Méta-analyse CHAMPION: pas de sur-risque de thrombopénie avec le cangrelor

Vincent Richeux

Auteurs et déclarations

20 avril 2018

Washington, Etats-Unis Selon une nouvelle méta-analyse des données des essais CHAMPION, il n’y a pas plus de trombopénie ou de complications associées sous traitement par l’antiagragant injectable cangrelor (Kengrexal®, Chiesi) lors d’une angioplastie, que sous traitement standard par clopidogrel. Cet anticoagulant peut être envisagé en alternative aux anti-GPIIb/IIIa.

Le cangrelor est un nouveau antiagrégant plaquettaire injectable. Il a obtenu une AMM en 2016 pour le traitement préventif, en associant avec l’aspirine, des complications thrombotiques lors d’une angioplastie coronaire percutanée. Il est strictement réservé aux patients opérés en urgence ne pouvant pas recevoir d’antiplaquettaire par voie orale.

Cet anticoagulant est un antagoniste des récepteurs P2Y12, dont l’action est quasi-immédiate et rapidement réversible (demi-vie de 3 à 5 minutes), ce qui l’oppose aux antagonistes oraux comme le clopidogrel (demi-vie de plusieurs heures), le prasugrel ou le ticagrelor. D’où son indication en traitement d’urgence et peri-opératoire.

Pour rappel, le cangrelor ne s’est pas avéré supérieur au clopidogrel dans les deux premiers essais cliniques CHAMPION-PCI et CHAMPION PLATEFORM, avant que le troisième essai CHAMPION PHOENIX ne vienne affirmer le contraire. Une contradiction qui a contribué a généré quelques réserves quant à la pertinence de ce bénéfice.

Risque accru de thrombopénie sous anti-GPIIb/IIIa

La méthodologie des deux premiers essais a fait l’objet de nombreuses critiques et une méta-analyse des trois essais CHAMPION s’est depuis révélée positive. Celle-ci a, en effet, montré que le cangrelor permet de limiter les complications thrombotiques post-angioplastie, avec notamment une baisse de plus de 40% du risque de thrombose de stent, sans augmentation préoccupante des saignements.

Toutefois, en raison de ces données contradictoires et d’un bénéfice jugé modeste, la commission de la transparence de la Haute autorité de santé (HAS) considère que le cangrelor n’a « pas d’avantage clinique démontré par rapport au clopidogrel » et est à envisager comme alternative au traitement oral dans une situation d’urgence.

En ce qui concerne la tolérance, cette nouvelle méta-analyse des données des essais CHAM-PION se veut rassurante sur un éventuel sur-risque de thrombopénie. Dans cette étude, le Dr Matthew Price et coll. (Scripps Mémorial Hospital, La Jolla, Etats-Unis) ont cherché plus précisément à déterminer les répercussions des anticoagulants sur le risque de thrombopénie et la morbidité associée.

L’analyse a colligé les données individuelles de près de 25 000 patients, soit la totalité des pa-tients inclus dans les trois essais CHAMPION comparant le cangrelor au clopidogrel dans la prévention du risque de thrombose pendant et après angioplastie. Parmi eux, 13% étaient éga-lement anti-GPIIb/IIIa, majoritairement de l’eptifibatide.

Pas plus d’hémorragie après thrombopénie

La thrombopénie, définie par un taux de plaquettes < 100 000 ou réduit de plus de la moitié après intervention, a été observée chez 0,8% des patients (n=200), sans différence significative entre ceux sous cangrelor et ceux sous clopidogrel. En revanche, le traitement par antagoniste de glycoprotéine IIb/IIIa est associé à un risque de thrombopénie trois fois plus élevé.

L’utilisation d’anti-GPIIb/IIIa apparait comme le facteur de risque majeur de thrombopénie dans les essais CHAMPION, soulignent les auteurs. Un âge élevé, un infarctus du myocarde, un antécédent de pontage ponto-coronarien ou un diabète de type 1 prédisposent également à un risque accru.

Après ajustement, l’étude montre que la survenue d’une thrombopénie est associée à une augmentation significative du risque d’évévement cardiovasculaire survenant dans les 48 heures après l’intervention (odd ratio = 3,3, IC à 95%, [1.89–4.69]) et à une hausse majeure du risque hémorragique (odd ratio= 14,7, IC à 95%, [5.96–36.30]).

Elle montre également que le traitement par cangrelor n’a pas d’effet sur l’incidence de la thrombopénie, que les patients soient sous anti-GPIIb/IIIa ou non. De même, il n’augmente pas les risques d’événement cardiovasculaire ou d’hémorragie associés à la thrombopénie et n’a pas d’influence sur le pronostic des patients concernés.

« Le cangrelor apparait donc comme une alternative à une stratégie parentérale par anti-GPIIb/IIIa pour renforcer une inhibition de l’agrégation plaquettaire chez les patients bénéficiant d’une angioplastie », estiment les auteurs. Selon eux, le médicament peut être envisagé sans tenir compte des facteurs de risque de thrombopénie.

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