Une heure d’activité physique par semaine a déjà un effet antidépresseur

Vincent Bargoin, avec Pam Harrison

17 octobre 2017

Londres, Royaume-Uni  — La relation inverse entre activité physique et dépression semble se confirmer.

En 2013, une revue Cochrane avait conclu à un effet du sport équivalent à celui d’un traitement antidépresseur, tout en soulignant que l’analyse des données publiées présentait beaucoup de limites.

Il s’agit cette fois d’une cohorte prospective norvégienne, suivie en collaboration avec des britanniques, dite HUNT (Health Study of Nord-Trøndelag County). Les résultats, publiés dans l’American Journal of Psychiatry montrent qu’une faible quantité d’activité physique est déjà associée à une incidence significativement moindre de dépression [1].

« Après ajustements pour les facteurs confondants, et en supposant que la relation est causale, la part attribuable en population suggère que 12% des dépressions [observées dans la cohorte] auraient été évitées si tous les participants avaient pratiqué au moins une heure d’activité physique par semaine », écrivent les auteurs.

 
La part attribuable en population suggère que 12% des dépressions auraient été évitées si tous les participants avaient pratiqué au moins une heure d’activité physique par semaine Les auteurs
 

Effet protecteur dans les deux sexes, quel que soit l’âge

L’étude HUNT a commencé entre 1984 et 1986, avec le recrutement de résidents du comté norvégien de Nord-Trøndelag, âgés d’au moins 20 ans. Classiquement, ces participants ont rempli des questionnaires sur leur mode de vie et leurs antécédents médicaux, et subi un examen médical.

Les auteurs soulignent que ces questionnaires permettaient d’apprécier l’intensité de l’exercice physique, au travers de questions sur l’essoufflement et la transpiration. 

A ainsi été constitué une cohorte de près de 34 000 adultes, qui ne présentaient aucun symptômes des affections psychiatriques les plus fréquentes, et aucun handicap limitant leurs aptitudes physiques. Cette cohorte a été suivie prospectivement durant 11 ans.   

« Après ajustement pour différents facteurs confondants, les sujets ayant initialement rapporté ne faire aucun exercice, présentaient un risque de dépression accru de 44% par rapport aux sujets pratiquant 1 à 2 heures d’exercice par semaine », écrivent les auteurs.

Cet effet protecteur est observé dans les deux sexes, et pour un âge initial inférieur ou supérieur à 50 ans. Il existe par ailleurs une relation dose-effet inverse entre la quantité d’exercice rapportée initialement, et le risque ultérieur de dépression (p=0,001).

Enfin, au contraire de la dépression, l’anxiété apparait indépendante de l’activité physique.

 
Au contraire de la dépression, l’anxiété apparait indépendante de l’activité physique.
 

Rester modeste, c’est déjà être efficace

En pratique, l’enseignement peut-être le plus important, à transmettre aux patients, est que « la plus grande part de l’effet protecteur survient pour des durées d’activité assez faibles, et quelle que soit l’intensité ».

Ce que, dans Medscape International, le dernier auteur, le Pr Matthew Hotopf (Kings College, Londres), résume par : « prenez régulièrement un peu d’exercice, c’est plaisant et vous n’avez pas besoin de courir le marathon ».

 
La plus grande part de l’effet protecteur survient pour des durées d’activité assez faibles, et quelle que soit l’intensité.
 

Pour leur part, les auteurs soulignent dans la publication que « des changements relativement modestes dans la durée de l’activité physique hebdomadaire, à l’échelle d’une population, pourraient avoir des conséquences importantes en santé publique, sur le plan de la santé mentale, et baisser substantiellement l’incidence de la dépression ».

Effet antidépresseur du sport : quels médiateurs ?

On recherche bien sûr les médiateurs possibles de l’activité physique sur l’activité cérébrale.  

Les auteurs signalent que « le bénéfice social et corporel de l’activité physique explique une petite fraction de l’effet protecteur [vis-à-vis de la dépression] ». En termes de mécanisme, cependant, ils n’avancent pas d’hypothèse, se bornant à noter que « des mécanismes déjà proposés, comme la baisse du tonus parasympathique, ne semblent pas jouer de rôle dans la protection vis-à-vis de la dépression ».

Lors d’un exposé du Pr Fabrice Chrétien (Anatomie et cytologie pathologiques, Centre hospitalier Sainte-Anne, Paris) sur « Les effets neurobiologiques de l’activité physique », au congrès de l’Encéphale 2016, les molécules suivantes ont été citées : Brain-Derived Neurotrophic Factor (BDNF), le Vascular Endothelial Growth Factor (VEGF), l’Insulin-like Growth Factor 1 (IGF1), le cortisol,  ainsi que la phényléthylamine (amphétamine endogène) et la bêta-endorphine.

Sur le plan anatomique, l’exercice physique a par ailleurs été associé à une augmentation du volume de l'hippocampe, une augmentation du volume du cortex préfrontal, ainsi que du corps calleux.

 

 

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec le sujet.

 

 

 

 

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