Dépression résistante : penser au syndrome d'apnées du sommeil!

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

12 août 2016

Garches, France — D’après l’étude STAR*D (Sequenced Treatment Alternatives to Relieve Depression), un tiers des patients atteints de dépression modérée à sévère ne répondent pas aux antidépresseurs. Ce taux élevé peut être lié à un mauvais diagnostic (ex : trouble bipolaire) mais aussi à différentes comorbidités.

Le Dr Sylvie Royant Parola (Psychiatre, Responsable du centre d'exploration du sommeil à la clinique médicale du château de Garches, Présidente du Réseau Morphée) revient sur l’une d’entre elle : le syndrome d’apnées du sommeil (SAOS) et insiste sur l’importance de la traiter pour améliorer les symptômes dépressifs.

Medscape -Pourquoi rechercher un syndrome d’apnées du sommeil chez un patient dépressif ?

Dr S Royant Parola - Dans un bon nombre de cas, les dépressions résistantes aux antidépresseurs sont associées à un syndrome d’apnées du sommeil.

Or, nous nous sommes rendu compte que chez certains patients, le fait de diagnostiquer un SAOS et de le traiter améliorait les symptômes dépressifs.

Le problème est de taille car d’après une récente méta-analyse, entre 30 et 40 % des patients déprimés souffriraient aussi d’apnées du sommeil [1]. Par comparaison, dans la population générale, l’incidence des apnées du sommeil est de 5 à 12 %.

Nous nous sommes rendu compte que chez certains patients, le fait de diagnostiquer un SAOS et de le traiter améliorait les symptômes dépressifs.

Comment expliquer que de nombreux patients dépressifs souffrants d’apnées du sommeil résistent aux antidépresseurs ?

C’est le polymorphisme de la maladie qui est en cause. Ici, la dépression n’est pas simplement liée à un trouble de l’humeur mais aussi à une comorbidité qui n’est pas repérée au moment du diagnostic.

Une des hypothèses est que chez certains patients souffrant d’apnées du sommeil, le mécanisme de la dépression serait plutôt d’ordre vasculaire. L’antidépresseur ne serait donc pas, ou seulement en partie, adapté.

Aujourd’hui, nous savons qu’il existe des mécanismes communs entre la dépression, les apnées du sommeil et les troubles métaboliques. Il s’agit de processus d’inflammation probablement liés au stress qui induisent des modifications de l’axe hypothalamo-hypophysaire.

En cas de dépression résistante, il faut donc rechercher systématiquement la présence d’un SAOS. Puis, il faut le traiter pour éviter l’hypertonie sympathique avec augmentation des éveils et désaturation en oxygène.

Comment repérer un syndrome d’apnées du sommeil chez un patient dépressif ?

Le problème est que cliniquement, le SAOS et la dépression se ressemblent, les apnées du sommeil passent donc souvent inaperçues. Les tableaux cliniques sont sensiblement les mêmes : fatigue, somnolence, troubles du sommeil, prise de poids... Le fait qu’un patient ronfle peut aider au diagnostic mais encore faut-il qu’il ne dorme pas seul et que la personne avec qui il vit soit gênée par le ronflement.

En pratique, il faut nécessairement réaliser une polysomnographie. Chez un patient déprimé qui a un sommeil fractionné, la polygraphie ventilatoire n’est pas le bon examen. En effet, les apnées observées chez les patients dépressifs ont souvent une typologie particulière. Il s’agit d’hypopnées qui désaturent peu mais qui fractionnent énormément le sommeil.

Le Dr Royant Parola n’a pas de liens d’intérêt en rapport avec le sujet

REFERENCE:

1. BaHammam AS et coll. Comorbid depression in obstructive sleep apnea: an under-recognized association. Sleep and Breathing. 9 juillet 2015.

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