POINT DE VUE

Antibiotiques : des traitements plus courts

Pr Christian Perronne

Auteurs et déclarations

8 septembre 2017

Le blog du Pr Christian Perronne – Infectiologue

« A l’heure de la résistance bactérienne, les recommandations vont s’orienter de plus en plus vers des traitements antibiotiques plus courts », annonce le Pr Perronne.

Cette tendance tire notamment argument d’une étude sur les pneumonies communautaires hospitalisées, conduite en Espagne, et qui montre que l’on peut, dans la majorité des cas, raccourcir la durée de l’antibiothérapie (Uranga et coll ; JAMA Internal Medicine, 2016).

Ce résultat suscite «  un grand débat dans la communauté médicale », souligne le Pr Perronne.

Il s’agit d’une étude randomisée, menée chez plus de 300 malades atteints de pneumonie, pour lesquels les médecins de l’hôpital choisissaient l’antibiothérapie qu’ils estimaient la plus appropriée.

A J+5, les patients du groupe témoin ont poursuivi l’antibiothérapie, pour une durée une fois encore laissée à l’appréciation du clinicien. Les patients du groupe expérimental, eux, ont arrêté le traitement, à condition d’être apyrétiques depuis 48 heures, et de n’avoir pas plus d’un signe clinique d’instabilité : hypotension, tachycardie, tachypnée ou hypoxie.

« Ces critères de bonne évolution, permettant l’arrêt du traitement ont été observés chez 70% des malades », indique le Pr Perronne.

« Alors que les études précédentes n’avaient porté que sur des formes bénignes de pneumonie, les scores de gravité des patients inclus dans cette étude étaient élevés, témoignant de formes graves de pneumonies », ajoute-t-il. « Les formes très graves, nécessitant des soins intensifs, ont cependant été exclues de l’étude ».

Alors que les patients bons répondeurs du groupe expérimental ont reçu 5 jours d’antibiotique, ceux du groupe témoin ont été traités durant 10 jours en moyenne.

 
Si le malade a les critères d’amélioration clinique au 5ème jour, il devrait pouvoir contacter son médecin pour voir si l’arrêt de l’antibiothérapie est possible. Pr Christian Perronne
 

Or, le succès clinique à 30 jours était plus élevé dans le groupe traité 5 jours : 93% versus 80% dans le groupe témoin.

Le taux de réadmissions était par ailleurs plus faible chez les patients traités durant 5 jours.

« Prolonger le traitement ne prévient donc pas les rechutes, relève le Pr Perronne, « d’autant plus que ces rechutes sont dues à des sérotypes bactériens différents, montrant qu’il s’agit en fait de réinfections ».

« Ce raccourcissement possible de l’antibiothérapie est intéressant, car il a été montré que les traitements longs sélectionnent plus de résistances bactériennes », rappelle le Pr Perronne.

« Le but est de personnaliser le traitement en fonction de la réponse clinique du patient.

Si le malade a les critères d’amélioration clinique au 5ème jour, il devrait pouvoir contacter son médecin pour voir si l’arrêt de l’antibiothérapie est possible »

Enfin, la pneumonie communautaire n’est pas la seule indication concernée par la tendance aux traitements plus courts.

« D’après les données de la littérature, les raccourcissements des traitements antibiotiques sont également envisageables dans d’autres infections : pneumonie nosocomiale, pyélonéphrite, infection abdominale, exacerbation de bronchite chronique obstructive, sinusite bactérienne aigüe, cellulite et spondylodiscite ».

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