Un défibrillateur pour tous les insuffisants cardiaques? Non, répond DANISH

Dr Catherine Desmoulins

Auteurs et déclarations

28 août 2016

Rome, Italie –Ironie du calendrier : l’essai DANISH portant sur l’intérêt de l’implantation prophylactique d’un défibrillateur à des patients souffrant d’une insuffisance cardiaque d’origine non ischémique, présenté au congrès de l’European Society of Cardiology 2016 est neutre….alors même que les nouvelles recommandations de l’ESC viennent d’accorder au DAI une indication de classe 1B pour l’insuffisance cardiaque symptomatique (quelle que soit son origine). Ces résultats sont publiés assortis d’un éditorial dans le New England Journal of Medicine. [1, 2].

Faut-il changer les recommandations ? « Pas question, du moins pour l’instant », répondent les experts « car les plus jeunes continuent de bénéficier du DAI. Avec l’âge (après 68 ans dans DANISH), il faut bien mourir de quelque chose ». En d’autres termes, le DAI prévient la mort subite et c’est tout. Ses indications chez l’insuffisant cardiaque dont l’origine est non ischémique sont fonction du risque d’arythmie propre au patient et aux années qui lui restent à vivre.

DANISH (Danish randomized controlled multicenter study), mené comme son nom d’indique au Danemark par la Pr Lars Kober (Université de Copenhague) est un essai prospectif randomisé sur un millier de patients (556 et 560 dans chaque groupe).

« L’implantation d’un défibrillateur chez un insuffisant cardiaque présentant une réduction du volume d’éjection systolique gauche, dispose d’une indication de classe 1A aux Etats-Unis (AHA) et 1B en Europe (ESC) » a expliqué le Dr Kober. « Mais les études et les données pour les patients dont l’origine de l’IC n’est pas ischémique sont rares et les résultats souvent neutres. Nous avons donc réalisé une étude randomisée portant sur un critère dur : la mortalité de toutes causes, pour vérifier que l’indication à tous les IC se justifie. »

« Une étude à l’ère de la prise en charge moderne de l’insuffisance cardiaque »

Les patients inclus étaient des insuffisants cardiaques chroniques stables, avec une origine non ischémique. Il y a 27% (seulement) de femmes et l’âge moyen est de 63 ans. Tous étaient remarquablement bien traités : 96% sous IEC/ARA II, 92% sous BB, 59% sous anti-aldostérone. De plus, 58% dans chaque groupe bénéficiaient d’une resynchronisation cardiaque.

A l’issue d’un délai moyen de 67,6 mois (5 ans), le critère de jugement primaire (décès de toutes causes) n’a pas présenté de réduction significative dans le groupe avec DAI actif : 21,6 % DAI vs 23,4% (contrôles). Le critère de jugement secondaire portant sur les morts subites était, lui, réduit de moitié chez les porteurs de DAI (4,3% vs 8,2%). Ces résultats étaient indépendants de l’existence ou non d’une resynchronisation.

« La seule différence majeure qui sort dans cette étude est liée à l’âge : les moins de 68 ans tirent profit du DAI en termes de mortalité de toute cause » a précisé le Dr Kober « ce qui suggère que le DAI se justifie dans cette sous-population ».

« On garde les recommandations »

« Les recommandations sont basées sur toutes les données de la littérature et tous types d’études » s’est expliqué la Dr Frank Ruschitzka (Zurich, Suisse). On voit avec ce travail que la prise en charge de l’insuffisance cardiaque a considérablement évolué comparativement aux premiers essais avec les défibrillateurs. Les patients ont un taux de mortalité annuel de 13% ce qui est bas. Mais on ne va, pour autant, revenir sur les recommandations car les plus jeunes en tirent bénéfice et on ne peut pas exclure formellement une origine ou une participation ischémique pour certaines insuffisances cardiaque. »

Egalement interrogée sur la question et sur le fait que l’AHA a même donné une recommandation de classe 1A au DAI en cas d’IC symptomatique le Dr Mariell Jessup, présidente de l’AHA (Philadelphie), a également indiqué que « c’est la première étude menée dans des conditions modernes de prise en charge de l’insuffisance cardiaque mais qu’il serait prématuré de revenir, à ce stade, sur les recommandations », rappelant qu’aux Etats-Unis, seulement 13% des insuffisants cardiaques symptomatiques ont reçu un défibrillateur.

Au final donc, le DAI empêche de décéder d’une mort subite mais pas de mourir.

L Kober a déclaré des activités avec Novartis et Sanofi mais sans rapport avec cette présentation.


DANISH est une étude soutenue par : Medtronic, St Jude Medical, TrygFonden, et la Danish Heart Foundation.

REFERENCES:

1-Køber L, Thune JJ, Nielsen JC, et al. Defibrillator implantation in patients with nonischemic systolic heart failure. N Engl J Med 2016; DOI:10.1056/NEJMoa1608029. Article

2-McMurray JJV. The ICD in heart failure—time for a rethink? N Engl J Med 2016;DOI:10.1056/NEJMe1609826. Available at: EditorialLIENS

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