Moins 10 minutes de sommeil en zone urbaine très éclairée

Vincent Bargoin, avec Pauline Anderson

Auteurs et déclarations

4 mai 2016

Vancouver, Canada – L’intense éclairage nocturne que l’on rencontre en milieu urbain, nuit au sommeil, avec des répercussions sur la vigilance diurne. La notion est assez évidente, et tout un chacun l’a un jour (une nuit) ou l’autre expérimentée à ses dépens, mais elle est maintenant démontrée. Selon des résultats présentés lors du congrès de l’American Academy of Neurology, AAN 2016, la durée de sommeil est réduite d’une dizaine de minutes en zone très éclairée, et la prévalence des troubles du sommeil y est plus élevée.

Dirigée par le Pr Maurice M. Ohayon (Stanford University Sleep Epidemiology Research Center, Etats-Unis), l’étude a été menée de 2002 à 2009 auprès de 15863 personnes, résidants aux Etats-Unis, et interrogées par téléphone sur leurs habitudes de sommeil les jours de semaines et le week-end. Le questionnaire portait sur la semaine passée, le mois passé et l’année écoulée. Il comportait aussi des questions permettant d’évaluer les habitudes alimentaires, les éventuelles pathologies somatiques et psychiatriques, et le niveau de stress.

Ces données, rapportées à l’adresse de chaque interviewé, ont été croisées avec celles du Defense Meteorological Satellite Program's Operational Linescan System, qui mesure, entre autres, les émissions lumineuses nocturnes en tous points du territoire américain.

 
Pratiquement 4% de la somnolence diurne serait donc due à l’éclairage nocturne dans l’environnement -- Pr Maurice M. Ohayon
 

« La seule différence entre zones urbaines et zones rurales concerne le niveau d’éclairage des rues », précise le Dr Ohayon.

Résultat, après ajustements sur toutes les variables, y compris le stress, le niveau d’éclairage est effectivement associé avec l’heure de coucher et de lever (p<0,0001), ainsi qu’avec un raccourcissement de la durée de sommeil : 402 minutes par nuit en zone très éclairée vs. 412 minutes en zone faiblement éclairée (p<0,01).

Le retentissement diurne est également très significatif, avec un accroissement de la somnolence durant la journée, et de la probabilité de présenter un désordre du rythme circadien (p<0,0001 pour les deux variables).

Parmi les personnes vivant en zone très éclairée, 16% se déclaraient d’ailleurs insatisfaits de la quantité et de la qualité de leur sommeil, contre 7,2% en zone peu éclairée (p<0,0001).

S’agissant de la somnolence diurne notamment, l’écart est important (6,1% vs. 1,9%). « Pratiquement 4% de la somnolence diurne serait donc due à l’éclairage nocturne dans l’environnement », souligne le Dr Ohayon, en rappelant les conséquences de cette somnolence en termes d’accidents de la circulation, d’inefficacité au travail, d’irritabilité et de dépression.

L’éclairage public a bien sûr des effets positifs en termes de sécurité, mais « il n’y a plus de nuit ». Ce « débordement du jour sur la nuit est un problème de santé publique ».

 

L’étude a été financée par les fondations John Arrillaga, Peter Bing et Philip Stein.

 

Commenter

3090D553-9492-4563-8681-AD288FA52ACE
Les commentaires peuvent être sujets à modération. Veuillez consulter les Conditions d'utilisation du forum.

Traitement....