Mediator à qui la faute ? A Servier et à l’Etat après mi-1999

Stephanie Lavaud

Auteurs et déclarations

15 novembre 2016

Paris, France Dans l’affaire du Mediator, qui devra indemniser les patients lésés ? Le laboratoire Servier qui commercialisait le médicament incriminé et/ou l’Etat qui a laissé faire ? Le Conseil d’État a rendu la semaine dernière une réponse qui éclaire la responsabilité des uns et des autres. Contrairement à la cour administrative d’appel qui avait estimé qu'il revenait à l'État de réparer intégralement le préjudice subi, la haute juridiction a jugé que « les agissements fautifs » des laboratoires Servier étaient de nature « à exonérer l’État de tout ou partie de l’obligation de réparer les dommages subis par les patients qui ont utilisé le Mediator ». Enfin, dernier point de la décision, le « préjudice d’anxiété » est, lui, reconnu, sous certaines conditions.

L’absence de suspension ou de retrait de ce médicament ne constituait pas, dès 1995, une faute de nature à engager la responsabilité de l’État – Conseil d’État

Pas de faute avant mi-1999

Dans les faits, plusieurs personnes ont saisi le juge administratif de demandes d’indemnisation, au titre de la responsabilité pour faute de l’État, dès 1995, des préjudices résultant pour elles de la prise de Mediator. C’est le cas de Mme G. qui a été exposée au Mediator en 1996 et 1997 . Après qu'elle ait été déboutée par la cour administrative d’appel, son pourvoi vient d’être rejeté par le Conseil d’État, qui a jugé, lui aussi, que l’État n’a pas commis de faute avant mi-1999. La haute juridiction « relève que le benfluorex (principe actif du Mediator) a été présenté par la société les Laboratoires Servier, dans les années soixante-dix, comme ayant des propriétés différentes de celles des fenfluramines (anorexigènes) et que le Médiator a obtenu une autorisation de mise sur le marché pour des indications thérapeutiques distinctes. Si un centre de pharmacovigilance, en 1995, avait pu relever que le benfluorex avait une structure voisine de celle des anorexigènes, son métabolisme n’était pas mieux connu à cette date et aucun effet indésirable grave relevant de la prise de Mediator n’était identifié ».

Le Conseil d’État en a déduit que « l’absence de suspension ou de retrait de ce médicament ne constituait pas, dès 1995, une faute de nature à engager la responsabilité de l’État ».
En clair, ce n’est qu’à compter de mi-1999 que les autorités sanitaires ont commis une faute en ne procédant pas à la suspension ou au retrait de l’autorisation de mise sur le marché du Mediator, compte tenu des nouveaux éléments d’information sur les effets indésirables du benfluorex.

Servier/Etat : responsabilité partagée

Le Conseil d’État a confirmé, en revanche, qu’à partir de mi-1999, « l’État a commis une faute en ne prenant pas de mesures de suspension ou de retrait de l’autorisation de mise sur le marché du Mediator ».

Il n’aura cependant pas, contrairement à ce qu’avait établi la Cour administrative, l’obligation de réparer « intégralement » le préjudice subi par les patients qui ont pris du Mediator (notamment sur la période précédant 1999), mais pourra « se prévaloir de la faute des laboratoires Servier » et ne sera donc condamné à réparer le préjudice subi par les patients que « partiellement ».Restera d’ailleurs à déterminer quelle part de la réparation du préjudice, la cour devra mettre à la charge de l’État, indique le Conseil d’Etat.

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