Faut-il craindre le Zika en Europe cet été ?

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

27 avril 2016

Paris, France — Alors que l’épidémie de Zika est sur la pente descendante dans certains pays comme le Brésil, la Colombie ou le Cap Vert, le nombre de cas importés en Europe à partir du continent américain est en nette augmentation. Avec l’arrivée des beaux jours, favorables au développement des moustiques, doit-on craindre une épidémie de Zika ?

 
Le risque d’une pandémie de zika sur l’Europe du sud parait faible pour cette année – Pr Jean-François Delfraissy
 

« La possibilité d’une transmission par les moustiques associée à de probables transmissions par voie sexuelle devrait se traduire par une augmentation du nombre de personnes infectées par Zika et des complications médicales liées à ce virus », a expliqué Marie-Paule Kieny (assistante du directeur général de l’OMS) lors d’une conférence de presse organisée à l’occasion du premier Colloque International sur le virus Zika à l’Institut Pasteur de Paris, les 25 et 26 avril 2016 [1].

Cependant, à ce stade de la recherche, le risque épidémique semble limité.

« Si l’on prend en considération les arguments scientifiques, les aspects socio-comportementaux et environnementaux : le risque d’une pandémie de zika sur l’Europe du sud parait faible pour cette année. En revanche, que l’on ait quelques cas autochtones comme l’année dernière pour le chikungunya, c’est fort probable », a commenté Jean-François Delfraissy (Inserm), lors de l’événement parisien.

En Europe ? Quels moustiques ? Par quelle porte d’entrée ?

En Europe, il semble que le virus Zika pourrait être véhiculé par Ae. albopictus et/ou Ae. aegypti. De fait, deux scénarii d’introduction du virus ont été explorés. Dans le premier cas, les voyageurs se déplaçant des départements français d’Amérique vers la métropole, pourraient être la source de la contamination via Ae. albopictus. Le moustique tigre est implanté dans 20 pays européens et 30 départements français. Il entre en activité dès le mois de mai.

Dans la seconde hypothèse, le point de départ serait l’île de Madère, qui entretient des échanges importants avec le Brésil et le Venezuela. Le moustique Ae. aegypti, qui y est présent depuis 2005, a été impliqué dans l’épidémie de dengue de 2012, la plus importante des dernières flambées en Europe.

Pour tester ces deux hypothèses, des chercheurs de l’Institut Pasteur, au sein de l’unité Arbovirus et insectes vecteurs, dirigée par Anna-Bella Failloux, en collaboration avec des chercheurs portugais, ont évalué la capacité à transmettre le virus de quatre populations de moustiques : deux populations d’Ae. aegypti de l’île de Madère (Funchal et Paul do Mar de Madeira), et deux populations d’Ae. albopictus du Sud de la France (Nice et Bar-sur-Loup).

 
L’hypothèse d’un scénario se limitant à l’île de Madère est donc la plus probable.
 

Les scientifiques ont infecté les femelles de moustiques avec le virus Zika de génotype asiatique, équivalente à celle qui circule actuellement au Brésil.

Les résultats montrent qu’Ae. aegypti transmet mieux le virus qu’Ae. albopictus. Chez Ae. aegypti, le virus ne met que 9 jours à effectuer un cycle complet, et à atteindre les glandes salivaires de l’insecte, prêt à être inoculé à un nouvel hôte lors d’une piqûre. Ae. albopictus, lui, réalise ce même cycle en 14 jours, ce qui limite sa transmission. L’hypothèse d’un scénario se limitant à l’île de Madère est donc la plus probable.

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