Le blog du Pr Gilles Pialoux – Infectiologue
Pourquoi parler de la rougeole en ce jour du premier mai ?
Car on pourrait imaginer que la rougeole est éradiquée compte tenu de l’efficacité vaccinale.
Il est vrai que là où l’on dénombrait en France plus de 300.000 cas avant la fin des années 1980, on n’en compte plus aujourd’hui que quelques dizaines de milliers. Mais si cette épidémie a considérablement baissée, on voit continuellement des résurgences annuelles, comme un cycle répétitif, qui pose question.
Santé Publique France, l’organe d’état, vient d’alerter sur le fait qu’en 9 ans, on a vu s’accumuler 25.000 cas de rougeole en France. De plus, du premier janvier au 31 mars, 134 cas de rougeoles cas ont été déclarés en France, soit 3 fois plus que le nombre de cas déclarés en 2016. C’est une inquiétude.
Certes, il existe comme souvent des foyers actifs comme en Moselle où une soixantaine de cas ont été recensés mais ceci n’explique pas ce début d’année 2017 important en terme de cas de rougeole.
La France n’est pas le seul pays concerné, d’autres pays européens ont aussi des foyers épidémiques déclarées en 2016, notamment l’Irlande, la Grande Bretagne, l’Allemagne, la Pologne. On sait aussi que certains pays font face à des épidémies importantes comme c’est le cas de la Roumanie.
On se souvient, puisque qu’on est le premier mai, que les élections présidentielles de 2012 avaient vu l’absence de couverture vaccinale de certains migrants, notamment d’Europe de l’Est, s’inviter dans le débat politique.
En France, la couverture vaccinale est probablement insuffisante, la sous-déclaration est aussi probablement une réalité, comme pour beaucoup de maladies à déclaration obligatoire.
Avec la rougeole, on est particulièrement vigilant car c’est une maladie au top de la transmissibilité. Un cas index R0 peut contaminer de 15 à 20 personnes.
Les dernières enquêtes, menées chez les enfants à partir de l’âge de deux ans, montrent que seulement 90% d’entre eux ont reçu une première dose du vaccin trivalent ROR et 78% la deuxième dose.
Or pour avoir un réel impact sur l’épidémie il faudrait avoir une couverture vaccinale qui dépasse les 95%. Donc on est toujours en sous-vaccination dans cette singularité française à l’égard de la politique vaccinale.
La rougeole est une maladie potentiellement grave. Sur les 24 000 cas mentionnés des 9 dernières années, on déplore 1.500 pneumopathies graves, 34 formes neurologiques principalement des encéphalites mais aussi des Guillain Barré et une dizaine de décès. C’est certes faibles mais particulièrement saisissant pour une pathologie contre laquelle on dispose d’une vaccination efficace.
On est extrêmement prudent. C’est vrai qu’il y a un amalgame fait entre immigration, notamment d’Europe de l’Est, et épidémie de rougeole, mais ce n’est pas du tout le cas. De nombreux pays qui n’ont pas cette immigration, notamment le Canada, assistent aussi à des résurgences de rougeole.
C’est pourtant une maladie que l’on pourrait éradiquer si un effort était fait dans la vaccination.
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Citer cet article: Sous-vaccination ROR : la rougeole menace - Medscape - 11 mai 2017.
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