Parmi les autres facteurs de confusion explicables quant à l’implication de l’alcool dans la survenue de cancers vient le fait que toutes les localisations ne sont pas ou peu affectées. C’est le cas des adénocarcinomes de l’estomac, des cancers de l’endomètre et de la vessie. Cela pose la question de savoir pourquoi l’alcool affecte certains cancers et pas d’autres, une hétérogénéité là encore en défaveur de la conclusion, « l’alcool cause le cancer ».
Enfin, le fait que l’alcool soit en cause dans la survenue du cancer alors que des bénéfices ont été évoqués dans les maladies cardiovasculaires, – un effet protecteur dont le Pr Connor doute grandement et qu’elle attribue aux facteurs confondants résiduels – participe lui aussi au flou.
La chercheuse reconnait que les études épidémiologiques, essentiellement observationnelles qui prévalent pour étudier les liens entre alcool et cancer ne sont pas les plus aptes à établir des liens de causalité - d’où l’intérêt, selon elle, de les ré-analyser à la lumière des nouvelles publications. De fait, elle admet, dans ce contexte, une certaine difficulté, à affirmer une relation directe. Pas dupe pour autant, elle n’hésite pas à dénoncer « des tentatives orchestrées pour discréditer la science et les chercheurs et embrouiller le grand public » et pointe du doigt l’industrie des alcooliers qui doit faire face à des « enjeux élevés quand il n’y a pas d’argument ou de preuves d’une consommation d’alcool sans danger au regard du risque de cancer ».
Responsabilité d’informer
Dans un communiqué, l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA) a rebondi sur cette analyse du Pr Connor (et non d'une équipe de chercheurs néo-zélandais comme indiqué) et dénonce, elle aussi, des affirmations fausses telles que : "Un consensus existe sur les bénéfices d’une consommation modérée de vin sur la survenue du cancer colorectal et du cancer de l’œsophage" figurant sur le site du lobby alcoolier Vin & Société [2]. « Ces allégations totalement fausses sur le plan scientifique n'ont pour objectif que de minorer les dangers de l’alcool pour protéger des intérêts économiques au détriment de la vérité scientifique et de la santé de la population » souligne l'ANPAA.
Par la voix de Colin Shevills, l’Alcohol Health Alliance UK a, elle aussi, dans un communiqué [3], mis en avant l’intérêt de la publication du médecin néo-zélandais, précisant que « qu’environ 1 personne sur 10 est consciente du lien entre l’alcool et le cancer ». Pour l’association britannique, « les gens ont le droit de connaitre l’impact de l’alcool sur leur santé, y compris le lien avec le cancer, de façon à faire des choix avisés quant à la quantité d’alcool qu’ils consomment » et le gouvernement a la responsabilité de les informer.
Invités à commenter l’analyse du Pr Connor, trois experts anglais ont, quant à eux, insisté sur la nécessité de mieux communiquer ces informations – déjà connues des scientifiques mais qui ont le mérite d’être ici résumées et mises à jour – auprès du public [4].
REFERENCES:
Connor J. Alcohol consumption as a cause of cancer. Addiction 2016, doi:10.1111/add.13477
Alcool et cancer. Les preuves s'accumulent. Vin & Société désinforme. ANPAA, 1er août 2016.
AHA response to new review concluding the evidence for alcohol causing cancer is strong, 22 july 2016.
Expert reaction to research on alcohol and cancer , SCM, 22 july 2016.
Actualités Medscape © 2016
Citer cet article: Stéphanie Lavaud. L’alcool, directement en cause dans 7 cancers - Medscape - 5 août 2016.
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