Selon PINNACLE, seuls 6 diabétiques américains sur 10 reçoivent des statines

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

15 septembre 2016

Houston, Etats-Unis — Les recommandations internationales préconisent de prescrire une statine en prévention primaire à tous les patients diabétiques. Mais, qu’en est-il vraiment sur le terrain ? C’est ce qu’ont voulu savoir le Dr Yashashwi Pokharel et coll (Houston, Texas) dans l’étude PINNACLE. Qu’en est-il en France ? Nos questions au Pr Bertrand Cariou.

Pour cela, les chercheurs ont analysé les prescriptions de statines chez des diabétiques de 40 à 75 ans sans maladie cardiovasculaire à partir du registre PINNACLE (Practice INNovation And CLinical Excellence) de l’American College of Cardiology [1]. Entre mai 2008 et octobre 2013, les dossiers électroniques de 215 193 patients provenant de 204 consultations de cardiologie ont été analysés.

 
Il y a une barrière au traitement optimal de la cible lipidique chez les diabétiques - Pr Bertrand Cariou.
 

Les recommandations ne sont pas suivies dans 4 cas sur 10

Globalement, seuls 61,6 % des patients avaient reçu une statine à un moment du donné du suivi. Quatre patients diabétiques sur 10 n’en recevaient donc pas.

Comparés à ceux qui ne recevaient pas de statines, ceux qui en recevaient avaient plus de facteurs de risque cardiovasculaire, recevaient plus de traitements hypolipémiants « hors statines » (28 % vs 13 %) et avaient un taux moyen de cholestérol LDL moins élevé (90 mg/dl vs. 103 mg/dl).

Et en France ?

Interrogé sur l’ensemble de ces résultats durant lecongrès européen de diabétologie EASD 2016 , le Pr Bertrand Cariou (endocrinologue, Hôpital Guillaume & René Laennec, Nantes) estime que « la situation est similaire en France » et que « cela signifie qu’il y a une barrière au traitement optimal de la cible lipidique chez les diabétiques. »

« La question (de la prescription de statine) se pose pour les diabétiques de type 1 de courte évolution, chez qui, je pense, il faut mieux caractériser le risque cardiovasculaire. En revanche, la réticence à prescrire des statines chez le diabétique de type 2 est beaucoup plus inquiétante parce que ces patients ont clairement un risque cardiovasculaire augmenté », commente l’endocrinologue français.

« Plusieurs études l’ont clairement montré. Dans l’étude CARDS, une dose modérée de statine versus placebo diminue très clairement ce risque. Dans l’étude TNT, une statine forte dose versus une statine à dose modérée apporte un bénéfice dans le sous-groupe de diabétiques. Enfin, dans l’étude IMPROVE IT, l’analyse de sous-groupe montre que les bénéfices de l’association ézétimibe + statine sont plus importants chez les diabétiques », précise-t-il.

Comment expliquer ce taux de prescription en deçà des attentes ?

Pour expliquer ces résultats, les chercheurs évoquent l’hypothèse de l’intolérance aux statines ou de la peur des effets secondaires mais, ils précisent qu’ils n’ont pas eu accès aux données concernant la tolérance des statines.

Interrogé sur ce point, le Pr Cariou pense qu’il s’agit d’une explication très plausible pour la France, « où il y a clairement une campagne anti-statine avec un focus sur les effets secondaires. »

Le diabétologue nantais suggère également que « les recommandations ont peut-être été trop agressives chez les diabétiques de type 2 sans niveau de réflexion d’adaptation au risque, cela qui a pu être clivant chez les médecins ».

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