Addiction aux jeux et au sexe sur Internet : virtuelle ou réelle ?

Stéphanie Lavaud

Auteurs et déclarations

7 février 2017

Dans cet article

World of Warcraft rend accro

« Toute substance ou comportement pouvant potentiellement entraîner une addiction agit sur le centre du renforcement (aire tegmentale ventrale (VTA), noyau accumbens,...) entrainant une libération de dopamine : les substances addictives par une action neurobiologiques directes, et le jeu pathologique (gambling) agit indirectement sous forme de récompenses, a expliqué le Dr Gabriel Thorens (Hôpitaux Universitaires de Genève).

On peut même établir une analogie entre l’addiction à la cigarette et aux jeux vidéo. Dans le premier cas, l’effet addictif dépend de la capacité de la nicotine à activer le VTA, en faisant intervenir une cinétique liée à la concentration en nicotine et une technologie, la cigarette. Dans le cas des jeux vidéo, l’effet addictif est lié aux « salient stimuli », ces stimuli visuels et auditifs qui capturent l’attention du gamer, l’équivalent de la pharmacocinétique, c’est la vitesse à laquelle sont distribuées les « récompenses » et la technologie fait appel à l’informatique ».

Les mécanismes d’addiction aux jeux vidéos sont à rechercher dans la façon dont les récompenses virtuelles (argent virtuel, récompense virtuelle…) - ou l’attente de ces récompenses - sont dispensées aux joueurs. « Par exemple, dans les jeux multijoueurs en ligne, la quête consiste à tuer des monstres, en tuer un va rapporter dans 99% des cas une récompense virtuelle médiocre mais dans 1% des cas une récompense exceptionnelle, laquelle est distribuée de manière rapide, comme les « jackpots » des machines à sous. Si vous tuez des monstres à répétition, vous vous retrouvez dans la même situation que sur les casinos en ligne avec des jackpots répétés. A cela s’ajoute d’autres éléments renforçateurs du comportement comme les interactions sociales entre joueurs (appartenance à un groupe et sentiment d’obligation de réaliser certaines tâches dans le jeu), la compétition ou des décors qui agissent comme autant de superstimuli.

Au final, l’ensemble constitue un cocktail addictogène assez intéressant » considère le psychiatre suisse.

Quel est le profil des joueurs à risque ?

Certains types de jeux sont beaucoup plus à risque de dépendance que d’autres et les MMOPRG, avec leur système de récompenses aléatoires rapides, couplé au fait de faire partie d’une guilde (association de joueurs) pour progresser, en font partie.

Outre le type de jeu, le risque de dépendance est aussi fonction des motivations des joueurs.

Les plus à risque sont très nettement ceux que l’on nomme les joueurs acharnés ou «hardcore gamers», motivés par le fait d’avancer dans le jeu «achiever» et de fuir la réalité du quotidien «escapism».

A l’inverse, les joueurs dits récréationnels sont moins dans l’impulsivité et ce type de motivation. « S'il y a du plaisir, l’addiction est moins grave. Le plaisir est un facteur protecteur » commente le Dr Thorens.

Les études ont montré que l’on retrouve chez les joueurs de jeux vidéo un profil psychologique particulier mêlant perfectionnisme (« être le meilleur »), salience cognitive (« je ne fonctionne pas sans jeux vidéo et je ne peux pas m’arrêter d’y penser »), regrets (« j’aimerais ne pas jouer autant et je regrette les conséquences sur ma vie réelle » et salience comportementale (« c’est difficile de s’arrêter en ayant investi autant de temps »).

Néanmoins, « au final, on peut penser que seule une minorité d’individus à risque est à même de développer des symptômes d’addiction » considère le psychiatre.

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