Saint Denis, Saint Maurice, France – La HAS et l’ANSM ont réalisé une vaste étude comparant les risques ischémiques et hémorragiques des stents actifs d’un côté et des stents nus/non-actifs de l’autre[1], dans le cadre de la réévaluation des conditions de remboursement des stents coronaires.
Il en ressort que « l’étude n’apporte pas d’arguments en faveur de différences de complications ischémiques et hémorragiques avec une gamme de stent actif plutôt qu’une autre, y compris chez les patients à risque hémorragique et/ou thrombotique à un an de suivi », indiquent la HAS et l’ANSM. De même, « il n’y a pas de différence entre la gamme des stents nus et les gammes de stents non actifs remboursés en France ».
Pour les deux institutions, cette étude « en vie réelle » vient compléter les données issues des essais cliniques et des registres.
« Les données cliniques dans le domaine du dispositif médical quand on en dispose, portent souvent sur des populations sélectionnées d’effectifs faibles et ne permettent pas de disposer d’un recul suffisant en raison d’une évolution rapide des technologies », indique le rapport d’étude.
La HAS et l’ANSM précisent également que « malgré des différences structurelles entre les gammes de stents, les recommandations européennes ne prennent pas parti en faveur d’une gamme plutôt qu’une autre […]. Par ailleurs, elles ne font pas état de la catégorie des stents non actifs également remboursés en France. Les seules données cliniques comparatives disponibles, issues d’essais randomisés concernent les stents actifs et concluent à la non-infériorité entre gammes dans des populations sélectionnées à faible risque hémorragique et thrombotique [2,3,4,5,6,7,8,9]. Les données observationnelles menées en Amérique du Nord, en Asie et en Europe, quant à elles, ne fournissent pas de comparaisons entre les gammes les plus utilisées à l’heure actuelle, que ce soit pour les stents actifs ou pour les stents nus/non actifs [10,11,12,13,14,15] ».
Une photographie des stents posés en France en 2014
En pratique, l’étude française a porté sur 71 918 sujets adultes affiliés au Régime général de l’Assurance maladie ayant bénéficié de l’implantation d’un stent en 2014 (données du SNIIRAM). Au total, les trois quarts étaient porteurs de stents actifs et un quart de stents non actifs/nus.
Aujourd’hui, « les derniers chiffres de 2017 montrent qu’en France la part d’implantation de stents nus fond comme neige au soleil puisqu’il est maintenant inférieur à 10% », a précisé le Pr Didier Carrié (Service de Cardiologie B, CHU Rangueil, Toulouse) à Medscape édition française.
Sur les données de 2014, 52 891 individus étaient porteurs de stents actifs (74 %), dont :
-34,4 % dans le groupe XIENCE (chrome-cobalt à élution d’éverolimus avec polymère non résorbable),
-27,6 % dans le groupe PROMUS (en platine-chrome à élution d’éverolimus avec polymère non résorbable),
-24 % dans le groupe RESOLUTE (en chrome-cobalt à élution de zotarolimus avec polymère non résorbable),
-5% dans le groupe NOBORI (en acier inoxydable à élution de biolimus avec polymère résorbable),
-8% dans le groupe BIOMATRIX (en acier inoxydable à élution de biolimus avec polymère résorbable),
-1 % dans le groupe ORSIRO (en chrome-cobalt à élution de sirolimus avec polymère résorbable).
19 027 étaient porteurs de stents nus/non actifs (26 %), dont :
-55,1 % dans le groupe nus (plate-forme métallique seule en chrome-cobalt, platine-chrome ou nickel-titane),
-20,1% dans le groupe TITAN (en acier inoxydable avec un enrobage d’oxynitrure de titane),
-24,8 % dans le groupe ENERGY (en chrome-cobalt avec un enrobage de carbure de silicium).
Les sujets ont été suivis en moyenne 353 jours dans le groupe « stents actifs » et 334 jours dans le groupe « nus/non actifs ».
Les caractéristiques sociodémographiques, médicales ou celles liées au séjour d’inclusion (présentation clinique, durée de séjour, nombre de vaisseaux traités…) ne différaient pas entre les gammes. Des différences étaient observées selon le secteur et le volume d’activité des établissements implanteurs.
Principaux résultats
Le critère de jugement principal de l’étude associait évènements ischémiques (regroupant nouvelle revascularisation, nouveau syndrome coronaire aigu SCA, arrêt cardiaque, choc cardiogénique et/ou accident vasculaire AVC ischémique), évènements hémorragiques nécessitant hospitalisation (comprenant notamment les hémorragies intracrâniennes, gastro-intestinales, le choc hypovolémique, l’hémopéricarde, l’hémothorax) et/ou décès toutes causes.
Le risque du critère principal composite était de l’ordre de 19 pour 100 Personnes-Années (PA) chez les porteurs de stents actifs, et de l’ordre de 34 pour 100 PA chez les porteurs de stents nus/non actifs.
Après ajustement sur les caractéristiques à l’inclusion et prise en compte de l’effet centre, les risques n’étaient pas significativement différents entre les gammes.
-chez les porteurs de stents actifs (voir ci-dessous) versus les porteurs de la gamme XIENCE (gamme de référence) :
PROMUS : 0,99 [0,93-1,05],
RESOLUTE : 1,04 [0,98-1,10],
NOBORI : 0,92 [0,83-1,03],
BIOMATRIX : 0,97 [0,89-1,05],
ORSIRO : 0,85 [0,68-1,07]
-chez les porteurs de stents nus/non actifs vs les porteurs de stents nus :
TITAN : 0,97 [0,89-1,04],
ENERGY : 1,03 [0,96-1,11].
Ces résultats étaient retrouvés dans les analyses en sous-groupes en fonction des caractéristiques lésionnelles et du risque hémorragique ou thrombotique, notamment.
Pour les autres critères de jugement de l’étude, les risques étaient les suivants:
-Pour les événements ischémiques et/ou décès toutes causes : de l’ordre de 16 pour 100 PA ;
-Pour les événements ischémiques et/ou hémorragiques : de l’ordre de 16 pour 100 PA ;
-Pour les évènements ischémiques : 12 pour 100 PA ;
- Pour les évènements hémorragiques : de l’ordre de 4 pour 100 PA;
- Pour les décès toutes causes : 4 pour 100 PA.
Là encore, après ajustement et prise en compte de l’effet centre, les résultats concernant ces critères secondaires étaient comparables entre les gammes de stent.
Au final, l’ensemble de ces données fournissent des informations sur la sécurité d’emploi des stents et d’autre part, alimentent la réévaluation des conditions de remboursements des stents coronaires menée par la HAS.
Le Pr Carrié a rappelé que depuis plus de 5 ans, la baisse de remboursement était constante chaque année. Il a précisé « qu’en France, les stents actifs avaient tendance à avoir un prix unitaire aux alentours de 600 euros avec peu de variabilité en fonction des firmes mais qu’au niveau européen, le prix unitaire variait entre 200 et 1200 euros selon les pays ! ».
Le Pr Carrié est conseiller pour Abbott pour le stent Absorb, de Biotronik pour le stent biodégradable Magmaris, pour Boston Scientifique pour une technologie biodégradable. En termes de médicaments, il est dans le comité d’AstraZeneca pour l’organisation d’un congrès de cardiologie interventionnelle. |
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Citer cet article: Stents : une étude HAS/ANSM compare les risques hémorragiques et ischémiques - Medscape - 1er mars 2018.
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