Visites à domicile : que penser des nouveaux services « d’Uber médecine » comme Docadom ?

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

2 mai 2018

Paris, France – Alors que les besoins de visites à domicile risquent d’être exponentiels avec le vieillissement de la population et que les médecins généralistes sont déjà largement débordés, la question de la délégation des tâches se pose et notamment celle de la place à réserver aux organismes proposant des visites à domicile comme Docadom, Medadom qui se développent en dehors des circuits organisés, dans les pas l’application Heal aux Etats-Unis (voir Après les Uber taxis, les «Uber médecins» aux Etats-Unis).

Lors d’une session dédiée à la visite à domicile en 2018 organisée au dernier congrès de Médecine Générale France , le Dr Marc Postel-Vinay, directeur général délégué de Docadom, a pris la parole au moment des questions-réponses.

Docadom est un nouveau service numérique qui propose des consultations à domicile via une plateforme web-responsive de mise en relation médecins-patients. Grâce à un algorithme, les patients et les médecins sont géolocalisés en temps réel, à la manière d’un service Uber.

 

Le jeune généraliste-entrepreneur a interpellé ses collègues sur le fait que les médecins thésés non installés pourraient, selon lui, être une solution pour décharger les médecins traitants installés d’une partie des visites à domicile « à la manière de SOS médecin ».

Une idée largement rejetée par les intervenants.

« Accoler un prestataire de Docadom à un médecin traitant installé en cabinet ne me semble pas pertinent. Le système SOS médecin n’est pas comparable. Il a un cahier des charge inscrit dans la loi, des logiciels métiers, il répond à la traçabilité, il peut donner les motifs d’appel, les diagnostics, ce que Docadom ne fait pas. Enfin, il transmet des données épidémiologiques à Santé Publique France. On ne parle absolument pas de la même chose quand on parle d’applications métiers qui sont une mise en relation d’un patient par un clic avec un médecin par un autre clic », a répondu le Dr Pierre-Henry Juan, Président de SOS Médecins France.

Pour sa part le Pr Serge Gilberg (médecin généraliste, Paris, CNGE, CMG), modérateur de la session, a alerté sur le risque que les remplaçants soient moins expérimentés, qu’ils aient une moins bonne capacité à évaluer la problématique médicale chez des gens qu’ils ne connaissent pas, ou à évaluer la prise de risque à laisser ou non les patients à la maison.

 
Ce type d’offre commerciale va à l’encontre des besoins de santé publique  Pr Serge Gilberg
 

« Il faut qu’il y ait une offre complémentaire avec des médecins formés à l’urgence, équipés, requis par le SAMU, mais laisser se balader des remplaçants qui répondent à une offre qui a été créée pour des raisons commerciales, je pense que c’est dangereux. A un moment où la démographie médicale est telle qu’il faut encourager l’installation, renforcer les effectifs dans les déserts médicaux, développer les maisons de santé, ce type d’offre commerciale va à l’encontre des besoins de santé publique », a-t-il précisé.

« Le marché de la santé n’est pas un marché comme les autres », a conclu le troisième orateur de la session, le Dr Gilles Urbejtel (Mantes-la-Ville, MG France) sous les applaudissements de la salle.

 
Le marché de la santé n’est pas un marché comme les autres  Dr Gilles Urbejtel
 

Visites à domicile : quelques chiffres

Lors de la session, le Dr Serge Gilbert (médecin généraliste à Paris) a présenté les données de la CNAMTS 2016 sur les visites à domicile.

Globalement, sur les 253 742 544 consultations effectuées en 2016, 24 399 685 ont été réalisées à domicile, soit 8,9 % de l’ensemble des consultations, un chiffre en forte décroissance depuis les années 80 (35% en 1980, 25 % en 2000, 12 % en 2010).

Par qui ?

Les données montrent que 96 % des médecins généralistes font des visites à domicile quel que soit leur âge et que 65 % des médecins font plus de 150 visites par an. En tout, environ 10 % des visites à domicile sont réalisées par SOS médecin.

Où et pour qui ?

Il existe des disparités régionales sur le taux de visites à domicile, en raison de spécificités loco-régionales, mais surtout liées à la faible densité médicale et au vieillissement de la population dans certaines zones.

Concernant, les patients, les trois-quarts des visites ont été réalisées chez les plus de 70 ans (57 % avaient plus de 80 ans) qui représentent 30 % de la population. Le nombre de visites pour des patients en ALD était de 16 420 000.

 

 

 

 

 

 

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