Téléconsultation dans les déserts médicaux : la fin de l’examen clinique ?

Jean-Bernard Gervais

Auteurs et déclarations

20 septembre 2016

Nous en avons d’autres exemples : à Cuny en Bourgogne ou encore dans le Haut-Var, il y a une cabine de téléconsultation où le patient peut se rendre dans des endroits sécurisés. Ces cabines sont en lien avec le centre 15, cela s’inscrit dans un processus de prise en charge de premier recours. L’Ordre pense en revanche qu’il ne faut pas considérer que la télémédecine puisse se substituer à la médecine. La télémédecine doit être intégrée à de nouvelles formes de prise en charge mais cela ne doit pas contribuer à une déshumanisation de la médecine pour réduire le patient à un symptôme. Là, ce n’est pas le cas.

 
La télémédecine ne doit pas contribuer à une déshumanisation de la médecine pour réduire le patient à un symptôme.
 

Medscape : Comment donc intégrer la télémédecine dans le parcours de soins ?

Dr J. Lucas : C’est une question en effet. Vous savez certainement que l’assureur Axa propose dans les contrats de complémentaire d’entreprise, aux salariés, de bénéficier d’une téléconsultation comprise dans leur complémentaire, mais qui se situerait en dehors du parcours de soins. C’est l’une de nos préoccupations. Nous demandons une clarification du décret télémédecine, en assouplissant la contractualisation avec les ARS ; il faut laisser libres les initiatives. La Fédération Hospitalière de France (FHF) veut comme l’Ordre déverrouiller le décret télémédecine tout en interdisant à des assureurs des initiatives qui se situeraient en dehors du parcours de soins.

Medscape : Quelle est la doctrine du CNOM sur l’intégration de la télémédecine dans le parcours de soins ?

Dr J. Lucas : Notre doctrine est très claire : actuellement l’article R41-27-53 dit que le simple avis ou conseil donné par téléphone ou correspondance ne peut pas donner lieu à honoraire. Or, actuellement, les cabinets médicaux comme les établissements hospitaliers reçoivent de très nombreux appels téléphoniques - distincts de l’exemple de télémédecine que vous avez cité - venant de patients connus, qui ont déjà consulté, pour procéder à des adaptations médicamenteuses. Il s’agit d’ajuster des posologies d’insuline par exemple… Nous avons là toute une activité médicale sécurisée qui n’est pas prise en charge. Nous sommes prêts à proposer une modification de l’article R41-27-53 du code de déontologie afin que cette activité là, inscrite dans un protocole, soit prise en charge. Il s’agit donc bien de télémédecine et nous demandons la révision du décret télémédecine dans ce sens. Le processus juridique de contractualisation doit être revu, la télémédecine sur les territoires peut être intégrée dans le parcours de soins de manière souple.

 
Les offres ubérisées de télémédecine doivent être encadrées ce qui n’est pas le cas actuellement.
 

Deuxième point : cela doit rester dans le cadre du parcours de soins. L’assureur complémentaire ne doit intervenir qu’en seconde intention puisque nous sommes dans le cadre du parcours de soins. Les offres ubérisées de télémédecine doivent être encadrées ce qui n’est pas le cas actuellement. Il existe des sites de téléconseil personnalisés qui proposent des téléconsultations moyennant rétribution hors parcours de soins et hors remboursement de l’assurance maladie. Il faut vraiment faire évoluer l’article 53 du code de déontologie car l’assurance maladie, en dehors de mesures dérogatoires, ne prend pas en charge ces téléconsultations. Il faut essayer de bâtir quelque chose de durable.

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