Un psy virtuel pour diagnostiquer les troubles dépressifs

Stéphanie Lavaud

Auteurs et déclarations

27 mars 2017

Julia, capable de conduire un entretien interactif intelligent et empathique

Pour remédier à ces lacunes, les chercheurs du laboratoire Sanpsy de Bordeaux ont décidé de développer de nouveaux outils numériques basés sur des scénarios médicaux mimant un entretien clinique avec des interactions empathiques, dans un domaine médical encore peu exploré par les E-solutions, la psychiatrie.

Après 3 années de travail, est née Julia, premier agent conversationnel animé (ACA) ou humain virtuel capable de conduire un entretien interactif intelligent pour diagnostiquer les troubles dépressifs (voir ici une vidéo d’un entretien avec Julia). « Notre originalité, c’est d’avoir marié des compétences médicales – ici basées sur le DSM5 – à une expertise informatique, notamment émotionnelle, pour créer un agent empathique doué de compétences médicales, confirme le chercheur bordelais. Un outil virtuel capable, par son intelligence, non seulement artificielle mais humaine, de maitriser les échanges dans le domaine psychiatrique, c’est extrêmement novateur. »

Un outil virtuel capable, par son intelligence, non seulement artificielle mais humaine, de maitriser les échanges dans le domaine psychiatrique, c’est extrêmement novateur -- Pr Philip

Pour tester leur psy virtuelle, les chercheurs ont inclus 179 patients (46,5 ans en moyenne, 57,5% de femmes) venus consulter à la clinique du sommeil du CHU de Bordeaux. Au cours de leur parcours clinique pour leurs troubles du sommeil, les patients se sont vus proposer de participer à l’étude consistant pour la moitié d’entre eux, désignés de façon aléatoire, à un entretien avec un psychiatre pour évaluer leur potentielle dépression clinique (major depressive disorder, MDD) puis à un entretien avec l’ACA ou inversement.

A la fin des 2 entretiens, les patients ont rempli l’inventaire de dépression de Beck (BDI- II) pour quantifier la sévérité de la dépression et un questionnaire d’acceptabilité (AES) de l’ACA.

Une bonne spécificité diagnostique

L’évaluation par le psychiatre – qui reste (et restera encore longtemps) le gold standard en matière de diagnostic – a mis en évidence 35 patients avec un MDD, qualifiée de légère chez 14 (40%) d’entre eux, de modérée chez 12 (34,3%) patients et de sévère pour 9 patients (25,7%).

Sur les 35 patients diagnostiqués pour MDD par le psychiatre, l’agent conversationnel animé en a identifié correctement 17, mais n’a pas été en mesure de diagnostiquer la dépression chez les 18 autres. L’ACA a donc eu une sensibilité globale de 49%, et une spécificité de 93% (Tableau 1).

Tableau 1

Propriétés psychométriques d’identification de l’ACA

Aire sous la courbe

Valeur p

Sensibilité

Spécificité

Valeur prédictive positive

Valeur prédictive négative

Vrais positifs

Faux négatifs

Faux positifs

Tous les patients

0,71 [0,59- 0,81]

< 0,001

49

[31-66]

93

[88-97]

63

[42-81]

88

[82-93]

17

18

10

Assez logiquement, les capacités de l’ACA ont été les meilleures aux deux extrémités du spectre des troubles dépressifs, avec un taux de sensibilité atteignant 73% chez les patients les plus sévèrement touchés.

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