Carlsbad, Etats-Unis – La biotech californienne Ionis Pharmaceuticals publie des résultats de phase 1 et 2 positifs sur la possibilité d’abaisser le taux de lipoprotéine (a), LP(a) par des oligonucléotides antisens. La publication, qui est bien celle de Ionis, puisque la grande majorité des auteurs du papier sont employés par l’entreprise, parait dans le Lancet, assorti d’un éditorial, ce qui laisse supposer qu’une certaine importance lui a été accordée [1,2].
En fait, le papier est original par au moins deux aspects.
D’abord, l’approche en elle-même, qui est un remarquable come-back.
Les oligonucléotides antisens sont de courtes séquences nucléotidiques, complémentaires d’un ARN messager dont on cherche à inhiber la traduction en protéine. En se fixant à l’ARNm, l’antisens va créer un double brin local, qui va induire la dégradation de l’ARNm par les systèmes enzymatiques intracellulaires.
Cette technologie avait été envisagée dès le début des années 90 pour bloquer spécifiquement la synthèse d’une protéine – cellulaire ou virale. Les essais avaient échoués pour des raisons, notamment, de stabilité de l’oligonucléotide. Il se pourrait donc qu’on ait progressé sur ce point, et que les antisens puissent resurgir vingt ans plus tard.
Second aspect : la nouveauté de la cible thérapeutique. La Lp(a) est connue comme marqueur du risque d’athérosclérose. Mais en l’absence de traitement autorisé dans cette indication, on s’est peu intéressé à la récolte de données, et il n’est en outre pas prouvé que la Lp(a) soit bien, au-delà du marqueur, un facteur, dont la diminution impacterait positivement un pronostic.
« La possibilité thérapeutique de cibler la Lp(a) demande une standardisation rigoureuse des dosages, et l’examen des valeurs seuils éventuelles », écrit le Dr Mark W. Feinberg (Brigham and Women's Hospital, Harvard Medical School, Boston) dans l’éditorial. « Nous attendons avec intérêt des essais cliniques plus avancés qui permettront finalement d’examiner si l’abaissement de la Lp(a) réduit les évènements cardiovasculaires et la sténose aortique. C’est un vaste programme ».
La particule de Lp(a) s’apparente à une particule de LDL par son contenu en cholestérol et en apolipoprotéine B (ApoB). La Lp(a) comporte cependant une ApoA qui lui est spécifique. Structurellement, l’ApoA se distingue par la présence de sous-unités répétées. Le nombre de sous-unités est déterminé par le gène codant l’ApoA. Le taux de Lp(a) circulant est par ailleurs inversement corrélé au nombre de sous-unités répétées. Les valeurs seuils recommandées varient selon les populations et les techniques de mesure, mais on considère généralement que le risque CV augmente à partir de 10 mg/dL (357 nmol/L). |
Les deux essais, phase 2 et phase 1/2a, ont été menée en double aveugle, et contre placebo (solution saline).
La phase 2, Safety, Tolerability, Pharmacokinetics, and Pharmacodynamics of ISIS-APO(a)Rx in Patients With High Lipoprotein(a) , a été menée dans des centres allemands, britanniques, canadiens, danois et néerlandais, chez 64 sujets, que les auteurs considèrent comme présentant une Lp(a) élevée :
- 51 patients avec une Lp(a) entre 125-437 nmol/L (cohorte A),
- 13 patients avec une Lp(a) > 438 nmol/L chez (cohorte B).
L’antisens évalué est dirigée contre la synthèse de l’ApoA (IONIS-APO(a)Rx®). Il a été administré à doses croissantes de 100, 200 et 300 mg, une fois par semaines chaque dose durant 4 semaines.
A 12 semaines, la baisse de Lp(a) plasmatique à jeun était de 66,8% dans la cohorte A, et 71,6% dans la cohorte B (les deux p <0,0001 par rapport à l’ensemble des 29 patients sous placebo).
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Citer cet article: Vincent Bargoin. Nouvelle piste pour les lipides : cibler la Lp(a) avec des antisens anti-ApoA - Medscape - 11 oct 2016.
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