Les associations de patients ont aussi leurs liens d’intérêt

Vincent Bargoin

Auteurs et déclarations

26 janvier 2017

Cleveland, Etats-Unis — Jusqu’où les liens d’intérêt sont-ils compatibles avec la priorité aux patients ? La question est (aujourd’hui) admise pour les professionnels de santé. Mais elle se pose aussi, et se posera probablement de plus en plus pour les associations de patients – le paradoxe étant que les patients sont en principe les premiers intéressés à la plus grande transparence.

Publiée dans le JAMA Internal Medicine une enquête américaine , associant les départements d’éthique de plusieurs universités ou institutions médicales, aborde cette question difficile [1].

L’objectif n’est pas de contester la place prise par les associations de patients dans le débat public, que ce soit dans les médias, blogs et autres réseaux sociaux, ou dans la participation à des instances d’évaluation ou de décision. Il reste que pour garder cette légitimité, il faut aussi s’interroger sur les 8% de responsables d’associations qui déclarent de la manière la plus cash avoir « perçus des pressions pour conformer leurs positions aux intérêts des sociétés donatrices ».

8% de responsables d’associations qui déclarent de la manière la plus cash avoir « perçus des pressions pour conformer leurs positions aux intérêts des sociétés donatrices ».

82% des associations « très ou plutôt concernées par la question des liens d’intérêt »

L’enquête a été menée entre septembre 2013 et juin 2014. Des questionnaires ont été adressés par e-mail aux responsables de 439 associations de patients. Ces associations ont été choisies au hasard sur un total de 7865 associations éligibles aux Etats-Unis.

Les auteurs précisent s’être adressés à des associations de taille variées, disposant d’un budget médian de 300.000$, mais avec des quartiles allant de 70.000 à 1.200.00 $ (USD). Les pathologies couvertes étaient par ailleurs majoritairement le cancer, les maladies neurologiques, et les maladies rares, en particulier génétiques.

Deux-cents-quatre-vingt-neuf réponses exploitables ont été obtenues (66%).

Parmi elles, plus des deux-tiers ont rapporté des financements de sociétés privées. Le montant médian est de 50.000 $, avec des quartiles allant de 15.000 à 200.000 $. Près de 9% des associations recevaient plus d’un million de $ par an.

Logiquement, le médicament, les dispositifs médicaux et les biotechs arrivent en tête des industries donatrices, et pèsent 45% du financement de ces associations. On note cependant que les donations privées arrivent juste derrière (on est aux Etats-Unis).

Logiquement aussi, 82% des associations qui ont répondu estiment être plutôt ou très concernées par la question des conflits d’intérêt. Cependant, 64% seulement ont établies des règles écrites vis-à-vis des conflits d’intérêt, et ces règles ne sont jugées « très satisfaisantes » que dans 55% des cas.

Près de 9% des associations recevaient plus d’un million de $ par an.

La proportion d’associations qui ont une politique de publication des liens d’intérêt (sur le site internet ou dans les rapports annuels) est plus faible encore : 26%.

Il reste donc une grosse marge de progression du côté des associations elles-mêmes. Les 14% d’associations qui déclarent avoir décliné un financement en raison « d’inquiétudes quant aux conflits d’intérêt » peuvent servir d’inspiration.

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