Docétaxel : conclusions rassurantes de l’ANSM, colère des oncologues

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

5 mai 2017

Saint-Denis, France— L’ANSM a livré le premier bilan de ses investigations sur la multiplication des cas d’entérocolites neutropéniques fatales survenus chez des patientes atteintes d’un cancer du sein opérable traitées par docétaxel depuis début 2016 en France [1]. En substance, les molécules seraient hors de cause mais elles restent interdites par mesure de précaution.

Ces conclusions, rendues suite à une réunion de l’ANSM, de l’InCA et d’UNICANCER, ne semblent pas partagées par un certain nombre d’oncologues qui incriminent eux directement les changements de formulations et les génériques [2].

Le docétaxel reste interdit en attendant de nouvelles recommandations

Les principales conclusions de l’ANSM sont que :

- Les spécialités de docétaxel commercialisées en France (princeps et génériques) ne présentent pas de défaut de qualité ;

-Le nombre d’effets indésirables graves déclarés a augmenté en 2010 et en 2015-2016 « sans qu’aucune cause de cette augmentation n’ait pu être identifiée et sans qu’aucun signal spécifique à une spécialité ou à une indication n’ait pu être mis en évidence. »

- L’agence européenne du médicament n’a pas retrouvé d’augmentation de la fréquence des effets secondaires au cours des dernières années.

L’ANSM préconise donc plutôt de centrer les efforts sur une meilleure caractérisation du profil de risque des candidates pour limiter cet effet secondaire grave.

Au final, pour l’agence française : « les décès restent rares, de l’ordre de 1 pour 10 000 patients exposés au docétaxel, médicament qui a permis d’allonger l’espérance de vie dans des cancers avancés et de sauver plusieurs milliers de vies dans des cancers du sein au stade précoce. »

Toutefois, en attendant de nouvelles recommandations d’utilisation pour le docétaxel et le paclitaxel, l’ANSM et l’INCa considèrent « que la recommandation d’éviter temporairement l’utilisation du docétaxel dans les cancers du sein infiltrants non métastatiques, prise à titre de précaution en février 2017, ne peut être levée. »

Défaut de pharmacovigilance ?

Autre son de cloche sur le terrain. Dans un article du magazine Rose intitulé « Docetaxel : chronique d'une catastrophe annoncée » paru le 30 mars dernier, Céline Lis-Raoux et Claudine Proust rappellent que le Taxotère® (Sanofi) et Gé. font l’objet de signalements auprès de l’ANSM depuis plusieurs années. Les journalistes pointent du doigt le manque de réactivité du système de pharmacovigilance français, témoignages à l’appui.

D’après l’enquête journalistique, en 2010, soit quatre ans après l’obtention d’AMM du Taxotère®, de nombreux oncologues ont constaté une recrudescence des effets secondaires graves (neutropénies fébriles, entérocolites, toxicités cutanées) après un changement de formulation (en un flacon unique prêt à diluer).

Commenter

3090D553-9492-4563-8681-AD288FA52ACE
Les commentaires peuvent être sujets à modération. Veuillez consulter les Conditions d'utilisation du forum.

Traitement....