Enregistré le 11 septembre 2017, à Madrid, Espagne
TRANSCRIPTION
Bonjour, je suis Caroline Robert et je dirige le service de dermato-oncologie à Gustave-Roussy.
Aujourd'hui, je vais vous parler de ce qui a été présenté à l'ESMO 2017, qui était riche en information dans le mélanome, et pas seulement dans le mélanome métastatique.
On avance, ou plutôt on recule maintenant – cela dépend comment on voit les choses. C'est-à-dire qu'on va commencer à traiter les gens plus tôt dans leur maladie. On va aborder les patients qui ont, après chirurgie, un risque de récidive, c'est-à-dire les sujets qui ont eu un mélanome métastatique au niveau ganglionnaire régional, qui ont été opérés et qui sont traités en adjuvant – on n'a plus de métastases visibles au scanner, mais on a peur qu'il y ait des cellules qui se promènent encore quelque part, et donc on donne un traitement pour diminuer le risque de récidive, et bien sûr, on espère de diminuer le risque de décès. En session présidentielle, On a notamment entendu deux présentations très importantes qui vont nous faire beaucoup réfléchir et qui vont nous faire changer notre façon de traiter nos patients, très certainement.
Étude COMBI-AD : double thérapie dabrafénib + tramétinib
La première concerne les thérapies ciblées. Ici, on traite des patients qui ont un mélanome muté sur BRAF — vous savez que cela concerne à peu près 50 % des patients avec mélanome. Cette mutation qui active BRAF peut être ciblée par des traitements anti-BRAF — on sait qu'on est plus efficace quand on cible sur cette voie qu'on appelle la voie des MAP-kinases — non seulement BRAF, mais aussi MEK, juste en aval. On a le résultat de l'étude qui s'appelle COMBI-AD : une combinaison anti-BRAF + anti-MEK, c'est-à-dire le dabrafénib plus le tramétinib versus placebo chez des patients avec un mélanome au stade ganglionnaire opéré. On a maintenant près de trois ans de recul et une étude extrêmement positive avec un hazard ratio de 0,47, donc on diminue le risque de récidive de 53 %. On a même des résultats qui sont maintenant disponibles et même significatifs en termes de survie globale — c'est très important comme résultat, donc je n'ai pas beaucoup de doutes concernant l'utilisation prochaine pour nos patients de cette double thérapie.
L'immunothérapie : nivolumab versus ipilimumab
L'autre, très important, est un essai [CheckMate 238] qui a testé la deuxième stratégie qui marche très bien dans le mélanome et qui maintenant est donnée couramment dans d'autres cancers, c'est l'immunothérapie. Vous savez qu'ici on agit de façon indirecte – on va stimuler le système immunitaire pour qu'il aille détruire les cellules tumorales et donc les cellules qui pourraient rester pareilles après une chirurgie. Ici, les patients pouvaient être en stade 3, c'est-à-dire ganglionnaire, ou aussi en stade 4 avec résection complète des métastases visibles donc des patients oligométastatiques de stade 4. Et là aussi on a un essai positif, mais attention : ici, le design de l'essai était différent parce que le bras comparateur est un bras actif. On a nivolumab, anticorps anti-PD-1 versus ipilimumab, anticorps anti CTLA4, qui a déjà son AMM aux États-Unis (pas en Europe parce qu'il a déjà prouvé son efficacité dans ce contexte adjuvant par rapport à l'observation), sauf que c'est quand même un traitement qui est assez mal toléré, l'ipilimumab, et là, on a un hazard ratio de 0,65, on diminue le risque de récidive de 35 % par rapport à un traitement actif. Donc, là aussi c'est très important comme résultat et cela va très certainement changer nos pratiques.
Maintenant, on va se trouver avec des questions : chez un patient avec un mélanome muté BRAF en adjuvant, est-ce qu'on va donner plutôt une thérapie ciblée? est-ce qu'on va donner plutôt une immunothérapie? On a du travail, mais tant mieux.
Pembrolizumab dans le mélanome métastatique – durée des traitements
On a aussi parlé à l'ESMO des durées de traitement. Maintenant, je reviens au mélanome métastatique — on a finalement des résultats tellement bons que se pose la question, chez certains patients (les plus chanceux, ceux qui ont répondu complètement ou partiellement pendant longtemps) : est-ce qu'on peut arrêter le traitement? Eh bien, on commence à avoir des données parce que le suivi commence maintenant à être assez long. On a des essais, notamment la phase 1 de pembrolizumab [Keynote 001], où on avait 655 patients — c'est vraiment une grosse phase 1 —, on a presque quatre ans de recul et on sait que nos patients en réponse complète (il y en a 67 patients qui ont arrêté juste parce qu'ils étaient en réponse complète, ou qu'ils avaient envie d'arrêter), et ces patients-là, quand on les regarde maintenant avec un suivi de plus de trois ans, on voit que la grande majorité d'entre eux (plus de 90 %) sont encore en réponse complète, donc c'est très encourageant. Mais on a aussi les patients qui étaient en réponse partielle ou en stabilité après deux ans de traitement. On parle ici de la phase 3, pembrolizumab versus ipilimumab [Keynote-006]. Les patients qui ont arrêté après deux ans, comme le voulait le protocole (pareil, ici on a un recul qui est moins long, on n'a que dix mois de recul) mais la plupart des patients sont encore en réponse. Donc, se pose maintenant cette question formidable pour cette minorité de patients qui est en très bonne réponse, mais quand même, c'est une bonne nouvelle : est-ce qu'on peut arrêter? La conclusion est qu'on a vraiment besoin d'un essai randomisé d'arrêt de traitement. Donc, j'espère qu'on arrivera à faire cela pour répondre de façon scientifique à cette question qui nous permet de faire encore un énorme bond en avant dans le traitement du mélanome.
Medscape © 2017 WebMD, LLC
Les opinions exprimées dans cette vidéo n'engagent que leur(s) auteur(s) et ne reflètent pas nécessairement celles de WebMD ou Medscape
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Citer cet article: Mélanome: résultats très positifs présentés à ESMO 2017, selon C. Robert - Medscape - 15 sept 2017.
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