Enregistré le 9 octobre 2016, à Berlin, Allemagne

Antoine Flahault, président du World Health Summit 2016 , souligne les conditions nécessaires à une véritable collaboration internationale en recherche médicale.
TRANSCRIPTION
Je m’appelle Antoine Flahault, je suis le directeur de l’Institut de Santé Globale à l’Université de Genève et je préside le World Health Summit 2016 , parce que nous avons organisé le Geneva Health Forum, qui est le sommet régional du World Health Summit, au printemps 2016 à Genève.
Open Data : c’est un mot qui s’accompagne d’Open Science, la science ouverte ou les données ouvertes, libres d’accès. C’est un peu un mythe, un rêve auquel beaucoup de chercheurs aspirent. Est-ce que c’est une réalité?
Ebola : un rendez-vous manqué
On regarde aujourd’hui quelques exemples, comme Ebola : Ebola, c’est le cauchemar. Évidemment c’était un cauchemar sanitaire, une tragédie, mais Ebola n’a pas permis à la communauté internationale de s’organiser pour partager les données. Il n’y a pas eu de partage véritable. On peut même dire que les données étaient fragmentées. Les données dans certains pays, pour certains essais cliniques, pour certaines recherches épidémiologiques ne communiquent pas; aucune de ces données n’ont été mises ensemble pour vraiment parler ensemble. Donc on ne peut pas tirer les leçons d’Ebola parce qu’on n’a pas pratiqué l’Open Data.
Zika : vers un meilleur partage des données
Pour Zika, cela va peut-être s’améliorer. Une des raisons peut-être est que les États-Unis se sentent très près du risque Zika. Ebola était un risque quand même beaucoup plus éloigné. Mais lorsqu’on est très près du risque, alors soudain on a envie de véritablement partager les données parce que c’est une nécessité, un besoin pour véritablement répondre correctement. Donc quand le risque le justifie, les chercheurs les plus influents de la planète − peut-être les nord-américains aujourd’hui − tendent à promouvoir l’Open Data ou l’Open Research.
Une recherche ouverte réellement collaborative?
Un dernier point à souligner sur l’Open Research. C’est très bien de vouloir partager, de vouloir travailler de façon la plus ouverte possible. Mais il ne faudrait pas que ce soit le faux nez d’une recherche qui en réalité est très unidirectionnelle du Nord vers le Sud. Je vais prendre des exemples : lorsqu’on va collecter des échantillons de sang ou des questionnaires, on ramène tout en Europe ou aux États-Unis, dans les pays du Nord, parce que tout cela va être acheminé, puis après traité beaucoup plus rapidement, beaucoup plus efficacement avec toutes les facilités locales pour le faire. Alors on est en train de soustraire la recherche, ce n’est pas une recherche collaborative. On n’a pas associé les personnes du terrain, peut-être en Afrique, en Asie, en Amérique Latine, d’un pays à faible niveau de revenu. On ne les a associés ni au protocole, ni même à la réflexion sur la recherche, ni probablement au recueil, à l’analyse des données. Après, ils vont être sans doute remerciés ou bien associés dans la liste d’auteurs et on va appeler cela une recherche collaborative ouverte. Je n’appelle pas ça une recherche collaborative ouverte. Si l’on veut aller dans cette direction, il faut associer les chercheurs qui vont être sur le terrain. Il faut collecter des données et les analyser sur place, peut-être même transférer les technologies pour que les pays à faible niveau de revenus puissent eux-mêmes s’équiper des moyens de faire de la recherche et de promouvoir leurs idées de recherche jusqu’au bout.
Merci.
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Citer cet article: L’Open Data en recherche médicale: mythe ou réalité? - Medscape - 15 nov 2016.
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