Tampa, Etats-Unis -- Un nouveau concept de chimiothérapie adaptative vient de faire ses preuves dans le cancer du sein chez la souris. De quoi s’agit-il ? Plutôt que de tenter d’éliminer la tumeur avec des fortes doses de chimiothérapie, ce qui aurait tendance à favoriser le développement d’une résistance au traitement, administrer des petites doses régulièrement permettrait de garder la tumeur sous contrôle sur la durée.
Chez des modèles de souris atteintes de cancer du sein, l’équipe du Dr Robert Gatenby ( Moffitt Cancer Research Institute , Floride) a montré qu’administrer des faibles doses de paclitaxel régulièrement en fonction de la réponse au traitement augmentait la survie des animaux versus ceux qui avaient reçu des doses standards de paclitaxel.
Les résultats de l’étude sont publiés dans l’édition en ligne de la revue Science Translational Research du 24 février [1].
Pour que les cellules résistantes ne prennent pas le contrôle
« Selon les grands principes de l’évolution, les fortes doses sont moins à même de contrôler la tumeur sur la durée parce qu’elles sélectionnent les cellules résistantes. » explique le Dr Gatenby. En fait, l’élimination des cellules sensibles au traitement limiterait la compétition pour le sucre et l’oxygène et permettrait aux cellules résistantes de croitre rapidement. Elles prendraient donc le dessus ce qui expliquerait que la tumeur soit de plus en plus difficile à éliminer.
Pour les chercheurs, au lieu de traiter agressivement la tumeur, les doses de chimiothérapie devraient être abaissées en fonction de la réponse tumorale afin qu’une petite population de cellules sensibles au traitement persiste et ralentisse la croissance des cellules résistantes.
Ce concept simple change « le paradigme existant selon lequel le cancer est un tissu étranger qui doit être éradiqué par de fortes doses de chimiothérapie » pour «l’idée que le cancer est un système éco-évolutionnaire et que le contrôle de la croissance tumorale est une voie thérapeutique plus appropriée, et moins toxique », commente le Dr Giannoula L. Klement (oncopédiatre, Tufts School of Medicine, Boston, Etats-Unis) dans un éditorial accompagnant l’article [2].
Pour l’éditorialiste, cet écosystème tumoral explique pourquoi certains patients ont des clones de cellules malignes sans développer de cancer.
Elle cite, notamment, l’exemple des cancers du sein occultes et celui de certains cancers de la prostate qui peuvent bénéficier d’une surveillance active.
Un modèle « éco-évolutionnaire »
Le Dr Gatenby et coll. ont testé la thérapie adaptative chez des souris ayant reçu des implants de tumeurs du sein de statuts triple négatif et œstrogène positif.
Les souris ont été traitées selon trois approches :
-L’approche standard (ST) : dose maximale de paclitaxel (20 mg/kg), deux fois par semaine pendant deux semaines et demie.
-L’approche adaptative 1 (AT1) : sur la base d’un algorithme prédéfini, après une dose initiale de 20 mg/kg, les doses de paclitaxel diminuaient en fonction de la réduction de la tumeur. La fréquence d’administration du traitement restait la même.
-L’approche adaptative 2 (AT2) : le paclitaxel était administré à une dose modérément élevée (15 mg/kg). La dose ne variait pas mais la fréquence du traitement dépendait de la croissance de la tumeur mesurée deux fois par semaine. Le traitement n’était pas administré si le volume de la tumeur restait constant ou diminuait par rapport aux deux dernières mesures.
Citer cet article: Aude Lecrubier. Le concept de « chimiothérapie adaptative » fait son apparition cancérologie - Medscape - 11 mars 2016.
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