Boston, Etats-Unis -- L’ouragan Maria qui a touché le 20 septembre 2017 l’île de Porto Rico a obligé les médecins américains à revoir les algorithmes de réhydratation des patients dans leur pays. Pourquoi ? Parce que cette île produit 44 % des poches de sérum physiologique utilisées par voie veineuse aux Etats-Unis. Si dans un premier temps, la pénurie a principalement concerné les poches de petit volume – 50 à 100 ml – qui servent à diluer les médicaments, depuis quelques semaines, les contenants de 500 à 1 000 ml viennent à manquer. Aux Etats-Unis, seuls trois fabricants assurent l’approvisionnement de la plupart des hôpitaux du territoire. Et si l’un deux connaît des problèmes de production, l’impact se fait sentir immédiatement.
Un protocole partagé dans le NEJM
Ce sont les services d’urgences qui sont les plus gros consommateurs de sérum physiologique par voie intraveineuse (30 % des poches prescrites à l’hôpital). Face à la pénurie, c’est tout naturellement les urgentistes qui ont cherché à développer des stratégies de réhydratation orale applicables au plus grand nombre afin de réserver la voie-intraveineuse aux personnes les plus déshydratées.
Le service des urgences du Brigham and Women’s hospital à Boston, – qui reçoit chaque année 62 000 adultes et consomme 21 000 l de sérum physiologique – partage dans le NEJM son protocole de réhydratation orale qui a permis de faire baisser la consommation de poches [1]. Il a été rapidement adopté par les autres services de l’hôpital ce qui a permis de gérer la crise d’approvisionnement plus facilement.
D’abord traiter par antalgiques, antipyrétiques ou antiémétiques
Les auteurs ont, dans un premier temps, défini les patients éligibles à une réhydratation orale : il s’agissait d’adultes souffrant de déshydratation modérée en lien avec une pathologie telle qu’une rhinopharyngite, une gastro-entérite, des vomissements gravidiques ou une infection respiratoire supérieure. Etaient exclues les personnes souffrant de déshydratation sévère et celles incapables de se réhydrater par la bouche (en cas d’occlusion intestinale par exemple).
Avant de proposer une réhydratation orale, un traitement par antalgiques, antipyrétiques ou antiémétiques était parfois nécessaire. Si c’était le cas, les patients devaient attendre 20 minutes, le temps de l’effet du traitement avant de commencer à boire.
Les patients avaient le choix de leur boisson : solution d’électrolytes parfumée à une saveur artificielle, eau, jus de fruit dilué ou boisson énergétique diluée. Ces dernières étant disponibles sous la forme de poudre, elles ont pu être délivrées facilement dans tous les services de l’hôpital.
Un gobelet, une paille, un pichet et une incitation à boire
Comment était administrée la réhydratation ? Avant tout, le protocole a été enregistré dans le programme informatique des urgences afin d’inciter les médecins à y recourir pour les patients éligibles. Les patients ont reçu un verre d’une contenance de 30 ml, une paille et un pichet de 1 l de leur boisson favorite. Tous devaient boire 30 ml toutes les 3 à 5 minutes et pour les aider à cela, ils pouvaient être accompagnés d’un membre de leur famille les incitant à boire ou pouvaient mettre en alarme automatique leur téléphone cellulaire. Après les 250 premiers ml consommés, la vitesse de réhydratation était accélérée, sauf, bien sûr, en cas de vomissement. La surveillance a été effectuée par un médecin qui pouvait – en se fondant sur l’état clinique – décider de passer à une hydratation IV si nécessaire.
Réduction de 30 % puis encore 15 % des prescriptions
Au cours de la première semaine suivant la mise en place du protocole, le recours à la réhydratation par voie intra-veineuse a baissé de 30 %. Dans les 3 semaines qui ont suivi, la consommation a encore baissé de 15 %. Les auteurs soulignent que cette option thérapeutique pourrait être prolongée à long terme, mais qu’elle nécessite néanmoins un temps médical plus important afin d’expliquer le protocole aux patients et à leur famille. Ce temps médical doit désormais être mis en balance avec le cout des poches de sérum physiologique et avec l’existence de risque de pénurie lié au faible nombre de producteurs.
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Citer cet article: Pourquoi et comment l’ouragan Maria a-t-il changé la prise en charge des déshydratations aux Etats-Unis ? - Medscape - 26 avr 2018.
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