4. Les limites de l’étude
Concernant la méthodologie de l’étude, le Pr Mouly explique que « les études de cohortes de ce type sont de plus en plus recherchées par les autorités réglementaires ». Il précise, cependant, qu’une limite à prendre en compte ici, est qu’il s’agit d’une étude ciblant une population danoise, avec des facteurs de risques et une alimentation forcément plus représentative de l’Europe du Nord (et éventuellement tout ou une partie de la Grande-Bretagne) que de l’Europe au sens large.
Il ajoute aussi que ce type d’analyse, comme le soulignent d’ailleurs les auteurs, ne prend pas en compte deux variables : le risque iatrogène et le coût.
« Cette étude ne prend pas en compte le rapport bénéfice-risque. Quel est le nombre de rhabdomyolyses, d’intolérances, le nombre de consultations aux urgences, d’interactions médicamenteuses ? Plus vous élargissez la prescription, plus vous exposez les malades à un risque iatrogène », souligne-t-il.
Concernant le coût, il pose la question : « plus de 40 % de patients sous statines, cela représenterait des millions de français. On peut se demander comment l’Assurance Maladie pourrait financer des statines, même génériquées, à tout ce monde ?
A ces limites s’en ajoutent d’autres, mentionnées par le Dr John Mancini (University of Columbia, Canada) dans un éditorial accompagnant l’article[4] : l’utilisation de différents critères d’évaluation CV dans les 5 recommandations, l’homogénéité ethnique de la population, la modélisation sur la baisse relative de cholestérol LDL (et pas absolue), le focus sur la monothérapie par statine, l’impossibilité de prendre en considération des mesures préventives pendant le suivi et l’absence d’autres méthodes d’examens alternatives (comme l’imagerie).
Au final, si le Pr Mouly reconnait la qualité méthodologique de l’étude danoise, il regrette que les auteurs n’aient pas suggéré de réaliser un essai pragmatique pour valider leurs résultats en comparant un traitement par statine de forte intensité vs un traitement par statine d’intensité modérée vs un placebo pour chacun des algorithmes utilisés dans les différentes recommandations. « C’est très compliqué à réaliser et pour cela, il faudrait que toutes les sociétés savantes travaillent de concert », précise-t-il.
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Citer cet article: Prévention CV primaire par statines : les recommandations européennes sont-elles plus «nulles» que les autres ? - Medscape - 2 févr 2018.
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