fonction rénale : 20mg/j pour une clairance de Cockcroft (Clc) ≥ 50ml/mn ou 15mg/j si la Clc était comprise entre 15 et 49ml/mn. Le modèle de prescription pour la Thaïlande différait avec une posologie plus faible de 5mg/j. Près de 75% des patients ont reçu la posologie dictée par la fonction rénale. Les événements médicaux survenant au cours du traitement ont été colligés par le comité de surveillance de l’étude.
Objectif principal : la sécurité
Il s’agit d’abord d’une étude sur la sécurité du produit : les critères primaires étaient soit les hémorragies majeures mettant en jeu le pronostic vital, ou encore les effets secondaires sévères ou les décès toutes causes confondues.
Pour les critères secondaires (efficacité) les chercheurs se sont intéressés aux événements thrombotiques et aux saignements significatifs en rapport avec le traitement (en utilisant les critères de l’International Society on Thrombosis and Haemostasis [ISTH].)
Une étude en vie réelle
Les patients étaient âgés de 70 ans en moyenne, dont 43% de femmes. Le score moyen CHADS² était = 2, le score CHA²DS² VASc = 3,5 et le score moyen HAS-BLED = 2. Les comorbidités étaient celles que l’on rencontre en pratique quotidienne : insuffisance cardiaque, HTA (78%), diabète, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral. Un tiers des patients était naïfs de traitement anticoagulant, un tiers prenait auparavant des anti-vitamines K. Tous les types de fibrillations auriculaires étaient à peu près également représentés.
Trois quart des patients ont été suivis pendant un an. L’adhérence au traitement était de 77,4 %. La dose recommandée de 20mg a été prescrite à 73% des patients. En Asie cependant pratiquement un patient sur deux prenait 15mg/j (44%).
96% des patients n’ont pas eu d’hémorragie ou accident thrombotique
Il ressort des résultats sur les critères primaires (190 événements pour 172 patients) que le taux de patients décédés pour 100 patients-années est 1,9 (IC95 : 1,6-2,2). Les accidents vasculaires cérébraux, les hémorragies gravissimes, complications majeures représentent 1,7 % (IC95 : 1,5-2,0). Les saignements fatals sont responsables de 0,2% des décès, les hémorragies intracrâniennes 0,4% des décès. Quant aux hémorragies gastriques sévères, elles surviennent chez 0,7% des patients.
Concernant les critères secondaires (196 événements chez 176 patients), les accidents thrombotiques sont les plus fréquents 1,8% dont 1,3% pour les accidents vasculaires cérébraux (incluant les accidents ischémiques transitoires), le taux d’infarctus du myocarde est de 0,4%. Le pourcentage de patients en vie n’ayant pas eu de saignement ou d’accident thrombo-embolique varie selon les régions entre 95,7% et 97,4%.
Quelques spécificités selon les pays
Les résultats sont globalement identiques dans les différentes régions du monde. Il existe néanmoins quelques spécificités selon les pays. Les saignements sont plus fréquents dans les pays occidentaux (cohorte Xantus 2,3%), le taux d’accidents vasculaires cérébraux est plus élevé en Asie (1,8%), il y a plus de décès en pays latino-américain, en Afrique et au moyen Orient (2,7%). L’adhérence thérapeutique est plus importante dans les pays occidentaux (84%) et plus faible en Asie (66%).
Rôle des comorbidités
Le nombre d’accident cérébraux thrombotiques ou hémorragiques augmente avec l’âge du patient, les décès avec le degré d’insuffisance rénale.
Paradoxalement, l’incidence des saignements et accidents vasculaires cérébraux est plus élevée quand la dose de rivaroxaban est faible. Les auteurs y voient un critère de fragilité du patient traité avec des posologies plus faibles pour cause de comorbidités.
Globalement 73% des patients étaient satisfaits du traitement.
Un bon profil bénéfice-risque sur le terrain
En termes de sécurité : le taux des saignements majeurs est 1,7%, les hémorragies intra-crâniennes 0,4%, les hémorragies gastriques 0,7%.
En termes d’efficacité : les AVC (et autres embolies) sont constatés chez 1,0% des patients, les AVC thrombotiques chez 0,6% et les décès chez 1,9%.
Il faut souligner la bonne adhérence : 77% des patients traités au bout d’une année. 7% ont arrêté de leur propre chef, 7% pour un saignement.
Cette étude prospective mondiale sur un très grand nombre de patients prouve un important profil de sécurité pour le rivaroxaban quel que soit le continent. « Les résultats de cette analyse montrent (…) un pourcentage très faible d’AVC et de saignements majeurs après un an de traitement par le rivaroxaban quel que soit le pays, les hémorragies fatales ou dans un organe critique, y compris intracérébral sont rares survenant chez 0,6% des patients », indique le Dr Kirchhof.
Le traitement laissé à la discrétion des praticiens place l’étude dans les conditions rencontrées dans la vraie vie. Dans un éditorial accompagnant l’article [2], Jeff Healey (McMaster University. Hamilton. Ontario, Canado) précise « ainsi comme pour de nombreuses études observationnelles, celle-ci basée, sur une étude de population, a pu trouver un équilibre raisonnable entre ce qui est pratiqué et ce qui est idéal ».
Pas prescrit aux doses recommandées
Selon les auteurs, le respect exact des posologies passe par l’éducation des médecins, notamment 38% des patients n’ont pas eu l’évaluation de leur fonction rénale à l’entrée. Il va falloir comprendre pourquoi le rivaroxaban, comme il en est pour les autres AOD, n’est pas prescrit aux doses recommandées. Il faut également tenir compte du recrutement direct par les praticiens, le caractère ouvert de l’étude peut être responsable de biais dans cette étude.
Le Dr Healey conclut « les études cliniques concernant l’anticoagulation pour la prévention des AVC dans la FANV sont parmi les plus fructueuses en médecine. On voit maintenant que la transition de ces résultats dans la pratique médicale a obtenu le même niveau de preuves ».
Une preuve de plus est apportée à la sécurité et l’efficacité des AOD d’une grande facilité d’utilisation dans la prévention des accidents emboliques vasculaires cérébraux au cours de la fibrillation auriculaire non valvulaire [3].
Glossaire :
*XANTUS: Xarelto for Prevention of Stroke in Patients With Atrial Fibrillation.
*XANAP: Xarelto for Prevention of Stroke in Patients With Atrial Fibrillation in Asia
*XANTUS-EL: (Xarelto for Prevention of Stroke in Patients With Atrial Fibrillation in Latin America and EMEA Region)
Le programme XANTUS a été financé par Bayer. |
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Citer cet article: Etudes Xantus : sécurité et efficacité du rivaroxaban dans la vraie vie - Medscape - 12 juil 2018.
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