Drame de l’essai Biotrial : l'ANSM a faussé un rapport d'expertise sur l'affaire

Jean-Bernard Gervais

Auteurs et déclarations

17 octobre 2016

Paris, France — C’est un nouveau rebondissement dans l’affaire de l’essai Bial/Biotrial de Rennes, qui a entrainé la mort d’un patient de 49 ans, Guillaume Molinet, et en a lésé quatre autres. En avril dernier, le Figaro révélait qu’un rapport d’enquête interne de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), signé de Cécile Delval, directrice de l’évaluation de l’agence qu’elle a quitté depuis, pointait de nombreux manquements, à la fois de l’ANSM, et de Biotrial [1]. Cette enquête avait été commandée par la direction de l'agence pour faire « toute la lumière » sur d'éventuels dysfonctionnements, en vue d'éclairer l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) qui devait rédiger un rapport sur ces incidents.

Alertes ignorées

L’analyse de Cécile Delval est sans ambages : l’évaluation clinique de la molécule BIA 10-2474 n’a pas été sérieuse. Rappelons que cette évaluation clinique de l'ANSM qui autorisait Biotrial à conduire son essai clinique devait aboutir en janvier 2016 à la mort d'un des patients inclus dans cette étude.

Ainsi l’évaluateur non-clinique de l’ANSM, en l’occurrence Farida Ouadi, avait signalé à l’évaluateur clinique (de l’ANSM), Dr Jean-Louis Demolis, des alertes sur un possible effet « neuro-système nerveux central ». Ces alertes n’ont pas été intégrées dans le rapport d’évaluation clinique de Demolis, qui notait que la molécule n'était pas « un produit à risque ».

Évaluation clinique et non clinique
L'évaluation non-clinique, dans le jargon de l'ANSM, consiste à étudier les études effectuées sur l'animal, en l'occurrence fournies par BIAL, avant d'autoriser l'essai clinique de phase 1. Jean-Louis Demolis est docteur en médecine et pharmacologue. Il est le seul à l'ANSM à autoriser les essais cliniques de phase 1.

Enquête édulcorée

Dans un article daté du 10 octobre dernier, le site d’information Mediapart revient sur cette enquête interne de Cécile Delval, pour affirmer que l’ANSM l’a maquillé afin de se dédouaner [2]. L’enquête édulcorée a ensuite été remise à l’Igas, qui enquêtait sur cet incident. C’est l’une des conclusions de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaep), affirme Mediapart, qui a eu accès aux premières conclusions de cette enquête judiciaire.

Ce tour de passe-passe de l’ANSM a ensuite permis aux pouvoirs publics, fort du rapport de l’Igas, d’affirmer que cet accident était totalement imprévisible, et que l’ANSM n’a rien à se reprocher.

Mais selon les gendarmes de l’Oclaep, il en va tout autrement : « Non seulement la toxicité du BIA 10-2474 a été détectée chez quatre espèces animales, mais chez les quatre, le système nerveux central est concerné », écrit Mediapart.

Toxicités sur le système nerveux central animal

Car l’évaluation non clinique du BIA 10-2474, effectuée par Farida Ouadi, aurait dû alerter l’évaluateur clinique, Jean-Louis Demolis comme l'avait fait remarquer Le Figaro. La brochure d’investigateur délivré par Bial, que Farida Ouadi a analysé, révélait plusieurs types de toxicité qui ont été relevés.

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