Les vagues de chaleur augmentent le risque d'arrêts cardiaques extrahospitaliers

Aude Lecrubier, Pam Harrison

Auteurs et déclarations

19 juillet 2016

Seongnam, République de Corée — Des fortes températures pendant deux jours de suite augmentent le risque d’arrêts cardiaques hors hôpital de 14 %, selon une étude coréenne [1]. Sans surprise, les plus de 65 ans sont les plus touchés.

Ces résultats, publiés dans l’International Journal of Cardiology du 5 juillet 2016, confortent ceux d'une équipe française, publiés en 2006, qui ont montré que le risque d'arrêts cardiaques hors de l'hôpital avait été multipliés par 2,5 pendant la canicule de 2003 par rapport aux périodes estivales de 2000 à 2005  [2].

Ce que l'on sait

Les chaleurs extrêmes sont associées à une augmentation de la mortalité et de la morbidité comme l’a montrée la canicule de 2003, en Europe, qui a été responsable de 70 000 décès prématurés [3,4,5,6]

 
La mortalité cardiovasculaire représente plus de la moitié de la surmortalité lors des vagues de chaleur.
 

Or, la mortalité cardiovasculaire représente plus de la moitié de la surmortalité lors des vagues de chaleur [7,8,9].

Pourtant, plusieurs études ont montré que les hospitalisations cardiovasculaires pour IDM, arythmies cardiaques et insuffisance cardiaque n’étaient pas affectées par les canicules. « Nos résultats [hors hôpital] pourraient expliquer ces données apparemment paradoxales », expliquent les Dr Si-Hyuck Kang et coll. (Seoul National University College of Medicine, Seongnam, République de Corée).

Les chercheurs coréens soulignent que les conséquences des fortes températures sur la santé et notamment sur les arrêts cardiaques attirent de plus en plus l’attention en raison du réchauffement climatique.

En outre, comme dans d’autres pays, la Corée observe une augmentation de l’incidence annuelle des arrêts cardiaques : 37,5/100 000 personnes en 2006 à 46,5/100 000 en 2010.

Des chiffres particulièrement préoccupants alors que la mortalité par arrêts cardiaques en Corée est de 97 %.

Une étude sur 7 villes de plus d'un million d'habitants pendant 7 ans

Si le rapport entre les arrêts cardiaques et les faibles températures a été plusieurs fois mis en évidence, le lien avec les fortes températures a été peu étudié, précisent les chercheurs.

Pour tenter d'y voir plus clair, l'équipe coréenne a utilisé la base de données médicales nationale des urgences. Elle a ainsi pu identifier 50 318 cas d'arrêts cardiaques hors de l'hôpital de janvier 2006 à décembre 2013 dans 7 villes coréennes de plus d'un million d'habitants. L'âge moyen de la cohorte était de 66,1ans et approximativement les deux tiers étaient des hommes.

Un pic de chaleur était défini par une température journalière moyenne au-dessus du 98ème percentile de la distribution de l'année pendant au moins deux jours consécutifs.

"En utilisant cette définition, une augmentation de 14 % du risque d'arrêts cardiaques hors de l'hôpital a été observée avec les pics de températures moyennes ou maximales", indiquent le Dr Kang et coll.

Aussi, les arrêts cardiaques hors de l'hôpital augmentaient de 16 % lorsque les températures dépassaient 35 °C pendant 48 heures d’affilée.

Logiquement, les pics d'arrêts cardiaques survenaient entre 15 heures et 17 heures, au moment où les températures étaient les plus élevées.

Plus surprenant, bien que le risque augmentait avec le nombre de jours de chaleur, l’effet cumulatif était relativement faible, notent les chercheurs.

Une courbe en J

Le risque d'arrêts cardiaques hors de l'hôpital était plus faible pour une température moyenne de 22,5 °C mais le risque minimal d'avoir un arrêt cardiaque était observé pour une température de 28 °C.

 
Lorsque la température dépasse 28°C, nous avons vraiment une augmentation du risque d'arrêts cardiaques extrahospitalier. Dr Benjamin Abella
 

"Ce n'est pas que 28 °C soit protecteur mais plutôt que le stress augmente avec les températures [...]  Le message à retenir est que lorsque la température dépasse 28°C, ce qui arrive dans de nombreux pays, nous avons vraiment une augmentation du risque d'arrêts cardiaques extrahospitalier", a commenté le Dr Benjamin Abella (Université de Pennsylvanie) pour Medscape.

Un effet de l'âge mais pas des arythmies et de la pollution

Selon une analyse de sous-groupes, les adultes d'au moins 65 ans étaient significativement plus à risque d'arrêts cardiaques hors de l'hôpital pendant la vague de chaleur (p=0;039).

Les personnes âgées ne réagissant pas aux signes et aux symptômes de déshydratation aussi bien que les jeunes, il n'est pas étonnant qu'ils soient particulièrement à risque, expliquent les auteurs.

En revanche, les arrêts cardiaques avec tachycardie ventriculaire ou fibrillation auriculaire n'étaient pas affectés par les fortes températures.

Enfin, les effets de la vague de chaleur sur l'incidence des arrêts cardiaques ne variaient pas significativement après ajustement pour la pollution de l'air.

Les auteurs et le Dr Abella n'ont pas de liens d'intérêt en rapport avec le sujet.

 

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