Les psychiatres exclus du projet de circulaire sur la contention !

Jean-Bernard Gervais

Auteurs et déclarations

27 septembre 2016

L’article en question prévoit que les mesures d’isolement ou de contention sont des mesures de dernier recours, afin de répondre aux critiques qui estiment qu'elles seraient utilisées pour des raisons discutables, comme « la diminution du nombre de soignants dans les équipes, la féminisation de ces équipes et le manque de formation des infirmiers et des jeunes médecins, voire comme sanctions », précise le Sénat.

L’article 72 prévoit également que les établissements psychiatriques devront tenir un registre pour l’ensemble des mesures de contention et d’isolement. « Cette disposition répond notamment à une recommandation formulée depuis quelques années par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Dans son rapport d'activité 2013, il relevait des pratiques très diverses d'un établissement à l'autre quant à l'existence de protocoles pour la mise en œuvre de ces mesures et d'un système de traçabilité », ajoute le Sénat.

Déni et confusion

Bref, la circulaire, comme le note le Dr David, outrepasse le simple texte de loi. Par ailleurs, « il y a une espèce de déni de ce que sont les pathologies mentales lourdes, qui nécessitent ces pratiques, lesquelles ne sont pas nécessairement de dernier recours. Par ailleurs on amalgame isolement et contention, or, si l’on peut considérer que la contention est une mesure de dernier recours, ce n’est pas forcément le cas de l’isolement », explique le Dr David. Le SPH s’offusque également de la confusion qui est entretenue entre décision médicale et prescription médicale de ces mesures "d’exception".

 
Il y a une espèce de déni de ce que sont les pathologies mentales lourdes-- Dr David
 

« Basculer de la notion de prescription à décision en change le statut et peut aboutir à la notion de "décision faisant grief", susceptible de recours devant une juridiction », établit le SPH. Qui regrette également que les pouvoirs publics aient choisi d’édicter la mise en place du registre via une circulaire, alors même qu’un décret, de portée juridique supérieure à la circulaire, devait être publié sur la question. Et de mettre en garde : « Il ne faudrait pas que la restriction du contrôle des isolements et des contentions aux soins sans consentement soit l’occasion de la persistance d’un déni de la maladie mentale de la part de notre société ».

Recrudescence de la contention et de l'isolement

Adeline Hazan, contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), a rendu un rapport en mai dernier sur l’isolement et la contention dans les établissements de santé [3]. Ses équipes ont constaté que contention et isolement sont en recrudescence depuis une vingtaine d’années, due à des réductions d’effectifs, des changements dans la formation des professionnels, des évolutions de l’approche psycho-pathologiques, la présence insuffisante de médecins dans les unités de soins, le développement d’un impératif de sécurité publique… Par ailleurs, relève le CGLPL, les modalités d’utilisation de ces pratiques sont très hétérogènes, entrainant par endroits des atteintes aux droits fondamentaux des patients. Déjà, le CGLPL proscrivait l’isolement ou la contention dans la chambre du patient, comme cela est repris dans l’article 72 de la loi de santé. Il recommandait également, en matière de traçabilité, la tenue d’un registre des contentions et isolement, mesure également reprise par l’article 72.

 

REFERENCES :

1. Place de la contention et de la chambre d'isolement en psychiatrie.HAS, 2015.

2. Loi de modernisation de notre système de santé. LOI n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé

3. L'isolement et à la contention dans les établissements de santé mentale . CGLPL, mai 2016.

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