L’hospitalisation privée est-elle l'avenir des services d’urgence ?

Dr Isabelle Catala

Auteurs et déclarations

24 avril 2018

Paris, France-- Interrogé sur la situation des services d’urgences à l’occasion du premier anniversaire de son accession au pouvoir, le Président Emmanuel Macron a répondu « Cette situation est insoutenable ! La réponse à apporter, c'est une réponse de réorganisation de nos services, de nos hôpitaux, entre la médecine de ville et les hôpitaux pour éviter que tout le monde aille aux urgences ».

Lamine Gharbi, président de la Fédération de l’Hospitalisation Privée a immédiatement proposé dans un communiqué que les 124 services d’urgences privés qui, à ce jour, reçoivent chaque année 2,6 millions de patients s’inscrivent dans une meilleure répartition des malades entre les services publics et privés qui reçoivent les patients sans dépassement d’honoraires. Une solution qui parait attractive.

Le privé un modèle économique pertinent mais pas encore pérenne

Lamine Gharbi explique, « Il n’y a pas de fatalité à cet état de fait. Des solutions existent, et l’une d’entre elles est de solliciter l’ensemble des acteurs de santé, publics comme privés. Aujourd’hui, cette répartition équilibrée n’est pas à l’œuvre. Le Samu lui-même oriente quasi automatiquement les patients vers l’hôpital public, que ce soit pour les services d’urgences ou pour les admissions en soins intensifs, en prise en charge spécialisée ou en réanimation, sans prendre en considération les situations de tension. 

Un adressage mieux réparti des patients en amont par les services chargés de la régulation médicale, et une coordination plus fluide des acteurs en aval avec la médecine de ville, améliorerait, à n’en pas douter, l’existant.

 
Des solutions existent, et l’une d’entre elles est de solliciter l’ensemble des acteurs de santé, publics comme privés.
 

Il faut aussi structurer différemment notre offre de soins, en développant des lieux de soins de premier recours pour désengorger les urgences, mailler le territoire, rassurer les citoyens face au ressenti de désert médical. Dotés de plateaux techniques suffisamment robustes pour répondre aux besoins des patients, adossés le cas échéant à un établissement de santé, ces lieux – qui répondent aussi à l’aspiration des professionnels à un exercice regroupé – n’ont qu’un défaut : il leur manque aujourd’hui un modèle économique pertinent, simple et pérenne pour s’inscrire pleinement dans notre paysage de santé. » 

Où vont les vieux et les pauvres ?

Mais les urgentistes du système public mettent en avant des failles dans cet élan de bienveillance. D’une part, même en l’absence de dépassement d’honoraires, les personnes sans droits sociaux ne sont pas acceptées dans les services d’urgences privées. D’autre part, les patients gériatriques qui constituent le gros des « patients brancards » (ceux qui passent la nuit aux urgences en attendant une place, voir l’article Après 8h passées aux urgences, 12 % des plus âgés deviennent confus) ne pourront pas être hospitalisés dans le secteur privé où les lits de gériatrie aiguë sont rares. Enfin, la question des honoraires de secteur 1 pose problème puisqu’ils ne sont obligatoires que dans les services d’urgences. Tous les autres examens ou toutes les consultations de spécialistes pourront être facturés au prix fort.

Ceux qui ne pourront pas payer continueront de fréquenter – comme aujourd’hui – les urgences des hôpitaux publics.

 

 

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