Toronto, Ontario et Cambridge, Massachusetts – Faut-il voir dans l’émergence de la e-santé une opportunité à saisir, un tournant économique inéluctable ou bien une véritable malédiction, selon que l’on se place du point de vue du consommateur/patient ou du professionnel ?
Deux experts nord-américains, les Drs Allan S. Detsky (University of Toronto Department of Medicine et Mount Sinai Hospital, Toronto, Ontario, Canada) et Alan M. Garber (Harvard University in Cambridge, Massachusetts) ont pris la plume dans le New England Journal of Medicine pour faire le point sur le niveau « d’ubérisation » de l’offre de soin aux Etats-Unis, tout en citant des exemples de « transformations » réussies. A ce stade, somme toute assez peu avancé, même aux Etats-Unis, faut-il résister, ignorer ou surfer avec la vague ?
L’ubérisation, c’est quoi ? Empruntés aux anglo-saxons, « uberisation » et « disruption » sont deux mots qui vont très bien ensemble. Mais de quoi parle-t-on exactement ? Le néologisme – dont la société de taxi et de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC) Uber est l'inspiratrice directe – décrit un phénomène récent qui consiste pour une start-up à utiliser les nouvelles technologies pour améliorer un service. L'exemple des taxis est particulièrement frappant. Il existait un véritable fossé entre l’offre– archaïque, insuffisante, chère – et la demande, dans lequel Uber s’est engouffré en proposant de commander son véhicule en quelques clics sur une application, de payer en ligne, à des coûts moindres, etc. Ce faisant, l’entreprise californienne a bousculé l'économie traditionnelle, hautement régulée, relevant du monopole d’état, d’où l’emploi du terme «disruption» (de l'anglais to disrupt qui signifie perturber). |
Un modèle pas si facilement applicable à la santé
Mais si le service des taxis était clairement susceptible d’être mis en concurrence – pour l’anecdote, l’idée est venue aux fondateurs lors d’un séjour à Paris –, quid du soin, « domaine a priori moins sensible, moins vulnérable aux éléments perturbateurs que ne peuvent l’être les taxis », écrivent les auteurs, et où les aspects réglementaires, juridiques, politiques et financiers d’un secteur hyper régulé ont de quoi décourager plus d’un concurrent. Sans compter qu’en santé, la qualité du « service » est essentielle, et que « les patients veulent avoir l’assurance d’obtenir un soin du meilleur niveau possible – s’assurer des compétences techniques du chirurgien, par exemple –, ce qui leur fait prendre un risque d’un tout autre ordre que celui d’opter pour un conducteur Uber plutôt qu’un taxi classique».
Citer cet article: Stéphanie Lavaud. Ubérisation de la médecine : ignorer, combattre ou rivaliser ? - Medscape - 16 mars 2016.
Commenter