Buenos Aires, Argentine --Et si les microcéphalies qui se multiplient dans le Nordeste du Brésil étaient en lien – du moins en partie – avec l’utilisation massive d’insecticides destinés à la lutte contre le vecteur de la dengue dans cette région depuis 2 ans ? C’est l’hypothèse qu’un pédiatre argentin, le Dr Medardo Avila Vazquez, propose dans un rapport publié sur le site de la Red Universitaria de Ambiante y Salud, Medicos de pueblos fumigatos. Ce groupe de médecin travaille depuis 2010 sur des articles et des études à propos de la santé des populations sud-américaines en contact avec des insecticides.
Début février 2016, le Dr Medardo Avila Vazquez fait un point sur les microcéphalies au Brésil et propose deux hypothèses pour expliquer leur recrudescence : l’introduction de moustiques transgéniques par la compagnie britannique Oxitec ( voir notre article), et l’utilisation massive depuis la mi 2014 et sous l’égide du Ministère Brésilien de la Santé, de pyroproxyfène, un insecticide recommandé par l’OMS pour lutter contre les moustiques de type Aedes. Ce toxique a été directement déversé dans les réservoirs d’eau potable de l’état du Pernambouc.
Le pyroproxyfène tératogène pour Aedes comme pour l’homme ?
Le pyroproxyfène inhibe le développement des larves d’Aedes par perturbation endocrine et crée des malformations telles que les moustiques atteignent rarement l’âge adulte. Pour le Dr Vazquez, « la survenue des microcéphalies dans les états où le pyroproxyfène a été ajouté à l’eau de boisson n’est pas une coïncidence, quoi qu’en dise le Ministère de la santé ».
Partant du constat que « 60 % des gènes actifs chez l’humain sont similaires à ceux d’Aedes, il est probable que l’insecticide soit aussi tératogène chez l’homme.
Il ajoute aussi que « le Brésil utilise aussi du Malathion, un organophosphoré pour la lutte contre Aedes, que le Paraguay a acheté de clorpyriphos et que l’Argentine contrôle les vecteurs avec des pyréthrinoïdes, or toutes ces substances sont interdites en Europe en raison de leur toxicité sur les enfants à naitre ».
Les médecins de santé publique du Brésil (Association ABRASCO) demande que l’OMS et la Pan American Health Organisation revoient leur position sur les insecticides en prenant en compte l’environnement et les problèmes sanitaires et notamment en réfléchissant aux problèmes que crée la culture intensive de soja en Amérique du Sud.
Microcéphalies isolées sans malformations cardiaques associées
Cette publication argentine fait écho à un autre travail mis en place depuis 2012 par le Dr Sandra Matteos, une cardiologue pédiatrique brésilienne. A partir d’une base de données de 100 000 enfants nés avec des malformations cardiaques dans la région de Paraíba, elle a travaillé sur les 16 000 bébés pour lesquels elle disposait du périmètre crânien.
Comme elle l’explique à ABC.net.au, « l’incidence des microcéphalies a augmenté depuis 4 ans au Brésil atteignant 2 à 8 % des naissances soit 2 000 à 4 000 dans la région de Paraíba ». Chaque année, depuis 2012 il existe au printemps et en été un pic de naissances d’enfants microcéphales, le pic le plus important ayant été rapporté en 2014.
« En 2015, des cas plus sévères de microcéphalies isolées ont été rapportés et, alors que les années précédentes les malformations neurologiques étaient associées avec des malformations cardiaques, cela ne semble pas être le cas en 2015 », ajoute le Dr Matteos.
Quelle est donc la cause de ces microcéphalies sévères isolées ? La question reste encore sans réponse à ce jour. Et chaque jour de nouvelles théories du complot viennent s’ajouter.
Citer cet article: Dr Isabelle Catala. Zika : après les moustiques transgéniques, les insecticides - Medscape - 16 févr 2016.
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