Création du syndicat des médecins remplaçants des hôpitaux et appel à la grève

Jean-Bernard Gervais

Auteurs et déclarations

24 mai 2018

France -- Les médecins remplaçants, fâchés de voir leur rémunération plafonnée, viennent de créer leur syndicat. Ils organisent leur première assemblée générale le 30 juin prochain.

Médecins « mercenaires » aux rémunérations « outrancières » ?

Boucs émissaires ? C'est le constat fait par le tout nouveau syndicat des médecins remplaçants des hôpitaux (SNMRH), qui justifie ainsi la création de ce syndicat : « Les médecins remplaçants ne peuvent accepter d’être désignés comme les boucs émissaires des difficultés et  du déficit des hôpitaux publics. Il dénonce les caricatures volontaires sur les rémunérations tout comme les termes injurieux prononcés à leur égard ». En cause : la publication d'un décret du 24 novembre 2017, « relatif au travail temporaire des praticiens intérimaires dans les établissements publics de santé ». Ce décret est directement issu de la loi de santé, elle-même inspiré par le rapport Véran, rendu public en 2013. Le député Olivier Véran, par ailleurs neurologue au CHU de Grenoble, dénonçait les rémunérations « outrancières » des médecins intérimaires, dits mercenaires, qui représentait un surcoût de 500 millions d'euros pour les hôpitaux publics, soit pour certains 15 000 euros par mois, ou 1000 à 2000 euros la journée. La situation étant critique dans certaines petites structures, où les effectifs médicaux sont à 100% composés de médecins intérimaires.

Baisse de 40% de la rémunération sur trois ans

Résultat, en son article 136, la loi de modernisation de notre système de santé a stipulé que la rémunération des médecins intérimaires serait dorénavant plafonnée  (arrêté du 24 novembre 2017). La rémunération des médecins intérimaires est désormais plafonnée à 1 404,05 euros brut pour 24 heures de garde en 2018. Un plafond qui passera ensuite à 1 287,05 euros en 2019, puis 1 170,04 euros en 2020. Pour le SNMRH, cela équivaut à une rémunération horaire inférieure à 65 euros. Sur son site Internet, en guise de première action syndicale, le SNMRH a listé les hôpitaux qui appliquent d'ores et déjà ce barème de rémunération, soit une cinquantaine de structures, en menaçant de les boycotter. À partir du 1er juin, ajoute-t-il, c'est l'ensemble des hôpitaux qui appliqueront le décret. Et c'est là que le bât blesse. Ce décret « prévoit de réduire sans concertation et sans proposition de démarche sur la recherche alternative de postes stables les rémunérations de 40 % en 3 ans ».

Or, rappelle le SNMRH, « la rémunération actuelle des médecins remplaçants n'est en aucun cas excessive au vu du de ses contraintes (précarité, mobilité, adaptation, manque de considération, congés, vacances, formation, vie familiale,...). Cette rémunération n'a pas été revalorisée depuis 17 ans ». Avant que de créer ce syndicat, les médecins intérimaires avaient décidé de lancer un mouvement de grève en février dernier. Le principe de ce mouvement social ? Refuser les offres appliquant la nouvelle tarification, issue du décret de novembre 2017. Ils prévoyaient également une grève totale des remplacements en juillet, août, ainsi que les jours fériés. Rien de tout cela n'apparait sur le site du SNMRH, sinon l'annonce d'une prochaine assemblée générale le 30 juin prochain.

 
Le SNMRH a listé les hôpitaux qui appliquent d'ores et déjà ce barème de rémunération, soit une cinquantaine de structures, en menaçant de les boycotter.
 

Pour ou contre la grève ?

Quoi qu'il en soit, l'annonce de cette grève a semble-t-il ému les autorités, puisque l'Ordre des médecins s'est fendu en avril d'un courrier à l'intention du SNMRH, leur confiant leur inquiétude « quant à la prise en charge des patients admis aux urgences ou hospitalisés ». Fait notoire, cette grève des médecins intérimaires a également été dénoncée par... un syndicat de médecins, le SNPHARE. Et pour cause : « le SNPHARE rappelle qu'il a été le premier à dénoncer les conséquences néfastes de l'intérim médical dans les hôpitaux, à l’origine d’une mission dirigée par le député Olivier Véran qui évalue, dans son rapport final, le coût de l'intérim médical à 500 millions d'euros pour 2013 ». Le SNPHARE reproche au collectif de médecins intérimaires d'avoir blacklisté les hôpitaux qui ont appliqué le décret de novembre 2017 sur le plafonnement des rémunérations des médecins intérimaires. Et de se poser la question : comment se fait-il que certains hôpitaux n'appliquent pas ce décret, et pénalisent ainsi ceux qui respectent la loi. « Le droit non appliqué crée une situation de concurrence inacceptable, dont les médecins des hôpitaux « blacklistés » font les frais, soumis à une production d'actes impossible à tenir, en plus de la permanence des soins » écrit ce syndicat.

Coût d'une journée de médecin hospitalier

Apprenant la création du SNMRH, le SNPHARE en a remis une couche, en s'interrogeant, dans un communiqué, sur le cout d'une journée de médecin hospitalier : «  Si les établissements de soins ont accepté de payer au taux horaire de 65 euros nets (« le prix du marché ») des médecins remplaçants [...]  comment tolérer que les médecins hospitaliers, qui font pour la majorité d’entre eux cet intérim au titre de « temps de travail additionnel », ne soit payés que 315 euros bruts pour une journée de travail en heures supplémentaires ? » Le SNPHARE en profite pour demander le décompte des heures supplémentaires au-delà des 40 heures, la révision des tarifs des heures supplémentaires à hauteur de 125% du salaire entre la 41e et la 48e heure, et 150% au-delà. 

 

Qui est à la tête du SNMRH ?

Le SNMRH revendique 1300 adhérents. Son bureau a été élu et sa présidente est le Dr Linda Darrasse, anesthésiste réanimateur. Elle est assistée du Dr Jean-Pierre Rey, président adjoint, du Dr Abdelaziz Hanaf, secrétaire, du Dr Christine Dautheribes, secrétaire adjointe, du Dr Sid Benmansour, trésorier, du Dr Abdellilah El Hairy, trésorier adjoint, du Dr Thierry Allico, urgentiste. Parmi les premiers objectifs du syndicat, la création d'un contrat type avec les hôpitaux, qui stipulera les conditions matérielles d'accueil, ainsi que les conditions d'exercice.


 

 

 

 

 

 

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