Paris, France -- Proposer d’apprécier simplement le pronostic des endocardites infectieuses est l’une des pistes pour individualiser leur traitement médical ou chirurgical et a pour corollaire d’en améliorer le pronostic. Cette approche a été développée par l’Association pour l’Etude et la Prévention de l’Endocardite Infectieuse à l’occasion des Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie (JESFC2018).
Une pathologie en pleine évolution
Les endocardites infectieuses sont des pathologies rares en France 2017, leur incidence annuelle s’établit de 3 à 9 par 100 000 habitants. Comme l’explique le Pr François Alla (CHU de Nancy), « le profil épidémiologique des endocardites a changé puisque les pathologies cardiaques rhumatismales sont en baisse. Les endocardites de novo représentent désormais 50 % des cas diagnostiqués et l’incidence des infections sur valve prothétique augmente régulièrement. Les patients sont de plus en plus âgés et, de ce fait, les comorbidités sont de plus en plus nombreuses. En 2017, staphylocoque aureus est devenu le premier germe retrouvé en France ».
Globalement, ces pathologies sont hétérogènes en termes d’étiologie, de présentation et d’évolution.
Le diagnostic est parfois délicat à établir (25 % de diagnostic retardé à plus d’un mois). Une coordination pluridisciplinaire est impérative puisque plus de la moitié des patients va être traité par chirurgie précoce (remplacement ou réparation valvulaire).
Des complications lourdes en cas de retard diagnostic
Comment adapter le traitement ? En prenant en compte le pronostic individualisé.
En France, un groupe de travail s’est penché sur le sujet : l’Association pour l’Etude et la Prévention de l’Endocardite Infectieuse (AEPEI) qui a mis en place pour 2018 un observatoire de l’endocardite infectieuse. La mortalité hospitalière s’établit à 21 % en France en 2008 (15 à 30 % selon les pays).
A 5 ans, 40 % des patients français décèdent. La plupart des décès sont en lien avec des complications puisque 77 % des personnes atteintes vont présenter des complications sévères : 34 % à 29 % d’insuffisance cardiaque, 20 à 25 % d’AVC, 25 % de complications rénales. En outre, cette pathologie influe très négativement sur la qualité de vie puisqu’elle peut être à l’origine de syndrome post-traumatique ou de dépressions.
Des facteurs de risques intrinsèques ou liés à l’agent causal
Parmi les facteurs pronostiques de mortalité hospitalière, certains sont bien connus : caractéristiques du patient (âge, existence d’un remplacement prothétique, diabète, comorbidités, fragilité, immunosuppression, maladie pulmonaire ou rénale), causes cardiaques sous jacentes, type de micro-organisme à l’origine de l’affection et circonstances d’infection (staphylocoque doré, champignon, non HACEK bacille gram négatif c’est à dire non hémophilus, actinobacille, cardiobacterium, eikenella, ou kingella).
Jouent aussi un rôle, l’évolution cardiaque et systémique (insuffisance cardiaque, insuffisance rénale, AVC ischémique ou hémorragique, choc septique) et certaines données d’échographie cardiaque (complications péri-annulaires, régurgitation importante dans les cavités gauches, éjection ventriculaire gauche ralentie, hypertension artérielle pulmonaire, végétations de grande taille, dysfonction prothétique valvulaire importante, fermeture prématurée de la valve mitrale et autres signes de pression diastolique élevée).
Anticorps anti-phospholipides
La persistance d’une bactériémie non contrôlée par l’antibiothérapie est, elle aussi, un facteur de risque indépendant de la mortalité hospitalière.
De nouveaux facteurs de risque émergent : l’existence d’anticorps anti-phospholipides qui s’associe à une majoration du risque d’embolies infectieuses par facilitation de l’activation des plaquettes et de la coagulation ; tout comme le génotype des micro-organismes en cause (en particulier certains gènes plasmidiques spécifiques qui majorent le risque d’embols infectieux) ; et les pathologies gériatriques associées.
Enfin, la réalisation d’une intervention chirurgicale est aussi un facteur pronostique puisque la chirurgie précoce diminue la mortalité.
Le score AEPEI pré-opératoire
Différents scores sont actuellement disponibles afin de référer au plus tôt à des centres spécialisés les patients qui doivent bénéficier d’une intervention chirurgicale.
Le premier score EUROSCORE II a été proposé en 2011 et il contenait 18 variables (âge, sexe, fonction rénale, AOMI, diabète…). Depuis cette date, chaque nouveau score inclut un nombre de moins en moins élevé de variables afin de faciliter l’utilisation : STS risk score for IE (12 variables), De Feo Score (6 variables), PALSUS score (7 variables), ENDOSCORE (9), Risk-E score (8) ; ANCLA score (6).
En 2017, des chirurgiens cardiaques français et italiens se sont associés pour proposer deux variantes d’un score très simplifié – AEPEI – qui prend en compte l’état préopératoire du patient (NYHA et état clinique), une mesure anthropométrique (IMC>27 kg/m2), un test de laboratoire (filtration glomérulaire inférieure à 50 mL/min) et une mesure de la pression intracardiaque (sPAP>55 mmHg).
Une version à 5 variables et une à 3 variables (filtration glomérulaire, classe NHYA et état clinique) sont utilisables afin d’évaluer l’intérêt d’une prise en charge chirurgicale.
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Citer cet article: Endocardite infectieuse : des scores simples pour guider le traitement - Medscape - 5 févr 2018.
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