Marseille, France -- Alors que l’industrie pharmaceutique et une grande partie des pharmaciens d’officine y sont opposés, une expérience de délivrance à l’unité de 14 antibiotiques différents menée par l’INSERM, le CNRS et l’IRD montre que non seulement cette approche est faisable, mais aussi qu’elle pourrait :
générer des économies de santé,
avoir un impact sur les résistances bactériennes (par le biais d’une moindre consommation et d’un moindre rejet dans l’environnement)
contribuer à une meilleure observance.
Les résultats de cette expérimentation menée dans 100 officines de 4 régions (Ile-de-France, Lorraine, Limousin, PACA) sont publiés dans Plos One[1].
14 antibiotiques, 100 pharmacies, 12 semaines
Entre novembre 2015 et novembre 2015, 100 pharmacies ont accepté de participé à une opération de délivrance de 14 antibiotiques à l’unité : amoxicilline-acide clavulanique, céfixime, céfopodoxime, céfotiam, ciprofloxacine, lévofloxacine, ofloxacine, loméfloxacine, péfloxacine, moxifloxacine, norfloxacine, énoxacine, fluméquine et thiamphénicol.
Trois sessions de 4 semaines consécutives ont été mises en place afin de réaliser un comparatif entre les 25 pharmacies témoins et les 75 autres qui procédaient à un reconditionnement des médicaments.
Au total, 907 patients ont accepté de participer à l’expérimentation (80,6 % des personnes éligibles), 278 autres ont servi de comparateurs.
Moins de doses, moins de gaspillage, moins d’automédication
L’étude mené auprès les pharmacies a montré que la quantité de médicaments prescrits ne correspond pas au conditionnement des boites, pourtant l’industrie pharmaceutique met en avant une adéquation de la posologie recommandée avec le packaging.
La dispensation à l’unité a permis de réduire de 9,9 % le nombre de doses délivrées (20 en moyenne contre 23 avec les boites pré-remplies).
Sur le nombre total de patients éligibles, 40 % ont accepté d’être contactés par téléphone à la suite du traitement : 17 % ont déclaré qu’habituellement ils conservaient les médicaments non utilisés et plus de la moitié d’entre eux ont précisé qu’ils y avaient recours en automédication par la suite.
Par ailleurs, 13 % des personnes interrogées ont expliqué qu’ils avaient l’habitude de jeter à la poubelle les médicaments non utilisés sans recourir au recyclage proposé dans les officines.
17% gardent les médicaments non consommés
50% y ont recours en automédication
13% jettent les médicaments à la poubelle
Une meilleure observance, une simplification
L’une des données les plus surprenantes de l’étude vient de l’observance des patients qui avaient bénéficié de la délivrance à l’unité : ils étaient 91,4 % à être allés au bout du traitement contre 65,6 % dans le bras contrôle. Cette donnée était fondée sur les déclarations des patients.
Elle pourrait s’expliquer pour les auteurs par différents facteurs : un temps plus long passé dans la pharmacie qui permet une meilleure information sur le traitement (« support psychologique »), une « simplification cognitive » liée à la matérialisation des comprimés restants avant la fin du traitement, l’implication thérapeutique plus importante de patients qui acceptent une expérimentation de ce type…
Une approche chronophage
Pour l’équipe du Dr Carole Treibich (Marseille), « la délivrance à l’unité pourrait permettre de limiter les risques d’antibiorésistance, limiter le coût, et éviter une dispersion environnementale des médicaments non utilisé ».
Reste que cette approche est chronophage et que les pharmaciens devraient percevoir une rémunération pour le reconditionnement si cette voie était choisie par les autorités sanitaires.
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Citer cet article: Antibiotiques à l’unité dans 100 pharmacies : essai gagnant sur tous les fronts - Medscape - 12 oct 2017.
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