Laval, Québec, Canada -- Alors que les couloirs des urgences des hôpitaux français restent encombrés de « patients brancards » âgés – voire très âgés – une étude canadienne publiée dans BMJ Open confirme, une fois de plus, que cette prise en charge est délétère. Dans le travail publié par l’équipe du Pr Marcel Edmond (Université de Laval, Québec, Canada), 12% des personnes âgées autonomes ou semi-autonomes présentent un épisode de confusion aux urgences ou en service lorsqu’ils ont patienté plus de 8 h sur un brancard. Du fait de ces troubles neurologiques, la durée de séjour est en moyenne allongée de 4 jours. Pour le Dr Emond, « c’est parce que ces personnes peuvent être dangereuses pour elles-mêmes ou pour les autres que leur durée d’hospitalisation a été prolongée ».
Confusion chez 8 à 20 % des patients
L’équipe canadienne a inclus des patients de plus de 65 ans (moyenne 76,8 ans, et 17,7 % de plus de 85 ans) se présentant aux urgences pour un problème aigu. Il s’agissait majoritairement de pathologies médicales : pulmonaires, cardiaques, gastro-entérologiques ou neurologiques.
Les auteurs se sont intéressés à l’incidence des épisodes confusionnels dans les suites de l’admission et selon le temps passé dans le couloir des urgences. Au total 41 des 338 patients qui avaient patienté plus de 8 h avant l’attribution d’un lit ont présenté une confusion. Selon les lieux étudiés, ces chiffres allaient de 8 à 20 %. Seuls 14 des 41 personnes ont débuté leur atteinte aux urgences, pour les autres, le délai moyen avant la désorientation était de 45,2 h.
Perte de repères
L’incidence des troubles n’était pas influencée par la pathologie sous-jacente, pas plus que par les examens réalisés. D’après l’analyse des conditions de prise en charge aux urgence, il semblerait que 60 à 80 % des personnes aient pu avoir accès à une hydratation per os puisqu’ils disposaient de verres d’eau à proximité. Mais le fait d’être cloué sur le brancard, de ne pouvoir déambuler et de perdre les repères spatiaux temporaux semble avoir influé sur le devenir neurologique.
Si les patients ont été hospitalisés moyenne pendant 8,7 jours, ceux qui étaient confus sont restés dans les services pendant 13,1 jours, soit 4 jours de plus.
Des urgences gériatriques
Au Canada, 18 % de la population est actuellement âgé de plus de 65 ans, mais ce chiffre va doubler dans les 15 ans qui viennent. C’est pour cette raison que le Dr Edmond tente de proposer des pistes pour réduire les épisodes confusionnels des personnes âgées et les coûts associés à ces pathologies.
Avant tout, il propose de mettre en place des mesures de sensibilisation des infirmières d’accueil afin de focaliser leur attention sur les 25 % des entrants aux urgences à risque de décompensation confusionnelle. Ensuite, il propose d’adapter les services d’urgences en faisant garder des repères spatio-temporaux (horloges, obscurité la nuit).
L’accompagnement par une personne de la famille est aussi une solution envisagée, d’autant que cette personne peut aider le patient à se mouvoir voire à déambuler s’il le souhaite. Enfin – et c’est une question qui se pose aussi en France – il imagine des circuits d’urgence dédiés aux personnes âgées en collaboration avec les services de gériatrie aiguë et les services de soins de suite.
Après les urgences pédiatriques, verra-t-on bientôt l’émergence d’urgences gériatriques ? Ce secteur pourrait intéresser les groupes d’établissements d’hébergement pour personnes âgées.
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Citer cet article: Personnes âgées : une étude établit un lien entre attente aux urgences et épisode de confusion - Medscape - 17 avr 2018.
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