Columbus, Etats-Unis — La supplémentation en vitamine B6 et B12 à fortes doses et sur le long terme serait associée à un risque accru de développer un cancer du poumon chez les hommes, selon les données de l’étude de cohorte américaine Vitamins and Lifestyle (VITAL).
Selon les chercheurs, par rapport à l’absence de supplémentation, le risque pourrait doubler, voir quadrupler chez ceux qui fument.
Ces résultats méritent toutefois d’être interprétés avec prudence en raison du caractère observationnel de l’étude qui ne permet pas d’affirmer qu’il existe vraiment un lien de causalité entre ces fortes doses de vitamines B et le cancer du poumon.
Aussi, ces données, publiées le 22 août dans le Journal of Clinical Oncology[1], vont à l’encontre de celles publiées précédemment dans la littérature. Auparavant, un essai contrôlé randomisé et deux autres études avaient suggéré un effet préventif de la vitamine B sur le cancer du poumon.
Enfin, leur portée est à relativiser puisque quatre conditions doivent être réunies pour augmenter le risque de façon significative :
- consommer des quantités largement supérieures aux doses journalières recommandées (le comprimés multivitaminés sont donc sans danger);
-pendant plus de 10 ans ;
-être un homme (pas de sur-risque observé chez les femmes) ;
-être fumeur.
| Doses importantes de vitamine B6 et B12 : quelle réalité dans la vraie vie ? Dans l’étude, les hommes qui prenaient les plus fortes doses de vitamine B (ceux qui avaient deux fois plus de risque de développer un cancer du poumon par rapport à ceux qui ne prenaient pas de supplémentation) ont reçu, en moyenne, 20 mg/j de vitamine B6 et 55 µg/j de vitamine B12 pendant 10 ans. Ces doses sont beaucoup plus élevées que celles recommandées officiellement par le National Institutes of Health Office of Dietary Supplements dans la population générale : 1,7 mg/j de vitamine B6 (1,5 mg/j pour les femmes) et 2,4 µg/j de vitamine B12 chez les hommes à partir de 50 ans. Mais aussi, par la France et l’Europe, où les apports nutritionnels conseillés en vitamine B6 sont de 1,4 mg par jour et ceux en vitamine B12 de 2,5 µg/j. Toutefois, en pratique, les doses de vitamine B6 et B12 reçues peuvent être beaucoup plus importantes lorsqu’elles sont prescrites à des fins médicales ou utilisées directement par les consommateurs. Pour la vitamine B6, les doses prescrites notamment en cas de carence (alcoolisme…) peuvent être élevées. En outre, la vitamine B6 est parfois utilisée à des doses très variables en prévention des maladies cardiovasculaires ou neurodégénératives. Selon le site EurekaSanté du Vidal, les doses de vitamine B6 prescrites sont habituellement de 35 à 140 mg par jour. Pour la vitamine B12, des fortes doses sont prescrites dans certains cas d’anémie (plusieurs centaines de µg par jour) ou dans certains syndromes douloureux mais aussi lorsqu’elles sont utilisées comme anabolisant dans la pratique du sport (jusqu’à 50 mg sont recommandés sur certains sites internet). |
Un risque beaucoup plus important chez les hommes fumeurs
L’étude VITAL a recruté 77 118 personnes âgées de 50 à76 ans entre octobre 2000 et décembre 2002. Pour cette sous-étude, le Pr Theodore Brasky et coll. (Ohio State University Comprehensive Cancer Center, Columbus) se sont intéressés à 808 participants ayant développé un cancer du poumon invasif (hommes, n=449, 55 %).
Les participants ont répondu à des questionnaires sur leur consommation de compléments alimentaires, leurs habitudes alimentaires, et un éventuel tabagisme.
Après ajustement pour différents facteurs de biais (histoire personnelle de tabagisme, âge, ethnie, niveau d’éducation, taille corporelle, consommation d’alcool, antécédents personnels et familiaux de cancer du poumon, consommation d’anti-inflammatoires), l’analyse montre que les hommes qui avaient pris les plus fortes doses de vitamine B avaient un risque de cancer du poumon doublé par rapport à l’absence de supplémentation.
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Citer cet article: La supplémentation en vitamine B impliquée dans le cancer du poumon ? - Medscape - 30 août 2017.
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