Contraception de la femme obèse : ce qu’il faut savoir

Vincent Richeux

Auteurs et déclarations

13 juin 2017

Lisbonne, Portugal — Même si la pharmacocinétique d'une contraception estroprogestative est modifiée chez les femmes en surpoids, son efficacité n'est pas altérée, à condition que l'obésité reste modérée (IMC<35), a souligné le Pr Philippe Bouchard (Hôpital Saint-Antoine, AP-HP, Paris), au cours d'une intervention au 19ème congrès européen d'endocrinologie (ECE) [1].

Plusieurs facteurs liés à l'obésité peuvent avoir des répercussions sur le métabolisme des hormones stéroïdes. Volume de distribution accru, absorption intestinale modifiée, hausse de la clairance rénale… « Toutes les conditions sont réunies pour rendre les contraceptifs hormonaux moins efficaces », souligne l’orateur.

L'obésité influe sur la pharmacocinétique des estroprogestatifs

Les données concernant l'utilisation des contraceptifs chez les femmes obèses sont encore restreintes. Et, selon l'endocrinologue, « les études sur les nouvelles méthodes contraceptives excluent systématiquement les femmes, dont le poids est supérieur à 130% du poids idéal », soit un poids supérieur à 90 kg.

Néanmoins, on commence à en savoir un peu plus sur l'efficacité de la contraception dans cette population. Tout d'abord, sans surprise, l'obésité influe sur la pharmacocinétique des estroprogestatifs. Par exemple, « la demi-vie du progestatif levonorgestrel est quasiment doublée chez les femmes obèses », précise l'endocrinologue.

Menés pour évaluer l'effet de l'IMC sur la pharmacocinétique des estroprogestatifs oraux, des travaux américains ont ainsi montré que le niveau plasmatique de levonorgestrel s'équilibre au bout de 10 jours de contraception orale, voire plus, chez les femmes avec un IMC>30, contre 5 jours pour un IMC<25 [2].

Le temps nécessaire pour atteindre la concentration optimale en hormone dans le sang est prolongé de trois à cinq jours. Il est donc conseillé de compléter par une autre méthode de contraception (préservatif, spermicide…) dans la semaine qui suit la prescription d'une contraception estroprogestative.

 
La demi-vie du progestatif levonorgestrel est quasiment doublée chez les femmes obèses Pr Philippe Bouchard
 

La contraception non orale aussi

Par ailleurs, la concentration plasmatique maximale en hormones reste inférieure pendant la contraception, « probablement en raison d'une absorption réduite », commente le Pr Bouchard. « Dans l'ensemble, comparativement aux femmes sans surpoids, les femmes obèses ont des niveaux sériques inférieurs de 30%. »

Un constat qui concerne également la contraception non orale, tel que l'anneau contraceptif vaginal (Nuvaring®, MSD). Mais, dans ce cas, l'effet contraceptif est plus rapide, le délai pour obtenir une concentration optimale étant raccourci par l'absorption à travers les muqueuses vaginales.

Pour ce qui est de l'implant contraceptif (Nexplanon®, MSD), une étude portant sur des femmes avec un IMC médian de 41 a rapporté des taux plasmatiques en etonogestrel inférieurs de 31 à 63%, par rapport à ceux observés chez des femmes ayant un poids normal [3].

Concernant le patch contraceptif (Evra®, Janssen), « des doutes persistent quant à son efficacité chez les femmes obèses, les concentrations sériques maximales en hormones pouvant être diminuées de moitié, comparativement aux femmes non obèses ». Il y aurait aussi plus d'échecs lorsque le patch est placé sur l'abdomen.

 
Dans l'ensemble, comparativement aux femmes sans surpoids, les femmes obèses ont des niveaux sériques inférieurs de 30% Pr Bouchard
 

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