Le blog du Dr Boris Hansel - Diabétologue et nutritionniste

Les résultats récents des cohortes ENTRED, publiés dernièrement dans le Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire , montrent des progrès dans la mortalité des diabétiques de type 2. Ainsi, quand on compare la mortalité cardiovasculaire (CV) des patients entre deux vagues de recrutement, à partir de 2001 et à partir de 2007, on constate que la surmortalité de 62% par rapport à la population générale dans le première période, a reculé à 42% « seulement » lors de la seconde période [1].
Difficile de se contenter de cette évolution cependant, d’abord parce que la surmortalité reste élevée, ensuite parce que sa diminution n’est observée que chez les hommes, et non chez les femmes…
Comment faire mieux ?, s’interroge le Dr Hansel, qui discute deux pistes, « parmi celles qu’ouvrent les données de la littérature scientifique ».
1 –Combattre l’inertie thérapeutique
Premièrement, « il s’agirait de s’orienter vers des traitements plus intensifs – ou plus exactement, de mieux observer les recommandations en matière d’intensification ».
Et le Dr Hansel de citer deux exemples « d’inertie thérapeutique ». L’étude française DIAttitude montre qu’en 2008-2009, 20% des patients nécessitaient une intensification du traitement pour atteindre les recommandations de l’époque en matière d’HbA1c. Par ailleurs, sur un suivi de 14 mois, une intensification a effectivement été observée dans 39% des cas. « Beaucoup de patients ne bénéficiaient pas d’une intensification de traitement conforme aux recommandations ».
Autre exemple : les traitements hypolipémiants. « Selon les données 2008-2009 du SNIRAM, dans une population de diabétiques à très haut risque CV, 13% des prescriptions instaurant un hypolipémiant portaient sur un fibrate, et non une statine ». Dans ENTRED, ajoute le Dr Hansel, « près de la moitié des patients DT2 à très haut risque CV présentaient un LDL > 1g/L, et seulement un tiers recevaient une statine ».
2- Augmenter l’observance
Seconde piste pour réduire la mortalité : optimiser l’observance thérapeutique. Ici aussi, il existe une marge de progression : l’observance thérapeutique, « on en parle, mais il est possible de faire beaucoup mieux ».
La question dépasse celle des patients diabétiques. Dans une population de coronariens en général, on sait que la proportion de mauvais observants à l’un des traitements (statine, IEC/ARAII, antiagrégants) atteints 20-30% rappelle le Dr Hansel. Et « pour l’ensemble des médicaments de la prévention secondaire, on considère qu’un patient sur deux n’est pas suffisamment adhérent ».
En pratique, un problème d’observance se dépiste assez aisément, « quand on prend le temps d’interroger les patients en consultation », souligne le Dr Hansel, qui précise aussi que le facteur de non adhérence qui sort en tête dans toutes les études menées sur la question, est la complexité du traitement.
« Plus il y a de comprimés, et plus le nombre de prises médicamenteuses est important, plus l’observance est compromise. Et c’est vrai pour le défaut d’observance intentionnel aussi bien que pour l’oubli des prises ».
Au second rang des causes de non-observance, viennent « les craintes liées à certaines prises, ou la perception d’effets secondaires qui favorise la mauvaise observance ».
La réponse à tous ces facteurs passe généralement par ce qui est convenu d’appeler l’éducation thérapeutique. « Mais on sait que la plupart des patients n’ont pas accès aujourd’hui à de véritables programmes d’éducation thérapeutique », commente le Dr Hansel. « Ils sont coûteux et ne sont pas disponibles partout ».
« Entre l’éducation thérapeutique, qui serait la prise en charge optimale pour améliorer l’observance, et la consultation centrée sur les examens complémentaires du patient et le renouvellement du traitement pharmacologique, il y une place pour des consultations d’observance, face-à-face dédié à l’observance thérapeutique. Ces consultations pourraient même être relativement courtes, pourvu qu’elles soient réservées à une discussion sur la tolérance du traitement, les oublis plus ou moins conscients, les croyances du patient au sujet de son traitement ».
Le Dr Hansel estime que « de nombreux médecins sont conscients de ces aspects. Mais nombreux aussi sont ceux qui ne s’organisent pas pour mettre l’observance au centre de la relation ».
Et au-delà même des médecins, « les futures recommandations devraient insister davantage sur ce problème d’observance, et mettre au second plan, même si c’est important, les algorithmes décisionnels d’utilisation des médicaments ».
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Citer cet article: Diabète : stop à l’inertie thérapeutique et au défaut d’observance - Medscape - 5 déc 2016.
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