POINT DE VUE

L’actualité du congrès du Collège National des Cardiologues des Hôpitaux

Dr Loïc Belle, Dr Franck Albert

Auteurs et déclarations

4 décembre 2017

Enregistré le 24 novembre 2017, à Paris, France

Loïc Belle, président du CNCH, et Franck Albert, résument les points marquants du congrès 2017 : GHT, réforme de l’internat, télémédecine et actualité scientifique.

TRANSCRIPTION

Loïc Belle — Bonjour, je suis Loïc Belle, cardiologue à l’hôpital d’Annecy, président du Collège National des Cardiologues des Hôpitaux (CNCH) et je suis avec Franck Albert, cardiologue à l’hôpital de Chartres, vice-président du CNCH pour vous parler du congrès 2017 qui vient juste de se terminer.

Franck Albert — Bonjour. Ce 32e congrès a été très riche en événements. Il a permis de réunir plus de 320 cardiologues hospitaliers ; on a eu également la présence du président du Collège des Cardiologues Libéraux, le docteur Jacques Gauthier, pour évoquer en deux jours plusieurs thématiques, l’une organisationnelle, et l’une scientifique. Alors, si on commence par notre marque de fabrique, qui est la vie des services, on a beaucoup parlé de GHT [groupes hospitaliers de territoires]. Qu’en est-il ?

Actualité des groupes hospitaliers de territoires (GHT)

Loïc Belle — Oui, c’est l’actualité. 134 GHT ont été créés dans l’optique d’imaginer, de filiariser les différents soins. Chaque GHT est rentré dans son développement autour d’un établissement pivot — le CHU est le plus souvent l’établissement pivot, mais parfois c’est un CH. Et ce CH, au sein de sa GHT doit être fort, le plus souvent parce que les hôpitaux autour, qui sont les plus petits, sont déserts maintenant en matière de cardiologie et c’est pour cela que nous soutenons l’action de l’hôpital de Chalon, hôpital pivot de sa GHT. Tout tourne autour des PMP, les « Projets Médicaux Partagés », ces fameux projets où on met le projet médical en avant et l’organisation ensuite, centrée sur l’activité médicale. Sur les 134 GHT, 53 PMP de cardiologie ont déjà été écrits. On a aussi parlé réforme de l’internat…

La réforme de l’internat

Franck Albert — Oui. On a eu le professeur Isnard qui est le président du Collège National des Enseignants en Cardiologie. Cette réforme inquiète nos collègues, puisque, globalement, en 2017, on a perdu une trentaine de DES au niveau national : on est passé de 214 à 174. C’est essentiellement lié à la création de nouvelles spécialités, comme un DES de médecine d’urgence, un DES de gériatrie, un DES de médecine vasculaire, qui ont donc « pompé » un peu sur les spécialités qui existaient déjà avant au détriment de notre spécialité. Donc cette réforme de l’internat va se faire en trois phases : une phase 1, qui est une phase socle, qui va durer un an ; une deuxième phase qui va durer deux ans, qu’on va appeler une phase d’approfondissement — et deux mois avant la fin du sixième semestre, l’étudiant devra choisir éventuellement une surspécialité ; et puis une phase trois qui durera un ou deux ans, qui va être une phase de consolidation. L’étudiant devra choisir une surspécialité, s’il le veut, qui sera donc la cardiologie interventionnelle, la rythmologie interventionnelle ou l’imagerie non invasive. Il fera donc un an de plus. Globalement la réforme de l’internat, ça va durer 4 ou 5 ans — tout n’est pas encore tout à fait bouclé. Il y a un espoir, peut-être, pour passer à 5 ans pour tout le monde, plus une année ensuite pour les surspécialités. Donc cela inquiète — les postes d’assistants ne devraient rester. Et à ce titre, Loïc, peut-on parler de démographie médicale ?

Démographie et déserts médicaux

Loïc Belle — La démographie est aussi à l’ordre du jour, car moins de médecins formés pour plus de travail et plus de postes, ça fait 30 % de postes qui ne sont pas pourvus et 30 % des postes pourvus qui le sont par des médecins étrangers. Donc, bien naturellement, la nature ayant horreur du vide et devant faire notre travail, nous devons faire appel aux médecins étrangers qui viennent dans nos hôpitaux pour y travailler. On doit, nous, hôpitaux, prendre en charge notre destin et travailler sur les façons de pouvoir attirer les plus jeunes dans nos carrières hospitalières et c’est ce qui fera, d’ailleurs, le sujet de notre Université d’été au mois de juin à Annecy. On a aussi parlé télémédecine…

