Autotests génétiques et big data : qui veut gagner des millions?

Aude Lecrubier, Damian McNamara

Auteurs et déclarations

12 avril 2016

La Jolla, Etats-Unis – Aux Etats-Unis, où certains types d’autotests génétiques sont désormais autorisés ( voir notre article) par la FDA, 23andMe, leader du marché compte bien faire fructifier les millions de données génétiques dont elle dispose. Les enjeux économiques derrière le big data génétique sont énormes [1].

Montée en puissance d’une société de biotechnologie pas comme les autres

La société 23andMe, leader du marché des autotests, a des aspirations de géants. Rien de surprenant, peut-être, pour une société dont la co-fondatrice, Anne Wojcicki, n’est autre que l’ex-femme de Serge Brin, co-fondateur de Google.

Google a d’ailleurs investi 3,9 M$ dans 23andMe.

Créée en 2007, la société avait dû revoir ses ambitions à la baisse en 2013 suite à l’injonction de la FDA de cesser la commercialisation de ses 122 tests évaluant les risques de développer une maladie (Alzheimer, cancer du sein…) et de ses 25 tests évaluant la réponse aux médicaments (metformine, statines…). Depuis lors, 23andMe s’était contentée de vendre des autotests « light » offrant la possibilité de découvrir son degré de parenté avec l’homme de Neandertal ou ses prédispositions à l’intolérance au lactose ou à l’alcool.

Revirement de situation, fin 2015, 23andMe a été la première société à recevoir un feu vert de la FDA pour la commercialisation d’un autotest de diagnostic médical évaluant le risque de transmission héréditaire du syndrome de Bloom. Depuis, elle commercialise des tests permettant de détecter le risque de transmettre 36 maladies génétiques récessives autosomiques à sa descendance (syndrome de Bloom, mucoviscidose, drépanocytose, maladie de Tay-Sachs...) [2]. Le tout pour 199 dollars, seulement.

Une mine de données

Mais, pourquoi des startups aussi ambitieuses que 23andMe et ses concurrents commercialisent-ils leurs autotests diagnostics à prix cassés ? Parce que le séquençage de l’ADN a bénéficié d’énormes progrès techniques au cours des dernières années, certes. Mais aussi, parce que l’argent attendu de la vente directe des tests n’est que la partie immergée de l’iceberg. Celui attendu de l’amoncellement de données génétiques recueillies dans la perspective de développer de nouveaux médicaments est beaucoup plus important.

Nous collectons environ 2 millions de données par semaine -- Anne Wojcicki

Avec leur consentement, 23andME collecte les données de ses utilisateurs. 23andMe offre à tous ses clients la possibilité de participer à la recherche médicale et plus de 80 % de ses 1,2 millions de clients ont accepté d’y participer, a expliqué Anne Wojcicki lors du congrès Future of Genomic Medicine (FOGM) IX, le 3 mars 2016.

Elle rapporte des chiffres qui feraient pâlir d’envie de nombreux investigateurs : 243 000 porteurs du variant génétique APOE e4, 191 000 patients atteints de maladies cardiovasculaires, 159 000 patients souffrant de dépression, 90 000 asthmatiques, 78 000 patients cancéreux, 35 000 atteints de psoriasis…

« Nous pouvons vraiment recueillir des données de haute-qualité de nos utilisateurs. Nous collectons environ 2 millions de données par semaine », précise-t-elle.

« Je me sens parfois un peu coupable d’être assis sur autant d’informations. Nous sentons que nous avons une responsabilité », commente la femme d’affaires.

Deux fois par an, 23andMe donne accès à ses données à la recherche académique et sélectionne ensuite des projets de recherche qu’elle finance.

La création de son propre laboratoire

Nous faisons notre propre recherche de nouveaux médicaments -- Anne Wojcicki

Récemment, 23andMe a lancé sa propre division pharmaceutique. Un pas de plus vers l’Eldorado du big data génétique.

« Les données accumulées vont nous permettre d’étudier le génome et de favoriser la découverte de médicaments plus efficaces », explique Anne Wojcicki.

« Nous avons des partenariats avec l’industrie pharmaceutique et nous faisons notre propre recherche de nouveaux médicaments. Nous ciblons ceux qui ne coûteront pas 2 milliards de dollars en recherche et développement », précise la co-fondatrice de 23andMe.

REFERENCES :

  1. Future of Genomic Medicine (FOGM) IX. 3 mars 2016.

  2. FDA permits marketing of first direct-to-consumer genetic carrier test for Bloom syndrome . 19 février 2015

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