POINT DE VUE

Quantifier la fibrose du tissu adipeux pour prévenir la stéatose hépatique non alcoolique?

Pr Karine Clément

Auteurs et déclarations

14 juillet 2016

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Le Pr Karine Clément explique comment la mesure de la fibrose dans le tissu adipeux permettrait de mieux identifier les patients obèses à risque de stéatose hépatique non alcoolique (NASH).

Enregistré le 13 juin 2016, à la Nouvelle-Orléans, LA, É.-U.

TRANSCRIPTION

Bonjour, je suis le professeur Karine Clément et je travaille à la Pitié-Salpêtrière, à l’Institut de Cardiométabolisme et Nutrition. J’ai présenté nos travaux sur la fibrose du tissu adipeux et du foie dans une session[1] du congrès américain du diabète, l’ADA (American Diabetes Association) .

Nous avons découvert, il y a maintenant quelques années, que lors de la progression de l’obésité, le tissu graisseux se modifie.[2]  Il y a des changements extrêmement importants dans la taille des cellules, notamment les adipocytes -- qui sont les cellules spécialisées dans le stockage de la graisse -- augmentent. Un gros adipocyte va contribuer à la production de molécules de l’inflammation. Il y a également une accumulation de cellules de l’inflammation dans le tissu adipeux qui va entraîner des perturbations importantes de la biologie et, ce qui est relativement récent, l’accumulation de fibrose dans la graisse.

Alors on peut se demander pourquoi cette fibrose s’accumule. Est-ce ennuyeux d’un point de vue clinique? Quelles sont les relations avec les complications de l’obésité, en particulier des anomalies hépatiques (inflammation hépatique, fibrose du foie)? Ce que nous avons montré, c’est qu’il existe des personnes qui ont une capacité importante à accumuler des fibres, donc de la fibrose dans le tissu adipeux. Cette fibrose va entrainer une rigidification de la graisse, ce qui peut paraître un petit peu surprenant pour le tissu adipeux, qui est vu comme un tissu mou. Cette rigidification peut être mesurée par une sonde, qui est comme une échographie, dans laquelle on va regarder la relation entre l’accumulation des fibres, donc la fibrose, et le signal, la rigidification du tissu adipeux. On aboutit alors à une notion assez intéressante qui rejoint la clinique : les personnes qui ont une accumulation de fibrose dans la graisse, et donc un tissu plus rigide, vont moins perdre du poids suite à une intervention, par exemple comme la chirurgie bariatrique. Lorsqu’on regarde la perte pondérale après chirurgie bariatrique, on voit des personnes qui perdent beaucoup de poids, très rapidement, et d’autres qui ont plus de difficulté à perdre du poids. Chez ces derniers, nous avons observé une accumulation de fibrose, mesurée avant l’intervention, c.-à-d. avant la chirurgie bariatrique.[3]

Nous sommes donc arrivés à cette notion de pouvoir quantifier la fibrose, en particulier les liens avec la rigidité du tissu adipeux. On a deux grands concepts :

  • Un concept de « graisse molle »: dans le cas d’une graisse molle, les personnes ont une plus grande capacité d’expansion du tissu graisseux. Au cours de leur trajectoire de vie, ces personnes vont relativement protéger les autres organes, puisque la graisse va se stocker là où elle doit être, c’est-à-dire dans le tissu adipeux.  Et donc par exemple le foie et le muscle vont être protégés des dépôts de graisse qui sont délétères pour la résistance à l’insuline et le diabète.

  • Au contraire, il y a des gens qui ont ce concept qu’on pourrait appeler de « graisse plus dure »: Ils vont avoir moins de capacité, en particulier à cause de la fibrose, à stocker de la graisse sous la peau. Et quand on ne peut pas stocker du tissu graisseux sous la peau, on va le stocker ailleurs, en particulier dans le foie et dans le muscle. Dans le foie, ces lipides, ces tissus graisseux qui vont s’accumuler, vont faire le lit de l’inflammation et de la fibrose. C’est ce qu’on appelle aujourd’hui l’hépatite non-alcoolique des personnes obèses, qui est un facteur de risque de diabète et de fibrose. Certaines personnes vont malheureusement évoluer vers la cirrhose. Aujourd’hui, il y a un vrai enjeu de mieux connaitre les relations entre les changements du tissu graisseux, sa capacité d’expansion, les cellules inflammatoires, la fibrose et les complications de l’obésité, en particulier l’hépatite non-alcoolique des personnes obèses.

On voit bien qu’il y a une augmentation du nombre de personnes atteintes par ces pathologies hépatiques et il y a donc [un intérêt à] mieux en comprendre les mécanismes pour:

  • établir tout d’abord des diagnostics. Quels sont les gens qui vont évoluer vers la maladie hépatique? Quels sont ceux qui vont être protégés à un moment donné?

  • identifier de nouveaux traitements pour empêcher le développement de cette fibrose dans le foie qui fait le lit de la cirrhose et de nombreuses autres complications.

 

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