Le blog du Pr Gilles Pialoux – Infectiologue
Comme chaque année, Santé Publique France (ex InVS) a livré les chiffres en rapport avec l’infection VIH le premier décembre à l’occasion de la Journée mondiale contre le Sida. Pour être très clair, ces chiffres ne sont pas bons. L’épidémie se poursuit à un niveau constant depuis 2013, date de déclaration obligatoire de la séropositivité VIH. La deuxième information est qu’on est toujours avec 6.000 nouveaux diagnostics par an même si ça fait moins de 4% d’incidence et parallèlement, on a une offre de dépistage du VIH qui est clairement insuffisante dans notre pays.
La France reste pourtant le leader des pays européens pour le nombre de dépistages mais on dépiste trop de séronégatifs. On est à 5,4 millions de tests réalisés sur les chiffres de 2016, soit plus 5% mais on dépiste 5 cas pour 1 million de tests. C’est insuffisant compte tenu de la nécessité de faire du dépistage à la fois en population générale, pour que chacun puisse bénéficier d’un test et, comme cela est recommandé par la HAS, dans les populations les plus touchées et le plus fréquemment possible (recommandations de 2017). Les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH), doivent bénéficier de 4 tests de dépistage par an, les usagers de drogues et les ressortissants de pays de forte endémie (essentiellement Afrique sub-saharienne). Ces deux groupes HSH et personnes originaire d’Afrique sub-saharienne sont les plus représentés sur ces 6000 nouveaux diagnostics.
Encore 27% de diagnostics tardifs
Il est important de noter que le système de déclaration du VIH en France inclut à la fois les nouvelles contaminations (données incidentes) mais aussi les diagnostics tardifs. Effectivement les diagnostics tardifs continuent de représenter 27% des nouveaux diagnostics c’est un taux très important et on n’arrive pas à les limiter. Il s’agit de personnes qui arrivent en consultation au stade Sida ou au stade d’immunodépression sévère avec des CD4 < 200/mm3.
Pourtant, on a des outils de diagnostic qui se sont multipliés : des TRODs (test rapide d’orientation diagnostique) faits dans un milieu communautaire ou par une infirmière. Plus de 53 000 TRODs ont été réalisés, ce chiffre est en légère régression. Et le nouvel outil en 2016 était l’autotest, autour de 75 000 autotests ont été vendus en 2016.
Le constat est néanmoins essentiellement négatif, en tous cas dans la capacité qu’a le système sanitaire français à banaliser les tests de dépistage, quitte à le coupler à d’autre dépistage puisque parallèlement à ces chiffres, on a les données alarmantes de l’augmentation des infections sexuellement transmissible (IST).
Pas d’impact de la PrEp …pour l’instant
On attendait une influence de la mise à disposition de la PrEP (prophylaxie pré-exposition) sur les nouvelles contaminations dans la communauté homosexuelle mais les HSH représentent toujours la population la plus contaminée, pour l’instant, on n'a aucun signal dans ce sens.
Donc un premier décembre 2017 en demi-teinte avec des objectifs très clairs : si l’on veut obtenir en France ce qui se passe à San Francisco, Vancouver, New York, Londres et Sidney, à savoir diminuer les contaminations grâce à la multiplication des outils de prévention et de dépistage, on a encore beaucoup de travail ! C’est l’objectif de l’ambitieux projet d’Ile de France « Paris sans Sida en 2030. »
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Citer cet article: Sida 2017 : les chiffres ne sont pas bons - Medscape - 15 déc 2017.
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