Vancouver, Canada — On sait que l’activité physique peut aider à contrôler les migraines (quand elle ne les déclenche pas) [1]. Mais à quelle intensité ? Légère, modérée, intense ? C’est ce qu’ont voulu préciser des chercheurs suisse en comparant l’effet d’un programme d’exercice physique intensif versus modéré chez des patients migraineux.
Leur petite étude, présentée sous forme de poster lors du congrès annuel de l’International Headache Society (IHS) [2], confirme, d’une part, que des séances d’aérobic deux fois par semaine préviennent plusieurs crises de migraine mensuelles. Mais, elle montre, également, que pour le même nombre de séances d’aérobic hebdomadaires, les plus intensives sur le plan physique sont plus bénéfiques que celles d’intensité modérée.
12 semaines d’activité physique
« Les exercices d’aérobic supervisés devraient être considérés comme une stratégie complémentaire en prévention et en traitement des migraines », a indiqué l’auteur principal de l’étude Alice Minghetti (Service Sport, Exercice et Santé, Université de Basel, Suisse) lors de sa présentation.
Pour évaluer l’efficacité de l’exercice sur la réduction de la fréquence des migraines, les chercheurs ont randomisé 24 migraineux entre :
- un programme de 12 semaines d’activité physique intensive (EI, n=8) ;
- un programme de 12 semaines d’activité physique d’intensité modérée (EM, n=8) ;
- un groupe contrôle sans pratique d’une activité physique (C, n=8).
Les groupes EI et EM ont participé à des séances d’aérobic deux fois par semaine.
Le programme d’activité physique intensive était découpé en 4 séquences, chacune comprenant 4 minutes de course à 95 % de la fréquence cardiaque maximale suivies de 3 minutes à 75 % de la fréquence cardiaque maximale pour un total de 28 minutes par séance.
Le programme d’activité physique d’intensité modérée consistait à courir 45 minutes à une fréquence cardiaque maximale de 70 à 75 %.
Intense et modéré
Les deux programmes ont été conçus pour que les participants dépensent le même niveau d’énergie calorique.
Les participants, 20 femmes et 4 hommes avaient un âge moyen de 36,4 ± 11 ans et leur indice de masse corporelle moyen était de 22,9 ± 4 kg/m².
Pour évaluer l’impact des différents programmes, les chercheurs ont comparé le nombre de jours de migraine pendant les 4 dernières semaines des programmes versus le mois précédant le début des programmes (critère primaire d’efficacité).
Il en ressort que les patients qui ont été enrôlés dans le programme le plus intensif avaient moins de jours de migraine par mois.
Impact des différents programmes sur le nombre de jours de migraine/mois
Groupe d’exercice |
Pré-intervention (moyenne ± SD) |
Post-intervention (moyenne ± SD) |
Effet taille (différence moyenne standardisée) |
P |
Jours de migraine par mois |
||||
EI |
5,3 ± 3,0 |
1,1 ± 0,6 |
1,94 |
0,004 |
EM |
4,6 ± 2,3 |
3,6 ± 2,7 |
0,40 |
|
C |
3,6 ± 2,7 |
2,5 ± 2,2 |
0,45 |
Un effet positif sur la santé cérébrovasculaire
En parallèle, en photographiant les rétines, les chercheurs ont mesuré l’index AVR (Retinal Arterio-Venule-Ratio), reflet du niveau de sténose rétinienne artériolaire et plus largement de l’état de santé des vaisseaux.
« Ce que vous voulez, c’est observer des artères plus dilatées», a précisé le Dr Stephen Silberstein (Université Thomas Jefferson, Philadelphie, Pennsylvanie), modérateur de la présentation.
« Et nous avons exactement cet effet sur la dilatation des artères et la constriction des veinules dans le groupe du programme d’activité physique intense », explique Alice Minghetti. « Nous avons aussi observé cet effet dans le groupe qui avait suivi le programme d’intensité physique plus modéré mais pas aussi fortement, ce qui signifie que l’effet sur la circulation est un stimulus différent de celui lié à l’activité physique continue modérée », précise-t-elle.
Un effet médié par la forte consommation d’O2 après l’exercice intense ?
Les chercheurs attribuent les bénéfices de l’activité d’intensité élevée à un effet « afterburn », qui correspond à une forte consommation d’oxygène post-exercice pour compenser le déficit important au cours de l’effort intensif (EPOC).
Groupe d’exercice |
Pré-intervention (moyenne ± SD) |
Post-intervention (moyenne ± SD) |
Effet taille (différence moyenne standardisée) |
P |
VO2max [ml/min/kgMC] |
||||
EI |
36,5±5,3 |
42,6±9,4 |
0,8 |
0,30 |
EM |
36,7±6,1 |
38,4±7,6 |
0,25 |
|
C |
35,6±5,2 |
37,2±5,5 |
0,30 |
« Le programme d’activité physique intensive est sûr et a plus d’effet sur la réduction du nombre de crises de migraines, les indices de santé cérébrovasculaire et la consommation maximale d’oxygène que le programme d’activité physique d’intensité modéré », concluent les chercheurs.
Pour le Dr Silberstein, « il faut accorder beaucoup plus d’attention à la physiologie de l’exercice physique. Il s’agit d’une nouvelle très importante parce qu’il a été recommandé aux gens de pratiquer une activité physique modérée plusieurs fois par semaine alors que je pense que les études les plus récentes ont clairement montré que lorsqu’on y regarde de près, l’exercice intensif, même plus court, est meilleur sur le long terme ».
Pour le Dr Michel Dib (neurologue, hôpital de la Pitié Salpêtrière, Paris), interrogé par Medscape édition française, « ces résultats sont intéressants mais ils méritent confirmation et les recherches sur les mécanismes sous-jacents doivent être poursuivies ».
Ms Minghetti n’a pas de liens d’intérêt en rapport avec le sujet. Le Dr Silberstein est consultant pour Alder, Allergan, Autonomic Technologies, Avanir, Curelater Inc, Depomed, Dr Reddy's Laboratories, Ensured Inc, electroCore Medical LLC, eNeura Therapeutics, INSYS Therapeutics, Lilly USA LLC, Supernus Pharmaceuticals, Teva Pharmaceuticals, Theranica, and Trigemina Inc. |
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Citer cet article: Prévention de la migraine : mieux vaut une activité physique intensive que modérée - Medscape - 26 sept 2017.
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