HOPE 3 : en l’absence d’HTA, un traitement hypotenseur n’a pas d’effet préventif CV

Vincent Bargoin

Auteurs et déclarations

5 avril 2016

Effet délétère chez les sujets à PAS basse ?

Un traitement antihypertenseur à faible dose n’a donc strictement aucun intérêt dans une population dite à risque intermédiaire, vieillissante, présentant au moins un facteur de risque, ce qui est pratiquement la norme dans la tranche d’âge considérée, mais dépourvue de risque spécifique.

La question reste ouverte pour le tertile de PAS le plus élevée (154 mm Hg en moyenne), sous-groupe dans lequel les deux critères primaires ressortent significativement. Mais elle se pose d’autant moins pour les PA moins élevées que ce bénéfice dans le 3eme tertile, sur fond de neutralité générale, suppose que dans HOPE 3, il est possible que les populations dont PA était basse au recrutement aient subit des effets délétères. Même si l’incidence des évènements n’était pas significativement plus élevée dans les sous-groupes de PAS basse et moyenne, il existe un gradient des risques relatifs que l’on peut trouver suggestif.

Risque relatif du critère primaire en fonction du tertile de PAS à l’entrée

PAD (moyenne) mm Hg

< 131,5 (122,2)

131,6-143,5 (137,6)

>143,5

RR critère primaire ; [IC 95%]

1,16 ; [0,82-1,63]

1,08 ; [0,80-1,46]

0,73 ; [0,56-0,94]

En conférence de presse, le Dr Lonn a parlé « d’effet délétère possible ».

Et versus SPRINT, ça donne quoi ?...

Alors que l’ACC prépare une révision de ses recommandations sur l’HTA, il va falloir gérer la contradiction avec l’étude SPRINT (Systolic Blood Pressure Intervention Trial), qui montrait, elle, qu’une cible de PAS de 120 mm Hg se solde par une réduction de 25% du risque relatif d’évènements CV, une réduction de 43% de la mortalité CV et de 27% de la mortalité générale, par rapport à la cible de 140 mm Hg. Cet essai, conduit par le National Heart, Blood and Lung Institute américain, avait été interrompu prématurément à 3 ans (au lieu de 5) par le comité de surveillance.

Lors d’échanges en conférence de presse, entre le Dr Lonn et le Dr Valentin Fuster notamment, les participants ont souligné deux différences entre HOPE 3 et SPRINT.

Premièrement, le recrutement à risque plus élevé dans SPRINT : 140/78 mm Hg (138,1/81,9 mm Hg dans HOPE 3), IMC moyen de 30 kg/m2 (27 dans HOPE 3), 17% d’affection CV clinique et 5% d’affection subclinique (pas d’affection CV connue dans HOPE 3), score de Framingham indiquant un risque d’évènement > 15% à 10 ans (61%), enfin, 30% d’afros-américains dont on connait la vulnérabilité à l’HTA (2% dans HOPE 3).

Au total, « le risque d’évènement sous placebo dans SPRINT était deux fois plus élevé que dans HOPE 3 » a résumé le Dr Lonn.

Deuxièmement, la baisse moyenne de PAS était de 13 mm Hg dans SPRINT, et de 6 mm Hg dans HOPE 3. Il n’était certes pas possible de baisser davantage la PAS dans la population tout venant de HOPE 3. Mais on comprend qu’une baisse deux fois plus importante dans une population deux fois plus à risque, ait abouti à un effet significatif.

La difficulté, maintenant, va être de traduire en recommandations pour des populations réelles, les différences entre populations incluses dans SPRINT et dans HOPE 3.

La tendance actuelle, en matière de prévention, est de justifier une prescription par un risque global, plus que par le franchissement d’un seuil chiffré. C’est ce qu’ont tenté les recommandations américaines de 2013 sur le cholestérol, qui renoncent aux seuils de LDL-C au profit du risque global comme critère d’indication d’une statine. S’agissant de son bras statine, l’étude HOPE 3 tend d’ailleurs à valider cette attitude. S’agissant du bras hypotenseur, en revanche, HOPE 3 montre qu’il n e faut pas traiter quand les chiffres ne sont pas là.

L’étude HOPE 3 a été financée par la Canadian Institutes of Health Research et par AstraZeneca.
Le Dr Lonn rapporte des liens d’intérêt avec AstraZeneca, Bayer, GlaxoSmithKline, Merck Schering, Eli Lilly, Amgen, Sanofi, et Novartis.
Les liens d’intérêt des autres auteurs figurant dans la publication.

 

REFERENCE :

  1. Lonn EM, Bosch J, Lopez-Jaramillo P, et coll. Blood-pressure lowering in intermediate-risk persons without cardiovascular disease. N Engl J Med 2016; DOI:10.1056/NEJMoa1600175. Article.

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