Chicago, Etats-Unis – L'activité physique est loin d'être anecdotique quand on parle de cancer. Les preuves de ses bénéfices chez les patients atteints de cancer s’accumulent : amélioration de la force musculaire, de la qualité de vie et un effet positif sur la survie.
Une nouvelle étude présentée au congrès annuel de l'American Association for Cancer Research (AACR)[1] montre que les patients cancéreux qui sont physiquement actifs à la fois avant et après leur traitement ont une survie améliorée de 40 % comparé à ceux qui sont sédentaires. Cette association positive entre l'activité physique et la mortalité a été observée sur huit types de cancer. Et ce, même après ajustements pour le sexe, le stade de la tumeur, le statut vis-à-vis du tabac et l'index de masse corporelle (IMC).
Il n'est jamais trop tard pour commencer
« Même si une association significative n'a été constatée que pour seulement huit localisations tumorales, le risque relatif (RR) était inférieur à 1 pour quasiment toutes les localisations étudiées » a expliqué le Dr Rikki Cannioto (Roswell Park Comprehensive Cancer Center, Buffalo, Etats-Unis), auteure principale de l’étude. « D'un point de vue pratique, il y a un bénéfice de survie pour tous les types de cancer » a-t-elle précisé à nos confrères de Medscape Medical News. « Nous n'avons probablement eu pas assez de puissance pour tous les cancers, mais le message clef est qu'il y a un bénéfice pour tous les cancers. »
L'amélioration de la survie a également été constatée chez les patients ayant débuté l’activité physique après le diagnostic. « Les patients qui n'avaient jamais fait d'exercice physique dans la décennie précédant le diagnostic, mais qui ont commencé au moment du diagnostic ont une survie remarquablement augmentée de 25 à 28 %, comparé à ceux qui étaient restés inactifs » a-t-elle indiqué.
« Nous avons constaté qu’il y a un bénéfice à commencer l'exercice physique après le diagnostic. Il n'est jamais trop tard pour commencer »
Exercice physique : pas besoin de viser trop haut
Pour cette étude, Rikki Cannioto et ses collègues ont étudié 5807 patients (54,8 % de femmes et 45,2 % d'hommes) suivis au Roswell Park Comprehensive Cancer Center entre 2003 et 2016. Les patients étaient atteints de différents types de cancer : vessie, sein, tête et cou, rein, foie, ovaires, pancréas, prostate, peau, colorectal, œsophage, endomètre, et des cancers hématologiques.
Parmi cette population, 25 % ont déclaré ne pas pratiquer une activité physique régulière avant le diagnostic et 42 % après le diagnostic. En regardant le statut vis-à-vis de l'activité physique habituelle, 52 % ont déclaré être habituellement actifs, 19% habituellement inactifs. 23 % ont rapporté une baisse d'activité après le diagnostic, 6 % une augmentation.
Le meilleur avantage sur la survie a été observé chez les patients qui s'entraînaient 3 à 4 jours par semaine avant le diagnostic (hazard ratio HR, 0,66 ; P<0,001) et 3 à 4 jours par semaine après le diagnostic (HR, 0,59 ; P< 0,001).
En revanche, la survie était virtuellement la même chez les patients s'entraînant 1 à 2 fois par semaine avant (HR, 0,77 ; P<0,001) et après le diagnostic (HR, 0,72 ; P<0,001) comparé à ceux qui s'entraînaient 5 à 7 fois par semaine avant (HR,0,76 ; P<0,001) et après le diagnostic (HR, 0,73 ; P<0,001).
« Les patients qui faisaient de l'exercice 1 à 2 fois par semaine avaient pratiquement la même survie que ceux qui s'entraînaient le plus, 5 à 7 fois. »
« Ceux qui s'entraînaient 3 à 4 fois par semaine ont eu les meilleurs résultats, mais le message à retenir est que l'exercice, même peu fréquent est bénéfique pour la survie. Les patients pratiquant tous les jours ne faisaient pas mieux » a commenté Rikki Cannioto.
Ces résultats confirment ceux d’une étude récente sur les « week-end warriors » qui a montré que les individus qui faisaient seulement une à deux sessions de sport par semaine avaient un risque de mortalité toutes causes, y compris par maladies CV et par cancer, plus faible que les personnes qui ne faisaient jamais d'exercice[2]. « C'est encourageant, d'autant que les patients atteints de cancer peuvent se sentir dépassés par les recommandations sur l'activité physique » analyse-t-elle.
Globalement, le risque de mortalité était 40 % moindre chez les patients actifs versus les patients inactifs (HR=0,60 ; [IC 95%, 0,54-0,68].
Aussi, quand les patients habituellement actifs étaient considérés comme le groupe de référence, le risque de mortalité était accru de 66 % chez les patients inactifs (HR=1,66 ; [IC 95%, 1,48-1,87].
Les personnes qui augmentaient leur activité physique après le diagnostic diminuaient leur risque de mortalité de 25 % (HR=0,75 ; [IC 95%, 0,61-0,92]) comparé à celles qui restaient inactives.
Promouvoir l’exercice dans la pratique de tous les jours
Pour le professeur de kinésiologie Brian C. Focht (Ohio State University), cette étude apporte « une contribution significative à la littérature scientifique sur l’intérêt de l'exercice comme soin de support chez ces patients ». Il souligne, cependant qu’il faut désormais définir les bonnes pratiques.
« Les preuves s'accumulant, j'espère que les oncologues médicaux vont continuer à promouvoir l’importance d’adhérer à un mode de vie sain, au sport et à une bonne hygiène alimentaire, auprès des patients atteints de cancer et des survivants » a-t-il commenté.
« Des études ont montré que lorsque les conseils sur le mode de vie sont donnés par l'oncologue, c'est très motivant. Mais ce n'est malheureusement pas pratique courante dans beaucoup de cliniques » précise le Dr Erin L.Van Blarigan (University of California, San Francisco) qui indique que l'American Cancer Society et l'American College of Sports Medicine a publié des recommandations destinées aux patients précisant le type et la quantité d'exercices adaptés.
En France, l'Institut National du Cancer (Inca) a également publié un rapport et des recommandations sur l’activité physique pendant et après le cancer.
L'étude a été financée par des bourses du Cancer Center Support Grant Shared Ressource et du National Cancer Institute. Les Dr Cannioto, Focht et Van Blarigan n'ont pas déclaré de conflit d'intérêt. |
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Citer cet article: Cancer : l’activité physique, même modérée, améliore la survie - Medscape - 11 mai 2018.
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