Le lien entre migraine et intestin irritable se confirme

Vincent Bargoin, avec Megan Brooks

Auteurs et déclarations

3 mai 2016

Vancouver, Canada –     L’intestin, « second cerveau » ? Des liens semblent en tout cas exister entre migraine et syndrome de l’intestin irritable (SII). La relation a en fait déjà été largement observée. Mais des résultats présentés lors du congrès de    l’American Academy of Neurology 2016 (AAN 2016) montrent     qu’au-delà, ou en deçà de l’épidémiologie, des traits génétiques sont partagés, qui pourraient mettre sur la voie de mécanismes physiopathologiques.

Interrogé par Medscape International, le premier auteur le Dr Derya Uluduz (Université d’Istanbul, Turquie), a souligné qu’il     s’agit de « la première étude à se pencher sur la relation entre SII et migraines en croisant les données d’une évaluation clinique et des informations sur     les polymorphismes génotypiques du gène codant le transporteur de la sérotonine et du gène codant le récepteur 2A à la sérotonine ».

Chez les patients présentant des migraines ou des céphalées de tension, les médecins doivent rechercher un syndrome de l’intestin irritable, et vice versa     -- Dr Derya Uluduz

En pratique, « pour mieux comprendre ces pathologies et prendre en charge les patients, il faut rechercher les comorbidités : chez les patients présentant     des migraines ou des céphalées de tension, les médecins doivent rechercher un syndrome de l’intestin irritable, et vice versa ».

Le métabolisme de la sérotonine en cause dans les deux pathologies

L’étude a été menée chez 107 sujets migraineux, 53 sujets présentant des céphalées de tension (CT) épisodiques, 107 sujets présentant un syndrome de     l’intestin irritable (SII), et 53 sujets ne présentant aucune de ces pathologies.

Les associations épidémiologiques attendues sont bien là, puisqu’un SII, diagnostiqué selon « des critères stricts », est retrouvé chez 54% des sujets     migraineux, et 28% des sujets présentant des CT.

Inversement, 35,5% des sujets présentant un SII étaient aussi migraineux, et 22% présentaient des CT épisodiques.

Enfin, le génotype des sujets atteints de migraine, de CT et/ou de SII, présente des écarts avec le génotype des sujets sains au niveau des deux gènes     impliqués dans le métabolisme de la sérotonine.

Anomalie du transporteur de la sérotonine
           S’agissant du gène du gène du transporteur de la sérotonine, l’analyse porte sur une région promotrice, dite 5-HTTLPR (5-hydroxytryptamine         transporter-linked polymorphic region) qui contrôle le niveau d’expression du transporteur. Dans cette région, on peut trouver deux polymorphismes dits         VNTR (Variable Number Tandem Repeat) : l’un, long (L) correspond à une insertion, l’autre, court (S), à une délétion de répétitions. L’allèle S est         associé à une expression diminué du transporteur par rapport à l’allèle L. Sur le plan phénotypique, le génotype SS est par ailleurs associé, quoique         de manière inconstante, à divers traits addictifs (alcool, tabac), parfois à la dépression face à l’adversité.

Chez les patients migraineux, ainsi que chez les sujets présentant des CT, la distribution des génotypes diffère significativement de ce que l’on observe     chez les sujets normaux.

L’observation est en accord avec l’expérience clinique, qui montre une certaine efficacité des antidépresseurs à visée sérotoninergique à la fois dans la     migraine et dans le SII.

S’agissant du gène codant le récepteur 5-HT2A, l’analyse a porté sur un polymorphisme G/A en 1438, qui a été associé à des troubles divers, de la     dysfonction sexuelle chez les sujets déprimés aux apnées du sommeil.

C’est cette fois les sujets atteints de SII qui présentent un écart dans la distribution de ce polymorphisme de 5-HT2A par rapport aux sujets     contrôle.

On est évidemment loin de pouvoir déduire de ces résultats les mécanismes physiopathologiques partagés par la migraine et le SII.

Toutefois, on trouve dans les deux cas des particularités génétiques en rapport avec le métabolisme de la sérotonine. Et l’observation est en accord avec     l’expérience clinique, qui montre une certaine efficacité des antidépresseurs à visée sérotoninergique à la fois dans la migraine et dans le SII.

L’étude a été financée par l’Université de Mersin, Mersin, Turquie.

REFERENCE:

  1. Uluduz D et coll.                             A Link Between Migraine, Tension Type Headache and Irritable Bowel Syndrome: Clinical and Genetic Indicators                         . 68ème congrès de l’American Academy of Neurology.

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