La télémédecine

Franck Albert — Oui – à propos de déserts médicaux, on peut évoquer la télémédecine dont on parle beaucoup sur le plan national. En fait, il y a trois possibilités : il va y avoir la téléconsultation grâce à des outils comme des webcams ou des cabines où on pourra mettre le patient. Là on fait une consultation à distance, mais avec la problématique de moyens humains — il faudra effectivement des cardiologues pour gérer ces problèmes-là ; la deuxième possibilité, c’est la téléexpertise, qui est probablement plus facile pour nous, qui permet de répondre par une messagerie sécurisée à un généraliste ou à un correspondant de tel ou tel patient et de donner rapidement un avis sans que le patient ait besoin de se déplacer, ce qui peut rendre service ; et enfin, la dernière solution, c’est la télésurveillance avec l’accompagnement thérapeutique, qui est un outil dont Patrick Jourdain est venu nous parler, avec l’arrivée de plateformes connectées qui vont permettre à des infirmières-éducatrices de santé de suivre nos patients chroniques, notamment dans l’insuffisance cardiaque chronique et dans la surveillance des défibrillateurs. Donc, c’est un outil qu’on attendait beaucoup et il va y en avoir rapidement… le décret vient de passer pour le remboursement avec un forfait qui sera de 110 € par patient par semestre, de 60 € par patient par semestre pour l’accompagnement thérapeutique, et l’industriel qui met à disposition la plateforme connectée se fera aussi payer de l’ordre de 300 € par semestre par patient. Donc ce sont des choses qu’on peut mettre en place dès maintenant avec une lettre de candidature, à faire à la DGOS dans le cas des GHT pour pouvoir nous aider et essayer de diminuer les réhospitalisations en insuffisance cardiaque chronique et de faire finalement un tri un peu sélectif dans nos consultations. Les patients qui vont bien et qu’on voit parfois n’auront plus besoin de venir et on verra vraiment les patients qui sont instables et qui risquent d’être réhospitalisés — puisque souvent les signes d’alerte sont dans les cinq jours avant l’hospitalisation — et on pourra les démasquer, peut-être pour modifier le traitement avant qu’ils soient réhospitalisés. À ce titre, on a beaucoup parlé d’organisation — peux-tu évoquer la médecine ? Parce qu’on a aussi parlé beaucoup de médecine dans cette session… Quels sont, pour toi, les points forts ?

Actualité scientifique

Loïc Belle — Oui, on a aussi fait de la médecine. Il a été question de lipides : après une hospitalisation pour un syndrome coronarien aigu, les patients doivent sortir avec une haute dose de statines et cela n’est pas fait dans 30 % des cas — on essaie de travailler à améliorer ce score. Ensuite, à deux à trois mois, on sait que les patients — et ce sont nos recommandations — doivent avoir une cible inférieure à 0,7 en termes de LDL cholestérol. Eh bien, cela n’était que dans 50 % des cas et, là aussi, la réflexion a été autour de trouver des solutions pour améliorer le fait qu’on n’ait pas peur d’un LDL bas. Il n’y a pas de courbe en J : le plus bas est le meilleur et il faut utiliser toutes les stratégies pour essayer d’y parvenir.

Il a été question aussi d’insuffisance cardiaque et surtout de travailler la sortie du patient hospitalisé pour une poussée d’insuffisance cardiaque. C’est un moment stratégique où le patient est livré, ensuite, à la médecine ambulatoire — c’est un patient qui dans 37 % des cas, ne retournera pas voir son cardiologue dans l’année qui suit et donc il s’agit d’essayer de mieux travailler avec une « checklist », avec une reconvocation en hôpital de jour de ce patient, avec peut-être la télémédecine que tu as évoquée tout à l’heure. En tout cas, prendre le temps de soigner cette sortie, car on sait que dans 30 % des cas le patient va revenir dans les six mois.

Ensuite, il a été question d’observance. On sait que lorsqu’on délivre une ordonnance à un patient — les statistiques et les études observationnelles nous l’ont montré — 30 % des patients ne vont pas chercher leur boîte de médicaments. Et pour ceux qui vont la chercher, 30 % ne vont pas les prendre. Il a donc été question de trouver des stratégies pour essayer d’améliorer cette observance. Le bénéfice d’une thérapeutique ne vaut que si elle est suivie et on ne peut pas améliorer l’état de santé d’une population si on n’améliore pas aussi l’observance des patients aux traitements et aux attitudes.

Tu vois, ce congrès a été extrêmement riche — en deux jours beaucoup de sujets ont été balayés et je pense que lorsque les collègues vont retourner dans leurs unités, ils vont mettre en place des stratégies, ils vont développer des actions qui seront peut-être issues de ces réflexions de ces deux jours de congrès. Merci beaucoup, Franck.

Franck Albert — Merci, Monsieur le Président, et à très bientôt.

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